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Theatre

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où serait l’intérêt de reproduire indéfiniment, sans apport personnel, la même mise en scène ? Le metteur en scène « interprète » donc, mais peut-on justifier un telle interprétation dans la scène de M. Dimanche ? Daniel Mesguich : « Si les textes traversent l’histoire, ils s’adressent possiblement à une époque à venir…Un texte peut être terre d’accueil de sens que son auteur ne connaît pas, mais que d’autres lecteurs à venir pourront faire entrer dans le texte. Et le texte en sera grandi, n’en déplaise à tous les tenants de la « fidélité » au texte, qui veulent en réalité défendre la fermeture du texte, sur le sens qu’ils ont donné au texte. Mais un texte est plus grand qu’eux, il attend qu’on le nourrisse encore. Je ne dis pas que Molière avait pensé au « pré-fascisme » de Dom Juan avec M. Dimanche, certainement pas, mais peu importe, son texte y a pensé pour lui, si j’ose dire, son texte permet cela et c’est pour ça que c’est un grand texte… ». Par ailleurs « une mise en scène n’est pas faite pour rester, mais pour dire où on en est, après il faut la jeter. Le texte lui va rester. » Enfin « le théâtre, ce n’est pas de montrer paresseusement et immédiatement ce qui est lisible ; si le théâtre a une quelconque valeur, c’est qu’il vient révéler momentanément quelque chose qui était caché. »

Deuxième point : pourquoi faire de cette scène une tragédie et de Monsieur Dimanche un juif ? « J’ai toujours trouvé que cette petite scène de M. Dimanche semblait rapportée, rajoutée, comme un clin d’œil à un théâtre comique un peu convenu, et en plus, à mon avis, pas drôle du tout. Je ne trouve pas ça drôle qu’on refuse de payer l’usurier, celui qui a prêté de l’argent. Et donc, je trouvai que, parce qu’il s’appelait « dimanche », dimanche étant un nom bizarre, pas normal, pas catholique, comme un nom d’emprunt…D’autre part, parce qu’il est usurier, les juifs l’étaient à cette époque-là, souvent en tous cas, ils n’avaient pas le droit de faire autre chose, et les chrétiens étaient peu souvent usuriers…Et d’autre part, quand Dom Juan lui dit « voulez-vous dîner avec moi ? », il répond « Ah non, non », il mange casher lui, il ne mange pas ce que mange Dom Juan . Pour toutes ces raisons-là- et je ne dis pas que c’est la vérité, c’est une possibilité- eh bien M. Dimanche est le juif bafoué par ce –je ne sais comment on pourrait dire- par ce –entre guillemets- « pré-fasciste » qu’est Dom Juan. » « M. Dimanche arrive comme un cheveu sur la soupe dans l’histoire. Si on l’enlève, cela ne change rien. C’est un petit machin rigolo, qui n’est pas drôle, qui est même minable comme comique, sauf si on le prend très au sérieux. C’est alors une scène d’une violence extrême, d’une méchanceté, d’une cruauté sans nom. Cette méchanceté est une des facettes de Dom Juan, « grand seigneur méchant homme », ce mépris est aussi celui qu’il a pour les femmes. Un personnage est fait d’éléments contradictoires, malgré ses aspects progressistes, Dom Juan a aussi cet aspect pré-fasciste. On retrouve ici en germe toute la haine, tout le mépris, la brutalité, la violence qu’il y aura au vingtième siècle. M. Dimanche, un nom d’emprunt, un usurier, qui mange casher… je ne dis pas que Molière a écrit que M. Dimanche est un juif, je dis qu’avec les dialogues que nous avons, moi j’ai le droit d’en faire un juif religieux d’aujourd’hui…Je ne dis pas que Dom Juan, c’est Hitler, je dis qu’il y a dans le personnage ce germe-là. »

Troisième point, les procédés utilisés par le metteur en scène. Tout d’abord, Monsieur Dimanche porte les habits traditionnels des juifs (du XVIIIème siècle, en fait). Puis, il vient sur scène avec sa famille. Mesguich s’appuie sur le fait que ces personnages sont cités dans le texte, il les place donc sur scène car ils donnent de l’humanité et du pathétique au personnage. L’acteur Laurent Montel, qui joue M. Dimanche, a précisé les indications que le metteur en scène lui a données : M. Dimanche est dans l’absolue nécessité de quitter le pays pour sauver sa famille, c’est une question de vie ou de mort. Il a besoin de son argent, et il attend que Dom Juan le lui rende. Ce dernier est censé parfaitement savoir de quoi il retourne, mais ne change rien à sa conduite pour autant. Il n’est donc pas le persécuteur même, mais son complice muet et complaisant. Dans la scène, Mme Dimanche reste constamment près de ses enfants, terrorisée, prête à retenir son mari quand Dom Juan l’invite à s’asseoir près de lui. M. Dimanche la rassure à plusieurs reprises par des gestes. Dom Juan est constamment méprisant, et joue avec eux comme un chat avec sa proie. Ainsi quand il les fait asseoir, on a le sentiment d’un piège qui leur est tendu. Quand il prononce le nom Dimanche,

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