Quels sont les différents types de séduction de la parole ?
Dissertation : Quels sont les différents types de séduction de la parole ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar maaralba • 18 Avril 2023 • Dissertation • 812 Mots (4 Pages) • 399 Vues
Question de réflexion guidée : Quels sont les différents types de séduction de la parole ?
Si l’on s’en réfère à son étymologie latine, la notion de séduction implique de détourner, d’amener à l’écart son interlocuteur. La parole, depuis des siècles, est un moyen de séduction essentiel : preuve en sont les nombreux exemples que l’on peut retrouver dans la littérature, qu’elle soit ancienne ou plus moderne. Seulement, le séducteur peut aussi bien se servir de la parole à des fins malveillantes, tentant et manipulant l’autre, que pour élever ce dernier à la connaissance et l’éduquer.
La manipulation de la parole est au centre du texte fondateur de la religion chrétienne : la Bible. En effet, dans la Genèse, le serpent, représentant le diable, donc la voix du mal, pousse Eve à croquer le fruit défendu, en lui promettant de devenir aussi puissante que Dieu. Elle devient alors à son tour tentatrice en le donnant à Adam, ce qui provoque leur chute : ils sont tous deux chassés du jardin d’Éden. Malgré leur vie paisible dans ce lieu magnifique, la séduction du serpent est assez puissante pour les convaincre de commettre un péché aussi grave que celui-ci, quitte à risquer la mort, en leur faisant miroiter un pouvoir comparable à celui de Dieu, dont les deux humains sont avides bien que leur vie soit déjà agréable.
Un autre exemple de tentation à combattre, selon les Entretiens d’Épictète, est celle des femmes et des plaisirs charnels, qui dévient l’homme des pensées vertueuses. Pour l’auteur, résister à ce type de séduction est un grand combat, permettant d’accéder à « la loyauté, la liberté, […] la félicité, l’innocence ». Il considère la capacité à résister à la tentation de la luxure comme une preuve de force intérieure, dont la satisfaction obtenue est comparable au fait de gagner un débat en déjouant les figures rhétoriques de son adversaire.
Enfin, dans l’Éthique à Nicomaque d’Aristote, le philosophe met en garde contre les pouvoirs de la flatterie : ce texte oppose l’ami, qui veut notre bien, au flatteur qui veut notre plaisir. Pour Aristote, ces deux notions ne doivent en aucun cas être confondues : il explique que certains plaisirs nous sont nocifs et nous éloignent même du bien et de la vertu, c’est à dire la capacité à faire le bien. Bien que l’auteur n’appelle pas à rejeter toute forme de plaisir, il montre néanmoins la nécessité de ne pas faire desdits plaisirs notre unique source de motivation : en revanche, la recherche de la vertu doit l’être.
Si ces exemples nous montrent qu’il est capital de se méfier des séductions de la parole, car elles peuvent parfois nous causer du tort, il est un texte de Platon qui montrent un autres aspect de ces séductions. Dans le Lachès, Nicias fait l’éloge de la maïeutique, technique qu’utilise Socrate pour élever son interlocuteur à la connaissance, sans pour autant la lui imposer : le but de Socrate est d’amener l’autre à trouver les réponses à ses questions lui-même. Là encore, il s’agit d’une séduction de la parole au sens originel du terme : en effet, Nicias explique que, peu importe le sujet de la conversation, Socrate parvient toujours à la détourner pour examiner toutes les questions que se pose son interlocuteur. Il l’écarte donc bien du « chemin » initialement emprunté, mais cette fois ci dans l’optique de l’éduquer, et non pas de le manipuler. Si l’on s’appuie sur les dires de Nicias, « l’argumentation de Socrate le retourne continuellement dans tous les sens », il va même jusqu’à la décrire comme un traitement infligé par le philosophe, bien qu’il n’en soit pas mécontent pour autant car elle lui permet d’accéder à une introspection, et de réfléchir sur son mode de vie aussi bien passé que présent. D’autres néanmoins tentent de résister à la méthode socratique qui les rend honteux : c’est bien là la preuve de sa puissance, car décrite comme responsable, selon Alcibiade, d’« un état de possession, d’un délire et d’une ivresse philosophiques », elle peut être mal reçue par certains. Au-delà d’une séduction, c’est plutôt une tentative d’éducation que met en place Socrate : toutes deux construites sur le verbe latin duco, la première de ces notions conduit à l’écart tandis que la seconde l’élève et le tire vers le haut.
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