La transposition des directives de l'Union européenne
Dissertation : La transposition des directives de l'Union européenne. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Julia Lattanzio • 22 Février 2022 • Dissertation • 3 045 Mots (13 Pages) • 610 Vues
Dissertation de droit administratif
Sujet : Le juge administratif et la transposition des directives de l’Union européenne.
« La cour de Justice de l’Union européenne ne doit pas être notre cour suprême » disait l’avocat Jérôme Turot suite à la décision de la cour de Luxembourg de rendre un arrêt sanctionnant le conseil d’État Français.
En effet, le 4 octobre 2018, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) reprochait au conseil d’État de ne pas avoir saisi la Cour pour une question préjudicielle concernant un précompte immobilier. Ainsi, ce litige met en exergue le caractère conflictuel qui peut exister sur la question des partages de compétences entre les États membres, qui veulent garder une souveraineté certaine et les institutions européennes qui veulent asseoir leur pouvoir.
L’Union européenne est un espace géographique et politique dans lequel le droit à une importance particulière, on dit que l’intégration des États-membre se fait par le droit. Ces États-membre, de par leur adhésion à l’Union européenne, acceptent de transmettre certaines de leurs compétences à des institutions communautaires. En effet, l’intégration de l’ordre juridique de l’Union européenne au sein de l’ordre juridique interne est consacrée constitutionnellement par l’article 88-1 et permet une singularisation du traitement du droit de l’Union européenne au sein de l’ordre juridique en raison de la primauté revendiquée par celui-ci. Ce dernier dispose que : « la République participe à l’Union européenne constituée d’États qui ont choisi librement d’exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du TUE et du TFUE, tels qu’ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 ».
L’Union Européenne est donc créatrice de droit, à la fois du droit tiré des traités que l’on qualifie de primaire, mais aussi du droit dérivé qui se compose des règlements et des directives. Ces directives lient « tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens » d’après l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Ces dernières doivent alors être transposées dans le droit national pour assurer leur exécution au sein des États membres.
Dans ce contexte, le juge administratif a pour compétence d’appliquer et d’interpréter le droit de l’Union Européenne. Ce dernier, étant le juge qui traite les droits et les obligations de l’administration, compétent lorsque l’État est un acteur du litige. La haute administration de l’ordre administratif est le conseil d’État, de fait lorsque le juge n’est pas compétent pour répondre à une question, il saisit le Conseil d’État pour que ce dernier puisse y répondre. Quant à lui, le conseil d’État doit se tourner vers la Cour de Justice Européenne si cette question relève d’un règlement ou d’une directive de l’Union Européenne.
Or, le Conseil d’État et la Cour de Justice Européenne entretiennent parfois des rapports conflictuels qui par extension opposent les juges administratifs nationaux et les juges européens. La question conflictuelle étant de savoir qui de la Constitution ou de la Cour du Luxembourg prime sur l’autre dans une logique de suprématie.
Nous nous demanderons alors comment la transposition du droit de l’Union Européenne est-elle possible sans pour autant remettre en cause le rôle du juge administratif ?
Nous verrons que si la primauté du droit européen tend à remettre en cause le rôle du juge administratif, ce dernier participe à l’équilibre en se portant garant à la fois de la Constitution et du droit de l’Union Européenne.
I/ Une primauté du droit européen qui tend à remettre en cause le rôle du juge administratif
La construction européenne se complexifie lorsque la question des compétences, notamment en matière juridique, s’inscrit dans une logique de rivalité. Effectivement, la primauté du Droit de l’Union Européenne s’accroît et remet par là-même en cause le rôle du juge administratif. Le caractère direct vers quoi tendent les directives européennes (A) et les nombreuses exigences européennes auxquelles doivent s’adapter les juges (B) en sont des illustrations.
A) L’effet direct des directives européennes sur le juge administratif
En adhérant à l’Union Européenne, la France a accepté de transmettre certaines de ses compétences aux institutions européennes. Ainsi, le droit européen engendre des devoirs pour les États membres mais aussi des droits aux citoyens européens qui peuvent ainsi se référer directement à des juridictions communautaires en cas de litige en invoquant des normes européennes. Cet effet direct du droit primaire de l’Union européenne a été consacré par la Cour de Justice de l’Union Européenne lors de l’arrêt Van Gend en Loos le 5 février 1963.
Par ailleurs, outre le droit primaire, le droit dérivé qui se compose à la fois des règlements et des directives a également un caractère direct. Effectivement, le règlement comporte par nature un effet direct dans son application (article 288 du TFUE). Les directives quant à elles ne le sont qu’après l’expiration du délai de leur transposition si leurs dispositions sont claires, précises et inconditionnelles depuis l’arrêt Van Duyn du 4 décembre 1974, qui a dénaturé le principe initial des directives. Cet arrêt explique que : « si le traité reconnaît l’effet direct par nature des règlements, il n’en résulte pas que d’autres catégories d’actes ne peuvent bénéficier d’effets analogues ».
Par cet effet direct, l’applicabilité du droit européen est garantie car un particulier peut ainsi demander l’application d’une directive en saisissant le juge compétent alors même que les justiciables ne pouvaient initialement pas se prévaloir des dispositions d’une directive devant une juridiction en raison du caractère indirect que devait avoir la directive. Ainsi, les nuances entre les règlements et les directives ne semblent plus tant marquées et les deux actes se confondent dans leur mise en pratique. Les directives ne correspondent plus à ce qui était fixé par le traité du TFUE et cette évolution est largement remise en cause par les juges administratifs. En effet, ces dernières doivent par la jurisprudence de l’arrêt Van Duyn, précédemment évoqué, faire prévaloir le droit communautaire au droit interne par la suspension de loi ou de décret qui ne seraient pas en accord avec les directives. De fait, la compétence discrétionnaire des États membres, qui s’exprimait par le choix des moyens mis en œuvre pour atteindre l’objectif fixé par la directive, devient une compétence liée. D’autant plus lorsque les prescriptions ont un caractère précis et détaillé, laissant peu de marge pour l’appréciation des juges administratifs.
C’est dans ce contexte, en réaction à la jurisprudence européenne, que le Conseil d’État s’inscrivit dans un premier temps dans une logique de confrontation et ce à travers l’arrêt Cohn-Bendit du 22 décembre 1978, par lequel il se place dans une position de résistance en refusant de reconnaître l’effet direct des directives européennes. De fait, un particulier ne pouvait pas se prévaloir directement des dispositions d’une directive afin d’en obtenir l’application, on parle ainsi de l’invocabilité d’exclusion. Cependant, le Conseil d’État va par la suite adoucir avec une jurisprudence allant davantage dans le sens européen pour s’aligner aux autres États membres notamment. Ainsi, il va dans un premier temps reconnaître l’effet direct des actes administratifs réglementaires puis individuels.
B) Un contrôle du juge administratif adapté aux exigences européennes de primauté des directives
Le juge administratif est un juge de droit commun du droit de l’Union européenne, il doit ainsi à la fois interpréter le droit interne et le droit communautaire. Ce dernier, doit par sa jurisprudence faire primer le droit de l’Union Européenne lorsque celui-ci est contraire au droit national. De fait, tout acte administratif doit être annulé s’il n’est pas conforme au droit communautaire. Ainsi, le juge administratif doit assurer le contrôle de la conformité des décrets de transposition des directives aux normes européennes. Cette procédure est confirmée par l’arrêt du 28 septembre 1984 qui porte sur la confédération nationale des sociétés de protection des animaux de France et des pays d’expression française, et se traduit par l’annulation du décret du 1er octobre 1980.
Par ailleurs, ces exigences européennes répondent à des obligations toujours plus contraignantes pour l’administration elle-même. La Cour de Justice de l’Union européenne va notamment reconnaître le principe de la responsabilité des États membres pour violation du droit communautaire à travers l’arrêt Francovich du 19 novembre 1991. Par cet arrêt la Cour donne aux citoyens européens la possibilité d’une action en réparation contre un État membre qui ne respecterait pas le droit européen.
De plus, la primauté du droit communautaire prend forme au travers notamment de l’extension de la primauté des directives et la Constitution française ne peut s’en prémunir puisque qu’avec l’article 55, elle donne elle-même
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