Les principes généraux du droit ont-ils encore une influence comme « source interne » du droit administratif ?
Dissertation : Les principes généraux du droit ont-ils encore une influence comme « source interne » du droit administratif ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Virginie Brifeille • 29 Mars 2017 • Dissertation • 4 628 Mots (19 Pages) • 2 120 Vues
Dissertation
Les principes généraux du droit ont-ils encore une influence comme « source interne » du droit administratif ?
Les principes généraux du droit (pgd) existent dans de nombreuses branches du droit, du droit civil au droit pénal…Ils se sont développés d’abord en droit public et notamment en droit administratif, où ils sont particulièrement importants.
Les pgd sont définis comme des principes non écrits de portée générale que le juge considère comme s'imposant à l'administration et à l'Etat et dont la violation est considérée comme une violation de la règle de droit. Ces principes sont dégagés, créés par le juge, dans l’obligation de juger des litiges qui lui sont soumis, même en l’absence de textes. Il s’agit de savoir si ces principes non écrits et dégagés par le juge administratif peuvent « encore » contribuer à influencer le droit administratif. Cela signifie qu’auparavant, ils ont été considérés comme une source interne du droit administratif. Il faut donc trouver la date de rupture, et les raisons de cette réévaluation du rôle des pgd.
Notons que les pgd ne sont pas qu’une influence du droit administratif, mais une source de ce droit. Cela signifie qu’ils contribuent créer l'ensemble des règles juridiques applicables dans un État à un moment donné et qui règlementent les droits et obligations de l’administration et les rapports entre personnes morales de droit public et administrés. Dans les pays de droit écrit, comme la France, les principales sources du droit sont des textes tels que la Constitution, les traités internationaux, les lois, les règlements. Cependant, d'autres sources sont parfois admises selon la matière, telles que la coutume, ou les principes généraux du droit consacrés par la jurisprudence, comme nous allons le voir. Les sources internes correspondent aux textes applicables uniquement au sein du territoire français, comme la Constitution, la loi, les ordonnances, les règlements autonomes, les décrets, les arrêtés.
Si l’on restreint notre étude au droit administratif, il existe plusieurs sources de la légalité administrative. Il s’agit de l’ensemble des normes que doit respecter l’administration dans l’édiction de ses actes et que le justiciable peut invoquer à l’appui de son recours contre un agissement de l’administration. Depuis le XXème siècle, les sources de la légalité administrative, comme les sources des autres ordres juridiques modernes sont hiérarchisées, de la Constitution aux actes règlementaires. Les sources sont essentiellement écrites et il faut donc nous demander si les pgd, principes non écrits, contribuent encore aujourd'hui à créer le droit administratif en vigueur sur l’ensemble du territoire, quelle est leur place dans la hiérarchie des normes, et quelle est leur portée.
Il faut logiquement exclure de notre étude les sources internationales de la légalité administrative. Le droit international est une source importante du droit administratif car la France est liée par plus de 5000 traités internationaux, qui bénéficient de la primauté sur la loi conformément à l’article 55 de la Constitution. Nous connaissons un système moniste c'est-à-dire que les traités s’intègrent immédiatement en droit interne, à condition d’être régulièrement ratifiés. Sur cette question il faudrait se pencher sur l’influence non négligeable des directives et traités européens en droit interne. De plus nous allons exclure de notre étude les autres sources du droit administratif, qu’elles soient constitutionnelles, législatives ou règlementaires Nous allons uniquement nous concentrer sur les sources jurisprudentielles du droit administratif que constituent les pgd.
Ce sujet présente plusieurs intérêts. Tout d’abord il y a un intérêt pratique. Les pgd permettent au juge administratif de dégager des solutions en l’absence de textes. C’est nécessaire en cas de carence des textes car le juge à l’obligation de juger des litiges qui lui sont soumis. En dégageant des pgd, la fonction du juge n’est plus réduite à la simple application du droit, il n’est plus la simple « bouche de la loi ». Le juge peut se détacher des textes et dégager des principes correspondant à l'état du droit et de la société à un instant donné. Ils illustrent la nécessité d’apporter une protection particulière à des principes auxquels la société est attachée à un moment donné.
Ensuite il y a un intérêt théorique car les pgd sont des principes qui s’imposent à l’administration, tenue de les respecter. Ainsi des principes dégagés par le juge peuvent contraindre l’administration et ils complètent les sources de la légalité administrative. Le juge, en dégageant des pgd va procéder à la construction de la jurisprudence administrative, et cela révèle ainsi sa place essentielle dans l’élaboration du droit administratif. De plus d’un point de vue théorique il est intéressant d’apprécier la portée des pgd dans la hiérarchie des normes et la concurrence qu’ils subissent avec l’apparition de nouveaux principes.
Enfin, il y a un intérêt historique. En effet, au moment de la Révolution française, le pouvoir judiciaire était nul et dans la séparation des pouvoirs le juge n’intervenait que pour appliquer les textes. Cela traduit une conception classique selon laquelle, quel que soit le litige, il y a toujours un texte applicable. Il n’existerait pas de lacunes et la loi peut résoudre tous les litiges. Cette conception est dépassée. On sait que les situations concrètes ne sont jamais toutes prévues par les textes, il existe aussi des textes anciens, obscurs, contradictoires. Aujourd'hui la jurisprudence a montré que le juge pouvait se permettre d'interpréter la loi dans une certaine mesure, et notamment s'il le faisait en rendant explicites ces principes non-écrits, dont la qualité est généralement consensuelle. Les pgd ont été utilisés implicitement par le Conseil d’Etat puis ont été consacrés explicitement à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le premier pgd a avoir été consacré est le principe du respect des droits de la défense dans les arrêts du Conseil d’Etat du 5 mai 1944, Dame veuve Trompier-Gravier et du 26 octobre 1945, Aramu. Depuis, ils n’ont cessé de se développer et on distingue les pgd de première et de deuxième génération. Les pgd de première génération sont ceux qui apparaissent en premier. Ils ont pour rôle de réguler les rapports entre l’administration, le juge et les administrés. Ce sont les grands principes du droit administratif et en raison de leur rôle fondamental, leur production est continue. Ils sont classés en quatre catégories : le respect de l’égalité, la sauvegarde des droits et libertés des citoyens, l’organisation de l’administration et la sécurité juridique. Les pgd de deuxième génération quant à eux ont été découverts dans les années 1970 et sont beaucoup plus techniques. Ils sont essentiellement centrés sur les droits économiques et sociaux.
Aujourd'hui, les pgd constituent une des principales sources du droit administratif. Ils sont fondamentaux en droit administratif. Seulement, ils sont concurrencés par des principes bénéficiant d’une valeur juridique supérieure en raison de leur situation dans la hiérarchie des normes, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et les principes à valeur constitutionnelle. Ces principes sont essentiellement développés par le Conseil constitutionnel, le rival notoire du Conseil d’Etat. L’influence des principes développés par le Conseil constitutionnel doit relativisée car le Conseil d’Etat est intervenu en la matière pour conserver le contrôle de la construction du droit administratif. La mainmise du Conseil sur le droit administratif explique notamment que les pgd en soient encore aujourd'hui une des sources primordiales. Ils permettent de maintenir une cohérence dans l’articulation des règles de droit en complétant les carences des textes et en consolidant leur légitimité.
Nous verrons donc dans un premier temps que des principes juridiquement supérieurs aux pgd vont avoir une influence comme source du droit administratif. Puis nous verrons que malgré la concurrence qu’ils subissent, ils restent une des principales sources de la légalité administrative.
I – L’influence de principes juridiquement supérieurs aux pgd comme source du droit administratif
Le droit administratif subit l’influence de principes bénéficiant d’une valeur juridique supérieure : les PFRLR et les pvc. Ces derniers sont issus principalement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et revêtent une valeur constitutionnelle. Cette construction jurisprudentielle réalisée par le juge constitutionnel va atténuer la portée et l’utilité des pgd. Le Conseil d’Etat, face à ce développement de la jurisprudence constitutionnelle, va tenter de préserver sa fonction prétorienne et sa place principale dans l’élaboration du droit administratif.
A – L’activité jurisprudentielle du Conseil constitutionnel atténuant l’utilité des pgd
Les PFRLR et les pvc ont en commun leur valeur juridique. Ce sont des principes à valeur constitutionnelle et ils sont donc supérieurs aux pgd, qui eux ont une valeur infra-législative et supra-décrétale. Il arrive que ces principes empiètent sur le champ d’application des pgd et en recoupent certains. Ainsi, en raison de leur valeur juridique supérieure, ils vont porter
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