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Commentaire d'arret chambre social 13 octobre 2010

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argument évoqué par l’employeur est t’il suffisant ? La question qui s’est posée devant la Cour de cassation est la suivante : un syndicat dont les statuts rédigés en 1946 prônent l’abolition de l’état et préconise l’action directe peut-il être considéré comme respectant les valeurs républicaines et ainsi désigner un représentant de section syndicale sur le fondement de l’article L 2142-1-1 ?

La Cour de cassation rejette le pourvoi et décide que « c'est à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, des valeurs républicaines, d'apporter la preuve de sa contestation » ; le tribunal d'instance ayant constaté « que la preuve n'était pas rapportée que le syndicat CNT, en dépit des mentions figurant dans les statuts datant de 1946, poursuive dans son action un objectif illicite, contraire aux valeurs républicaines, le moyen n'est pas fondé ». L’employeur doit rapporter la preuve de l’illicéité du critère de représentativité. En l’occurrence il s’agit du critère du respect des valeurs républicaines : il revient à celui qui conteste l’existence de ce critère d’apporter la preuve que le syndicat ne respecte l’élément.

En quoi l’appréciation la large interprétation de la validité du critère par la Cour de Cassation entraine-t-elle une meilleure protection du syndicat ? La Cour de cassation statue simultanément sur la charge de la preuve du non-respect des valeurs républicaines par le syndicat (I) et des modalités de la preuve, qui œuvrent pour une interprétation large de la validité du critère (II).

I) La charge de la preuve en cas de contestation des valeurs républicaines du syndicat

Dans sa décision, la Cour de cassation rappelle l’importance de la condition de respect des valeurs républicaines (A), et en renverse la charge de la preuve (B)

A) La condition de respect des valeurs républicaines dans l’organisation syndicale.

Selon, l’article 2121-1 du Code du travail, le respect des valeurs républicaines est une condition de validité d’une organisation syndicale, au même titre que plusieurs autres. En effet, c’est une condition nécessaire pour pouvoir entrer en représentativité, tels que le critère de l’audience (10% au niveau de l’entreprise, et 8% au niveau de la branche ou au niveau national interprofessionnel), une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique, une transparence financière (comprenant une astreinte à une procédure de publicité de leurs comptes), et une certaine indépendance vis-à-vis de l’employeur. Par ailleurs, la lettre du texte précise expressément que les critères sont cumulatifs : un syndicat doit respecter conjointement l’ensemble de ces critères pour pouvoir être représentatif.

En l’espèce, les juges du fond ont donc contrôlé la validité de la représentativité syndicale au regard de ces critères, et plus particulièrement donc au regard du critère de respect des valeurs républicaines. Ainsi, les moyens avancés lors du pourvoi illustrent une contestation du non-respect des valeurs républicaines, en ce sens que les statuts du syndicat prévoyaient l’abolition de l’Etat et une négation de l’organisation républicaine Française. Selon la qualification de la chambre sociale, le non-respect des valeurs républicaines serait constitutif de la poursuite d’un objectif illicite, qui remettrait en cause la validité même de l’organisation syndicale représentative.

Mais la chambre sociale, dans sa décision, ne censure pas le syndicat mis en question, et estime qu’il respecte les critères cumulatifs de l’article 2121-1 du code du travail, car « la preuve n'était pas rapportée que le syndicat CNT, en dépit des mentions figurant dans les statuts datant de 1946, poursuive dans son action un objectif illicite, contraire aux valeurs républicaines ». Ainsi, quand bien même les statuts du syndicat, datant de 1946, peuvent laisser place à une certaine ambiguïté, la Cour de cassation privilégie la poursuite d’un objectif illicite dans l’action du syndicat. Elle se base donc ici davantage sur l’analyse concrète de la poursuite des objectifs du syndicat, dans sa mise en œuvre pratique, réelle. Car en effet, il se peut, en l’espèce, que l’action menée par les syndicats respecte le critère légal, sans pour autant que ses statuts, dans leur rédaction originaire, ne soient blanchis de tout soupçon. Par ailleurs, il apparaît que la chambre sociale tienne compte de l’ancienneté des statuts, leur rédaction ayant eu lieu il y a plusieurs dizaines d’années, dans un cadre juridique et légal qui n’était pas le même. Il n’en demeure pas moins que le juge contrôle in concreto le respect des différentes conditions légales, et plus précisément le respect des valeurs républicaines. La chambre sociale marque ici une forte influence de l’expérience et l’activité réelle du syndicat dans l’appréciation du respect des critères légaux.

Le critère lui-même, dans sa nature, peut être rapproché d'une jurisprudence de la cour de cassation selon laquelle « un syndicat professionnel ne peut pas être fondé sur une cause ou en vue d'un objet illicite. Il en résulte qu'il ne peut poursuivre des objectifs essentiellement politiques ni agir contrairement aux dispositions de l'article L. 122-45 du code du travail et aux principes de non-discrimination contenus dans la Constitution, les textes à valeur constitutionnelle et les engagements internationaux auxquels la France est partie. » (Chambre mixte, 10 avril 1998).

Cependant, le critère de respect des valeurs républicaines est un critère qui dépasse la simple nomination du représentant syndical, mais aussi la création de la section syndicale elle-même. Un syndicat non représentatif doit également respecter les valeurs républicaines pour pouvoir constituer une section syndicale au sein d’une entreprise (c. trav. art. L. 2142-1).

Mais la chambre sociale va plus loin dans son contrôle, puisqu’elle précise que la charge de la preuve est laissée à celui qui dénonce le non-respect de ce critère légal.

B) Une preuve laissée à la charge de celui qui dénonce le non-respect des valeurs républicaines

Selon l’attendu de la chambre sociale, « c'est à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, des valeurs républicaines, d'apporter la preuve de sa contestation ». Cette solution n’est pas spécialement nouvelle, puisque c’est une jurisprudence établie depuis l’arrêt Veolia du 8 juillet 2009. Ainsi, cette solution explicite le fait que c’est au demandeur de prouver que la représentativité du syndicat mis en cause est rendue impossible par l’irrespect de la condition légale. C’est en partie pour cela que la chambre sociale rejette le pourvoi, puisque l’employeur n’en n’a pas ramené la preuve.

Par ailleurs, cette solution est à mettre en parallèle avec une autre solution, cette fois-ci rendue au regard du critère de l’indépendance du syndicat, qui avait retenu ce même renversement de la charge de la preuve : « l’indépendance étant présumée, le défaut d’indépendance doit être établi par la partie qui la conteste » (Cass. soc. 22 juillet 1981, n° 81-60.695, BC V n° 748). Même si dans cet arrêt, la chambre sociale ne parle pas explicitement de présomption de respect des valeurs républicaine, le rapprochement entre les deux solutions est envisageable, puisqu’un renversement de la charge de la preuve comprend presque automatiquement une présomption connexe.

De plus, « le syndicat contesté sur sa représentativité, par l’employeur ou d’autres organisations syndicales, doit démontrer qu’il remplit les critères légaux sur lesquels il est contesté » (cass. Soc ; 4 mai 1994, n° 92-60.369 et 92-60.396 BC V n° 163). Ainsi, il n’y a que pour les critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance que la charge de la preuve est laissée à la partie demandeuse.

La raison d’une telle différence peut s’expliquer par le caractère objectif des autres critères légaux, contrairement aux critères d’indépendance et de respect des valeurs républicaines. Ce sont des valeurs plus subjectives, dont la preuve positive est plus difficile à rapporter que la preuve négative. Il est beaucoup plus abordable dans la pratique d’apporter la preuve de l’irrespect des valeurs républicaines par un détail de l’organisation syndicale, comme a tenté de le faire l’employeur en l’espèce.

Par ailleurs, la notion même de valeurs républicaines est subjective, transversale, et est difficile à délimiter. Une atteinte est beaucoup plus facile à prouver que son respect.

Il semble donc que c’est pour des raisons pratiques que la Cour de cassation a décidé de renverser la charge de la preuve en matière de non-respect des valeurs républicaines.

Par ailleurs, la décision de la Cour de cassation laisse transparaître quelques caractéristiques formelles de la preuve.

II) Les modalités de la preuve apportée du non-respect des valeurs républicaines du syndicat

La Cour de cassation, dans sa décision, semble apporter quelques éléments quant à la forme de la preuve (A), alors même qu’il n’y a pas de définition légale des valeurs républicaines (B).

A)

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