Victor Hugo, « L’enfant »
Compte rendu : Victor Hugo, « L’enfant ». Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar GAGA29777 • 24 Juin 2023 • Compte rendu • 4 706 Mots (19 Pages) • 249 Vues
Les turcs ont passé là. Tout est ruine et deuil.
Chio, l’île des vins, n’est plus qu’un sombre écueil,
Chio, qu’ombrageaient les charmilles,
Chio, qui dans les flots reflétait ses grands bois,
Ses coteaux, ses palais, et le soir quelquefois
Un chœur dansant de jeunes filles.
Tout est désert. Mais non ; seul près des murs noircis,
Un enfant aux yeux bleus, un enfant grec, assis,
Courbait sa tête humiliée ;
Il avait pour asile, il avait pour appui
Une blanche aubépine, une fleur, comme lui
Dans le grand ravage oubliée.
Ah ! pauvre enfant, pieds nus sur les rocs anguleux !
Hélas ! pour essuyer les pleurs de tes yeux bleus
Comme le ciel et comme l’onde,
Pour que dans leur azur, de larmes orageux,
Passe le vif éclair de la joie et des jeux,
Pour relever ta tête blonde,
Que veux-tu ? Bel enfant, que te faut-il donner
Pour rattacher gaîment et gaîment ramener
En boucles sur ta blanche épaule
Ces cheveux, qui du fer n’ont pas subi l’affront,
Et qui pleurent épars autour de ton beau front,
Comme les feuilles sur le saule ?
Qui pourrait dissiper tes chagrins nébuleux ?
Est-ce d’avoir ce lys, bleu comme tes yeux bleus,
Qui d’Iran borde le puits sombre ?
Ou le fruit du tuba, de cet arbre si grand,
Qu’un cheval au galop met, toujours en courant,
Cent ans à sortir de son ombre ?
Veux-tu, pour me sourire, un bel oiseau des bois,
Qui chante avec un chant plus doux que le hautbois,
Plus éclatant que les cymbales ?
Que veux-tu ? fleur, beau fruit, ou l’oiseau merveilleux ?
– Ami, dit l’enfant grec, dit l’enfant aux yeux bleus,
Je veux de la poudre et des balles.
Chute
Corruption de l’enfance
L’enfant soldat
8-10 juillet 1828
Commentaire du poème XVIII : « L’enfant »
Commentaire composé non rédigé : plan détaillé
Quand vous expliquez un poème, pensez toujours à le situer dans le recueil. N’oubliez pas de faire des rapprochements entre le texte étudié et d’autres poèmes sur les mêmes thématiques ou motifs
Introduction en 3 parties
Généralités
La guerre d’indépendance grecque de 1821 a provoqué chez les artistes européens un tel mouvement de solidarité que les Etats, d’abord opposés à toute prise de position en faveur de la Grèce, ont fini par intervenir et la libérer du joug ottoman. Victor Hugo fait partie de ces artistes et son recueil poétique Les Orientales, paru en 1829, en témoigne. Le terrible massacre des habitants de l’île de Chios, qui a eu lieu en avril 1822, fait partie des événements les plus révoltants et bouleversants de cette guerre.
Vers le texte
Ce poème, intitulé « L’Enfant », écrit en 1828, y fait directement référence, en mettant en scène un enfant, seul, au milieu des ruines. S’instaure alors un dialogue entre le poète et cet enfant.
Problématique
Comment sont mis en valeur les contrastes entre passé et présent, beauté et destruction, innocence et perversion ?
On peut aussi proposer une problématique sur la mise en valeur des ravages de la guerre.
Ainsi que souligner le pacifisme de l’auteur
Plan
Nous verrons que l’ile, autrefois paradisiaque, est totalement dévastée puis nous étudierons comment est décrit l’enfant et enfin quelles consolations le poète cherche à lui apporter.
1. Une île dévastée, opposition passé/ présent
a. Un passé paradisiaque révolu
b. Un présent de dévastation
c. le je du poète
2. L’enfant blond aux yeux bleus
a. L’enfant grec, héros éponyme du poème
b. L’enfant seul et humilié
c. Un enfant blond aux yeux bleus
3. La souffrance de l’enfant, le poète consolateur
a. Les pleurs
b. Les tentatives du poète pour consoler l’enfant
c. La chute du poème, l’enfance souillée, un poème de contrastes
1. Une île dévastée, opposition passé/ présent
Le poème évoque avec nostalgie la beauté passée de l’île v.3-6 :
ces regrets peuvent donner un ton élégiaque à ces premiers vers
- Un passé paradisiaque révolu : verbes à l‘imparfait (durée, description)
- Chio mise en valeur, passage de la Chio passée à la Chio d’aujourd’hui : triple anaphore de Chio
- La beauté et la joie de vivre de Chio, autrefois : l’île de Chio est magnifiée
Suite de 3 vers : très beau tableau, énumération
La périphrase « l’île des vins » suggère un monde de plaisirs et d’insouciance
- Les vers qui suivent : même idée : « Chio, qu’ombrageaient les charmilles/ Chio, qui dans les flots reflétait ses grands bois, /Ses coteaux, ses palais, et le soir quelquefois /Un chœur dansant de jeunes filles ».
« A l’ombre des charmilles » : les îles grecques peuvent donner l’idée de sècheresse et de chaleur : cette proposition relative suggère le contraire : de plus, le nom de ces arbres renvoie par paronymie au mot « charme ». Rime Charmilles/ Jeunes filles : monde agréable
Image très belle de miroir, avec le verbe « refléter », dans une eau limpide où tout se reflète
Suite de mots au pluriel : richesse, abondance, renforcée avec l’évocation des « palais »
- Un paysage est crée : les vignes, des coteaux boisés, la mer en contre-bas
- Références au recueil : On peut rappeler que la Grèce est, de plus, depuis l’Antiquité, une terre bénie des dieux : « Pauvre Grèce, quelle était belle » ! « Navarin », II, v. 13 et Navarin (dans le poème éponyme) est présentée comme « La ville aux maisons peintes/La ville aux dômes d’or/, la blanche Navarin », III, v. 1.
La beauté et la douceur des paysages grecs sont soulignées dans de nombreux poèmes : dans « Les Têtes du sérail », la voix de Canaris vante la beauté de célèbres villes ou îles grecques
- L’allusion à la danse est une allusion à la paix perdue et regrettée : l’expression redondante « chœur dansant » insiste sur l’harmonie et la joie passées
- Références au recueil : dans ce recueil : érotisme, sensualité, jeunesse et joie de vivre sont liés au thème du chant, de la danse et de la ronde : dans « La captive », « Les Têtes du sérail », « Lazarra » et « Fantômes », surtout : la majeure partie du poème, dont le thème est le deuil et la jeunesse perdue, est centrée sur le plaisir du bal.
Transition : c’est cette douceur qui va être l’objet de la plus grande violence. La Grèce est toujours présentée dans ce recueil comme une victime, une terre à sauver.
b. Un présent de dévastation
- Mise en valeur de la destruction avec la négation « ne… plus » qui rappelle en creux ce qu’elle était avant : « Chio, l’île des vins, n’est plus qu’un sombre écueil », c’est-à-dire un rocher abandonné
- La rime deuil/ écueil renforce l’idée de destruction et de métamorphose. Destruction matérielle : « ruine », mort des hommes : « deuil »
- Le rythme du vers : 2 hémistiches : cause : « Les Turcs ont passé là »/ conséquence : « Tout est ruine et deuil ». Conséquence non introduite par une conjonction, effet d’immédiateté. Le terme générique « les Turcs » évoque ici à lui seul violence et destruction
- Le verbe « passer » : idée qu’il a suffi d’un passage pour que tout soit détruit. Valeur du passé composé : passé dont on vérifie encore le résultat dans le présent : résultat présent d’une action passée
- Pronom indéfini : « Tout » repris 2 fois v. 1 et 7. Les 2 expressions se répondent au début des 2 sixains et se renforcent : « Tout est ruine et deuil/ Tout est désert « : il ne reste plus rien
-Expressions v. 7 « des murs noircis », v. 12 « le grand ravage » font écho à ces vers et rappellent la dévastation.
Partie transition : c. le je du poète
- Le je apparaît implicitement au v. 19 avec l’apparition du dialogue et du « tu »
- Le poète endosse un rôle tout en restant lui-même :
- Point de vue interne du poète comme s’il était à Chio : il est un spectateur bouleversé et témoin des massacres
- Tout est vu à travers son regard. C’est donc le regard du poète sur un enfant.
- Rappeler que dans ce recueil il y a différents « je ».
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