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L'Égalité Des Possibles (Eric Maurin)

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même pour les plus diplômés, les plus âgés).

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, cette évolution ne s’explique pas par les diverses inflexions institutionnelles (l’introduction du contrat à durée déterminée n’a pas accru la dualité du marché du travail : par sa flexibilité, le CDD est assorti pour la plupart des cas d’une clause de non renouvellement qui oblige le demandeur d’emploi, lorsqu’il souhaite réembaucher un salarié, à transformer son contrat en contrat permanent) mais du fait des changements technologiques et organisationnels. Des études ont montré que là ou la diffusion de technologies est la plus massive, il y a eu un phénomène d’accélération de la rotation des salariés à tous les niveaux d’organisations car les nouvelles technologies font perdre à l’ancienneté le rôle de capital invisible et rendent quasi inutile l’acquisition d’expertise. Le système productif reposant aujourd’hui sur une production de plus en plus souvent à la carte, les nouveaux travailleurs présentent de moins en moins de handicaps pour s’adapter. Enfin, la fragilisation des emplois a eu un impact considérable sur l’évolution de la condition salariale, qui s’est en partie vue restructurer.

(Il est important de noter qu’à cette vulnérabilité des relations d’emplois s’ajoutent une recomposition de certaines catégories socioprofessionnelles. C’est le cas des ouvriers, qui sont de moins en moins de type industriel (exposés au travail à la chaine ou sous cadences) mais de plus en plus prestataires de services, comme les ouvriers de transports (exposés à la pression directe de la demande => respect des délais). Cette catégorie a aussi vu son nombre diminuer au profit des employés, qui sont de plus en plus des personnels de services aux particuliers (assistance maternelle, femme de ménage) plutôt que des employés administratifs (secrétaires).

Cette recomposition a donc entrainé l’établissement de nouvelles conditions de travail. Dans notre société contemporaine, les salariés ont de plus en plus accès au statut de personne : on ne peut demander davantage d’autonomie, de réactivité et de flexibilité et de façon différente à chaque personne. Les travailleurs sont plongés dans des contextes de plus en plus informels, plus proche du client et de la demande finale. Ainsi, les réussites et les échecs professionnels apparaissent davantage comme l’expression des qualités personnelles, de la capacité à faire face à la concurrence, plutôt que comme le résultat d’injustices sociales, corrigibles par la politique publique.

De ce fait, les individus ont de plus en plus de mal à exprimer un sentiment d’appartenance envers une catégorie, d’où une perte de l’identité au travail (un discours pour mobiliser une catégorie peut être perçu comme aliénant). On se retrouve donc dans une société de plus en plus difficile à catégoriser et comme le montre l’auteur, on voit qu’au sein de chacune des grandes familles de métiers, les rubriques divers et autres sont les plus dynamiques (les employés administratifs divers +90% sur 25 ans, les indépendants divers +100% durant la même période). On constate donc que le contexte professionnel dans lequel les salariés évoluent s’est vu modifier. Cette évolution est d’autant plus déstabilisante qu’elle se produit dans un contexte ou les inégalités les plus fondamentales persistent.

(Avec la personnalisation des relations d’emploi, les inégalités sont de plus en plus difficiles à identifier au sein des entreprises mais cela ne veut pas dire qu’elles ont disparu. Tout d’abord, par le biais d’enquêtes récentes, l’auteur expose l’existence de précarité des situations familiales plutôt que des situations professionnelles. En d’autres termes, ce n’est pas parce qu’on n’est plus au chômage qu’on n’est plus pauvre. Ce dernier constat légitime donc la nouvelle identité des classes modestes qui se forge davantage dans le désarroi de voir grandir ses enfants dans la difficulté plutôt que dans l’appartenance à une classe sociale. On voit donc que les inégalités entre les familles ont changé de nature et s’expliquent de moins en moins par les différences de catégories socioprofessionnelles.

D’une part, il y a une raison d’origine sociale qui explique les inégalités de destinées sociales : il faut retenir que les différences de niveau social entre parents restent associées à de très importantes différences de destinées sociales entre enfants, en dépit de l’ouverture massive du système éducatif.

D’autre part, la politique publique privilégie aujourd’hui les inégalités de fait, c’est-à-dire la concentration sur l’égalisation des conditions des personnes constituées, plutôt que l’inégalité des chances, qui verrait l’égalisation du processus de constitution des personnes. Pourquoi ? Défendre l’égalité des possibles constitue un véritable risque politique au jour d’aujourd’hui : on peut mobiliser plus facilement les familles sur les problèmes d’inégalités de conditions de travail que sur les différents problèmes d’origines sociales et sur les problèmes futurs auxquels auront à faire face leurs enfants.

Enfin, dans notre société contemporaine, persistent encore des inégalités de revenus. Certes, l’école est à peu près gratuite de nos jours, alors pourquoi le revenu des parents aurait-il un quelconque effet sur la réussite scolaire ? Encore un fois, les enquêtes menées par Eric Maurin on montré que la pauvreté

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