DissertationsEnLigne.com - Dissertations gratuites, mémoires, discours et notes de recherche
Recherche

Albert Cohen, Le livre de ma mère, chapitre 29

Commentaire de texte : Albert Cohen, Le livre de ma mère, chapitre 29. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  16 Mai 2023  •  Commentaire de texte  •  3 274 Mots (14 Pages)  •  657 Vues

Page 1 sur 14

LL N°2 Cohen,  (1954, Le livre de ma mère)

Texte

1


5



10



15



20

Louange à vous, mères de tous les pays, louange à vous en votre sœur ma mère, en la majesté de ma mère morte. Mères de toute la terre, Nos Dames les mères, je vous salue, vieilles chéries, vous qui nous avez appris à faire les nœuds des lacets de nos souliers, qui nous avez appris à nous moucher, oui, qui nous avez montré qu'il faut souffler dans le mouchoir et y faire feufeu, comme vous nous disiez, vous, mères de tous les pays, vous qui patiemment enfourniez, cuillère après cuillère, la semoule que nous, bébés, faisions tant de chichis pour accepter, vous qui, pour nous encourager à avaler des pruneaux cuits, nous expliquiez que les pruneaux  […] veulent rentrer dans leur maison et alors le petit crétin, ravi et soudain poète, ouvrait la porte de la maison, vous qui nous avez appris à nous gargariser et qui faisiez reureu pour nous encourager et nous montrer, vous qui étiez sans cesse à arranger nos mèches bouclées et nos cravates pour que nous fussions jolis avant l'arrivée des visites ou avant notre départ pour l'école, vous qui sans cesse harnachiez et pomponniez vos vilains nigauds petits poneys de fils dont vous étiez les bouleversantes propriétaires, vous qui nettoyiez tout de nous et nos sales genoux terreux ou écorchés et nos sales petits nez de marmots morveux, vous qui n'aviez aucun dégoût de nous, vous, toujours si faibles avec nous, indulgentes qui plus tard vous laissiez si facilement embobiner et refaire par vos fils adolescents et leur donniez toutes vos économies, je vous salue, majestés de nos mères. Je vous salue, mères pleines de grâce, saintes sentinelles, courage et bonté, chaleur et regard d'amour, vous aux yeux qui devinent, vous qui savez tout de suite si les méchants nous ont fait de la peine, vous, seuls humains en qui nous puissions avoir confiance et qui jamais, jamais ne nous trahirez, je vous salue, mères qui pensez à nous sans cesse et jusque dans vos sommeils, mères qui pardonnez toujours et caressez nos fronts de vos mains flétries, mères qui nous attendez, mères qui êtes toujours à la fenêtre pour nous regarder partir, mères qui nous trouvez incomparables et uniques, mères qui ne vous lassez jamais de nous servir et de nous couvrir et de nous border au lit même si nous avons quarante ans, qui ne nous aimez pas moins si nous sommes laids, ratés, avilis, faibles ou lâches, mères qui parfois me faites croire en Dieu.










Eléments pour construire l’introduction

Albert Cohen, né le 16 août 1895 à Corfou et mort le 17 octobre 1981

Son œuvre la plus connue est Belle de seigneur qu’il écrit en 1968 mais avant celle-ci en 1954 il rend hommage dans une œuvre autobiographique à sa mère alors déjà  disparue.

  • Le Chapitre 29 en entier, antépénultième est une adresse directe à sa mère et à toutes les mères à travers elle, un hommage universel.

Lecture du texte

  • Pbtq : Comment, grâce au genre de la prière, le narrateur célèbre-t-il la figure maternelle ?
  • Annonce des mouvements :

 Premier mouvement (l. 1 à 2) : … 

Louange à vous, mères de tous les pays, louange à vous en votre sœur ma mère, en la majesté de ma mère morte. Mères de toute la terre, Nos Dames les mères, je vous salue, vieilles chéries,

anaphore

Le texte commence immédiatement par le mot Louange en anaphore. Le registre est donc épidictique. Eloge = registre épidictique clairement explicite

« à vous » = apostrophe à la 2e personne du pluriel + répétition « mères » au pluriel + hyperbole répétée 

Objet de l’éloge immédiatement identifié : les mères qu’il interpelle par une apostrophe. On peut relever l’usage du pluriel « à vous, mères » renforcé par l’hyperbole

Un éloge universel, qui s’adresse à toutes les mères du monde.

juxtaposition de 2 liens familiaux + 2e personne du pluriel / 1re personne du singulier

Sororité de toutes ces mères. Sa mère est la source, l’origine de cet hommage. C’est parce qu’il fait son éloge qu’il élargit son hommage à toutes les mères.

métaphore élogieuse +majuscules

Nos Dames les mères

1re allusion discrète à la prière du « Je vous salue Marie »

Elève sa mère au rang de reine, de déesses.

Allitération en [m] en la majesté de ma mère morte

Musicalité + son de « maman » + douceur

Mot mis en relief à la fin de la phrase. « morte »

Il s’agit donc d’une oraison funèbre sans  d’euphémisme, brutalité. Tristesse, douleur du narrateur.

Reprise et variation de l’appellation « Notre-Dame » + majuscule 

Allusion plus explicite à « Notre-Dame » = Marie mère de Jésus

Noblesse. Sont divinisées, en tous cas comparées à la mère du Jésus = le modèle de toutes les mères.

1re pers du singulier + reprise de la formule de la prière  « je vous salue »

1re apparition du pronom personnel. Solennité de l’expression. Reprise explicite de la prière chrétienne « Je vous salue Marie » à la fois une prière personnelle et collective puisque très connue.

Juxtaposition inattendue d’un adjectif péjoratif + d’un adjectif affectueux « vieilles chéries »

Petite note discordante. Mise à distance pour déjouer l’émotion. Expression hypocoristique inattendue. Dit l’affection « chéries » + dit l’âge : la mère est toujours plus âgée que l’enfant (elle n’a pas l’âge de la femme que l’homme désire et aime)

CCL partielle : Introduction centrée sur la mère, dimension solennelle, éloge inconditionnel et universel

Deuxième mouvement (l. 2 à 12) : ….

vous qui nous avez appris à faire les nœuds des lacets de nos souliers, qui nous avez appris à nous moucher, oui, qui nous avez montré qu'il faut souffler dans le mouchoir et y faire feufeu, comme vous nous disiez, vous, mères de tous les pays, vous qui patiemment enfourniez, cuillère après cuillère, la semoule que nous, bébés, faisions tant de chichis pour accepter, vous qui, [ pour nous encourager à avaler des pruneaux cuits, nous expliquiez que les pruneaux  […] veulent rentrer dans leur maison et alors le petit crétin, ravi et soudain poète, ouvrait la porte de la maison  ], vous qui nous avez appris à nous gargariser et qui faisiez reureu pour nous encourager et nous montrer, vous qui étiez sans cesse à arranger nos mèches bouclées et nos cravates pour que nous fussions jolis avant l'arrivée des visites ou avant notre départ pour l'école, vous qui sans cesse harnachiez et pomponniez vos vilains nigauds petits poneys de fils dont vous étiez les bouleversantes propriétaires, vous qui nettoyiez tout de nous et nos sales genoux terreux ou écorchés et nos sales petits nez de marmots morveux, vous qui n'aviez aucun dégoût de nous,

Anaphore de la tournure emphatique « vous qui » (pronom personnel + pronom relatif ou pronom relatif seul)

énumération de tous les actes maternels que les mères accomplissent pour leurs enfants

Comme une litanie (prière) : toutes les marques de la sainteté des mères 

Répétition du pronom personnel « nous »

et là aussi Universel. Tous les enfants. Bénéficiaires des actions maternantes.

CL de l’enseignement 

Verbes d’action

+ « bébés »

Mères sont les éducatrices, les enseignantes. 

Les gestes du quotidien de la petite enfance : faire ses lacets, se moucher, se gargariser. Gestes répétés tout au long de la petite enfance. Long apprentissage.

Texte suit la chronologie en gradation de la vie d’un homme (cf. « bébés », « école », « adolescents », « quarante ans »)

Répétition de l’expression utilisée dans le 1er mouvement « mères de tous les pays »

Un apprentissage universel, qui se fait partout, dans le monde entier, sans exceptions

Reprise de l’expression, qui revient comme un refrain, comme la prière

Onomatopées « feufeu » ; « chichis» et « reureu »

+ allitération en [f] et [r] = imitation du bruit

Vocabulaire enfantin, qui désacralise + la remontée du souvenir intact, intime

adverbe « patiemment » élogieux

Répétition 

Eloge de la mère éducatrice

Gestes répétés tout au long de la petite enfance. Long apprentissage.

CL de la nourriture

[ ] [ pour nous encourager à avaler des pruneaux cuits, nous expliquiez que les pruneaux  […] veulent rentrer dans leur maison et alors le petit crétin, ravi et soudain poète, ouvrait la porte de la maison  ]

La mère nourricière = fonction de base

Petite anecdote, métaphore bébête, familière pour duper les enfants = contraste avec le ton très solennel de la prière, afin de ne pas tomber dans le chagrin

Fait des chichis

vocabulaire péjoratif

Dévalorise le petit enfant qui est ingrat, qui fait le difficile 

+ ne comprend pas les manœuvres de sa mère

« soudain poète » 

Comprend la métaphore, devient complice de la ruse maternelle

« école »

Nouvelle étape : bébé > école

CL de l’esthétique + métaphore (comparaison avec des poneys) que nous fussions jolis avant l'arrivée des visites ou avant notre départ pour l'école, vous qui sans cesse harnachiez et pomponniez

Fierté de la mère d’avoir des enfants bien propres, bien soignés. Avec les stéréotypes « mèches bouclées », « cravates ». Importance de l’aspect extérieur, du regard des autres : « les visites », « l’école ». Il faut avoir une bonne apparence, se conformer aux codes.

juxtaposition de termes péjoratifs

vilains nigauds petits

A la fois péjoratif (dans la bouche du narrateur adulte) et hypocoristique (dans la bouche de la mère). Petits ignorants // le narrateur adulte regrette de n’avoir pas eu conscience de tout ce que sa mère faisaient pour lui = qui cache une forme de culpabilité rétrospective

« cravates », « fils » 

Ce ne sont que des garçons. Donc le « nous » n’est pas si universel, le texte parle uniquement de la relation mère/fils

Métaphore filée + « propriétaire » + relative « dont » (fonction = CdN) allitération en [p] et assonance en [i] + déterminant possessif (rare dans le texte)

Insiste sur le lien filial, l’appartenance, la mère possessive.

adjectif antéposé : bouleversantes propriétaires,

Regard du narrateur adulte. C’est lui qui est bouleversé quand il regarde rétrospectivement l’amour de sa mère. On retrouve l’émotion. Texte alterne entre l’émotion contenue mais prête à déborder / la mise à distance un peu critique grâce au vocabulaire péjoratif.

Répétition + CL de la saleté  nos sales genoux terreux ou écorchés et nos sales petits nez de marmots morveux, vous qui n'aviez aucun dégoût de nous,

Hyperbole et euphémisme

Négation partielle 

Vocabulaire péjoratif : la crasse

parle des genoux et du nez, mais pas des fesses… (cela reste sous-entendu)

La dévotion maternelle, dans le soin, la propreté. Amour inconditionnel. Supporte tout.

CCL partielle : apparition des enfants, dont on comprend au milieu que ce sont des garçons, regard distancié et amusé. Tout le quotidien de la petite enfance.

Troisième mouvement (l. 12 à 17) : ….. 

...

Télécharger au format  txt (20.9 Kb)   pdf (195.7 Kb)   docx (976.8 Kb)  
Voir 13 pages de plus »
Uniquement disponible sur DissertationsEnLigne.com