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Le Malade Imaginaire, Molière

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Par   •  15 Octobre 2023  •  Dissertation  •  1 745 Mots (7 Pages)  •  207 Vues

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I/ 1 er mouvement : LA LECTURE DE LA FACTURE DE M. FLEURANT (suite)

« Plus une potion cordiale et préservative, composée avec douze grains de bézoard, sirops de limon et grenade, et autres, suivant l'ordonnance, cinq livres. »

On retrouve la satire du langage du monde médical : pour faire croire à la puissance des médicaments qu’il fabrique, M. Fleurant utilise de nouveau plusieurs termes (même si, ici, ce ne sont plus des synonymes), et une énumération.

Ah ! Monsieur Fleurant, tout doux, s'il vous plaît, si vous en usez comme cela, on ne voudra plus être malade, contentez-vous de quatre francs.

[On retrouve ici des points déjà vus : la surfacturation de l’apothicaire et le faux dialogue.] L’exclamation et l’expression « tout doux s’il vous plaît » suggère qu’Argan se met en colère. Ce caractère colérique réapparaitra par la suite. C’est un trait qui évite que le lecteur-spectateur ait pitié d’Argan, et, surtout, cela se prête à des effets comiques. Molière écrivait les personnages de ses pièces en fonction des acteurs de sa troupe et de ce qu’ils savaient faire. Il a écrit le rôle d’Argan pour le jouer lui-même, et s’il en a fait un personnage coléreux, c’est probablement parce qu’il savait très bien jouer la colère de façon comique (on retrouve fréquemment ce trait de caractère dans les rôles qu’il a écrits pour lui : cela confirme cette hypothèse). Ainsi, il était donc sûr de faire rire son public. L’expression : « on ne voudra plus être malade » est intéressante. On dirait un lapsus révélateur. Tout se passe comme si Argan révélait inconsciemment qu’il n’est pas vraiment malade. Cela peut être mis en évidence par l’acteur qui joue le rôle : il peut par exemple faire une pause après avoir dit : « on ne voudra plus être malade », et prendre un air intrigué, comme s’il se demandait : « mais est-ce que je fais exprès d’être malade ? », et ensuite montrer qu’il chasse cette idée ; il préfère croire qu’il est vraiment malade.

Vingt et quarante sols. Trois et deux font cinq, et cinq font dix, et dix font vingt. Soixante et trois livres quatre sols six deniers.

Argan fait le montant total de la facture du mois. Le montant est important, ce qui montre de façon satirique à quel point Argan est hypocondriaque et obsédé par sa santé. Cette facture s’est arrêtée au 28, on peut donc en déduire que l’action se déroule au mois de février. Or la pièce a été écrite pour être créée sur scène précisément au mois de février 1673. On retrouve ici l’une des caractéristiques de la comédie de l’époque : elle se passe dans le monde contemporain (il y a des exceptions, mais elles sont rares). C’est donc dans un univers de comédie que l’exposition nous plonge. Plus important : le mois de février est le mois des carnavals, ces fêtes que l’on faisait avant le début du carême (période de jeûne et prières allant jusqu’à Pâques pour les catholiques). La pièce est donc placée sous ce signe du

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carnaval ; [ le fait que Béralde ait rencontré une troupe de comédiens dans la rue et les ait fait venir confirme cela (fin de l’acte II). Le 2° intermède, joué par ces « Egyptiens », ou encore le fait que des personnages se déguisent (Cléante, Toinette) contribuent à ce côté carnavalesque. Le point culminant de cette esthétique carnavalesque est le 3° intermède : non seulement tout le monde s’y déguise en médecin (dernière réplique de Béralde, acte III, scène 14), mais on s’y moque d’une institution : la médecine]. Or, le carnaval était justement la période de l’année où il était autorisé de se moquer de tout, y compris des institutions que l’on devait respecter le reste de l’année, comme le roi et l’Église. La médecine n’était bien sûr pas aussi sacrée que cela, mais elle est bel et bien dans la pièce une institution dont l’on se moque.

Si bien donc, que de ce mois j'ai pris une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept et huit médecines ; et un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze et douze lavements ; et l'autre mois, il y avait douze médecines, et vingt lavements. Je ne m'étonne pas, si je ne me porte pas si bien ce mois-ci, que l'autre. Je le dirai à Monsieur Purgon, afin qu'il mette ordre à cela. Argan fait la somme des traitements qu’il a pris. Le nombre de lavements paraît important. On retrouve la satire de l’hypocondrie. De plus, le passage semble montrer qu’Argan raisonne à l’envers à propos de sa santé ; on n’a pas l’impression qu’il se dit : « Je vais moins bien ce mois-ci. C’est parce que j’ai pris moins de traitements. », mais plutôt : « J’ai pris moins de traitements, donc je vais plus mal ». En tout cas, il est entré dans une entière dépendance de la médecine, et cette dépendance est d’autant plus ridicule que seul compte pour lui le nombre de médicaments, et non leur nature ou leur efficacité.

II/ 2° mouvement : L’EMPORTEMENT D’ARGAN CONTRE SES DOMESTIQUES

Allons, qu'on m'ôte tout ceci. Il n'y a personne : j'ai beau dire, on me laisse toujours seul ; il n'y a pas moyen de les arrêter ici.

Ce passage révèle une des causes du comportement d’Argan : il a peur de rester seul et veut qu’il y ait toujours quelqu’un avec lui. Se croire malade est donc la solution qu’il a trouvé, inconsciemment, pour pousser son entourage à s’occuper de lui en permanence.

(Il sonne une sonnette pour faire venir ses gens.) Ils n'entendent point, et ma sonnette ne fait pas assez de bruit. Drelin, drelin, drelin : point d'affaire. Drelin, drelin, Drelin : ils sont sourds. Toinette ! Drelin, drelin, drelin. Tout comme si je ne sonnais point.

La didascalie est le début d’un jeu de scène qui se développe jusqu’à la fin de la scène : Argan sonne, puis amplifie le son de sa sonnette en disant « drelin », puis arrête de sonner et crie en imitant le bruit de la sonnette. Son comportement est donc de plus en plus ridicule, et cela crée un crescendo comique. Le comique de geste que l’on a ici rejoint la satire de l’hypocondrie : Argan agit comme un fou.

Par ailleurs, cette scène d’exposition introduit le nom d’un nouveau personnage : Toinette, dont on comprend que c’est une domestique d’Argan. Elle sera l’un des personnages les plus importants de la pièce.

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Chienne, coquine ! Drelin, drelin, drelin : j'enrage. (Il ne sonne plus, mais il crie.) Drelin, drelin, drelin : carogne, à tous les diables !

On retrouve ici le caractère colérique d’Argan : cela apparaît à travers les insultes

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