Lettre XXX, La Bruyère
Dissertation : Lettre XXX, La Bruyère. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar nassim7 • 26 Avril 2017 • Dissertation • 1 816 Mots (8 Pages) • 1 247 Vues
Lettre XXX
- un caractère original / l’inspiration de La Bruyère
- Points communs
- Structure du caractère avec des scènes vivantes, des anecdotes, et une phrase qui condense les faiblesses en un mot ou une expression, ici « l’extravagance »
- Usage des temps de la répétition, ici l’imparfait d’habitude, ou du présent de vérité générale pour exprimer non pas des scènes uniques, mais des actions qui se sont répétées
- Art de la chute avec cette phrase percutante et assassine, comme La Bruyère savait le faire (« Il est riche » / « Il est pauvre » dans les caractères de Giton et Phédon)
- Différences
- Le texte est écrit à la première personne du singulier
- Le satiriste n’est pas extérieur aux scènes décrites, mais y est présent
- Le personnage ridicule est collectif, et non plus un individu comme Arrias, Théodecte, Iphis …
II) suite
Autre inélégance, celle de parler juste assez fort pour qu’il entende qu’om parle de lui
c) Vanité des Parisiens
- Cet intérêt, cette fascination qui le met au centre dissimulent mal un souverain mépris. Il ne semble honoré que pour servir de faire-valoir. Pourquoi le rencontre-t-on ? Pourquoi se bouscule-t-on ? Certainement pour pouvoir dire, penser en soi qu’on l’a vu, qu’on possède une expérience qui sort du commun, et ainsi paraître au yeux du monde, se rehausser. Au fond Rica ne semble qu’un prétexte pour se divertir et se mettre en valeur. Sa présence ne peut être que celle d’un objet décoratif et récréatif.
- La conversation finale l’illustre bien par sa chute en pointe de mépris. Si la question finale « Comment peut-on être persan ? » n’aboutit à aucune conversation, si elle n’attend aucune réplique de Rica car elle est à la fois question et réponse, si elle est en un mot inélégante et indigne de l’honnête homme, c’est parce qu’elle est fondée sur un rare mépris de l’hôte. Pourquoi parler, s’intéresser à quelqu’un privé de toute valeur autre qu’un éphémère intérêt ? Or qui mieux que Rica pourrait leur apprendre des choses sur eux, leur ouvrir les yeux ? On ne peut être persan, au mieux c’est une apparence vidée de sens par opposition au fait d’être français, d’appartenir à ce grand peuple. Il y a là un jugement de valeur des plus arbitraires, un jugement dépréciatif catégorique qui n’est pas à la gloire de ceux qui le bourdonnent, et qui montrent toute leur ignorance. Jugement en une formule fière, en un trait assassin, percutant, insolent. Mais au fait, que savent-ils de la Perse ?
III le portrait du satiriste
- Il est un homme intelligent.
- Il est un observateur fin des défauts parisiens, des paradoxes
- Il a de l’humour, sait manier l’ironie, comme à la ligne 10. La mode de se portraits n’a rien d’ « admirable », elle viole son apparence car il n’y a rien de plus intime qu’un portrait ; il s’agit d’une antiphrase qui exprime l’indignation sous le couvert de l’émerveillement.
- Il sait manier la mode du portrait à la la Bruyère avec des effets de chute bien construits, comme la pointe finale.
- Il essaye de comprendre ce qui sort de l’ordinaire par une démarche expérimentale afin de vérifier son hypothèse, il fait un « essai » pour comprendre ce qu’il vaut « réellement »
- Et lucide sur ses faiblesses
- Lui qui a épinglé les trois défauts du microcosme parisien regrette son changement vestimentaire car il est passé du statut de vedette incontournable à l’anonymat, à l’obscurité. Il dit avoir fait l’expérience d’ « un néant affreux »
- Il se montre donc épris de ce regard dont il a eu tant sujet de se plaindre, dépendant de cette notoriété.
- Mais à quoi bon critiquer ce regard parisien, le moquer, si c’est pour finir par dire qu’il est indispensable ? Rica devrait donner l’exemple en de déprenant des charmes de son succès y participer sans avoir envie de changer soi-même, de donner l’exemple. En expliquant qu’il est faible, qu’il le sait, mais en a souverainement besoin, Rica ne peut faire œuvre de moraliste, exhorter au changement. Nous en restons à une satire piquante.
Conclusion
Cette curiosité ne grandit pas son objet, mais le rapetisse, l’aplatit, l’anéantit, victime de préjugés déformants
Lettre XXIV
Même ironie qui affleure dans l’écriture de cet avant-dernier paragraphe. En apparence une louange sans équivoque d’un roi aux pouvoirs surnaturels, en profondeur une analyse lucide et amusée du pouvoir d’illusionnement des Français. Le texte moque la crédulité déconcertante du peuple pris au piège, prisonnier des tours de magie de son roi. La tournure restrictive ne que suggère la faible quantité de moyens mis en œuvre pour obtenir l’adhésion populaire, l’immédiateté de cette soumission totale, aveugle sans la moindre once d’esprit critique, sans la moindre perplexité.
Deux exemples de finances et un de médecine. D’abord la finance. Le roi spécule sur la valeur des actions pour s’enrichir, il opère un miracle de multiplication, et de transmutation de matière vile, le simple « morceau de papier », en métal précieux, « l’argent » à la manière d’un mystérieux alchimiste détenant le secret de la pierre philosophale. Mais ce n’est que virtuel, qu’artifice. « Fiat lux, et lux facta est » dit Dieu dans la Genèse, « Que la lumière soit et la lumière fut ». Le roi prétend être doué du pouvoir de métamorphose, comme si le fait de dire, de « persuader », suffisait à créer de toute pièce, ou à changer l’identité des choses à la manière du verbe divin performatif qui se contente de dire pour que la réalité apparaisse. La médecine maintenant. Il utilise à des fins politiques un supposé pouvoir de thaumaturge, la capacité de guérir miraculeusement par l’imposition des mains, sans aucun médicament, sans thérapie, sans même craindre une contagion. Jésus a guéri un lépreux, un aveugle, a réanimé Lazare et la fille d’un chef de synagogue. Si l’on s’interroge sur la portée ultime de cette satire, Rica ne remet pas en cause ces saintes actions explicitement, mais nous ne sommes pas loin. L’ambiguïté est savoureuse. Tout cela a pour Rica un aspect mythique, archaïque, déraisonnable, hyperbolique, une histoire de sorcier, des contes pour enfants et bonnes femmes. De la superstition en un mot, du psychologique sans aucune correspondance avec la réalité..
Un élément qui passe inaperçu, c’est ce pouvoir sur les « esprits » qui revient deux fois. Il y a reprise d’un motif, de formules associées traditionnellement au diable. C’est le prince des apparences, le Seigneur des illusions, lui qu’invoquent sorciers, alchimistes, pour modifier la réalité. Il peur s’emparer des corps dans les cas de possession, mais jamais des esprits. Ici le roi surpasse Satan en s’emparant des esprits des vivants.
Mais les tours de magie se révèlent pure illusion d’optique. Le magicien se révèle illusionniste et en fait un manipulateur, car les verbes modalisateurs, notamment le verbe « croire » employé avec insistance, montrent, d’après Rica, que tout repose sur des mystifications, des supercheries, des croyances fausses de foules bernées, sous le charme de ce faiseur de miracles se réclamant implicitement d’un autre faiseur de prodiges, Jésus. Rappelons que le roi de France est appelé, entre autres, « lieutenant de Jésus-Christ » sur Terre.
...