Les Fausses Confidences

DISSERTATION/ Fausses Confidences/ ruse bienveillante

(Introduction)

 La ruse est synonyme d’intelligence, mais elle est aussi associée à l’art oratoire, à la capacité de séduire par un discours. D’après Sophie Marchand, la ruse, servant à tromper, est chez Marivaux  « en grande partie altruiste et presque toujours bienveillante ». En effet, dans Les Fausses confidences un valet astucieux, Dubois, met en place un stratagème efficace afin d’aider son maître Dorante à obtenir la main d’Araminte, une riche veuve dont il est tombé amoureux. Nous pouvons ainsi nous interroger sur la problématique suivante : dans quelle mesure le jugement de Sophie Marchand s’applique t’il aux Fausses Confidences ? Nous verrons dans un premier temps que le valet Dubois souhaite le bonheur de son maître, ce qui confirme le jugement de S. Marchand. Dans un second temps, nous étudierons comment Marivaux donne une dimension dramatique à sa pièce pour mieux en faire ressortir la ruse de Dubois. Enfin, nous aborderons la visée altruiste de la ruse de Dubois, confirmant ainsi le jugement de S. Marchand.

(Développement)

1. Le valet Dubois, un fin stratège souhaitant le bonheur de son maître.

1. Une intrigue fondée sur la ruse

•   Dans les Fausses Confidences, tout repose sur le stratagème de Dubois qu’il met en place afin d’aider Dorante.                                             

exemple : I.3, DU promet à DO qu’il mettra tout en œuvre pour qu’A ait des sentiments pour lui : « vous réussirez vous dis-je. Je m’en charge, je le veux, je l’ai mis là. […] je sais votre mérite, je sais mes talents, je vous conduis, et on vous aimera. » . L’omniprésence de la première personne et l’emploi du présent montre la détermination de DU pour ce stratagème.

• Le jeune homme, manquant d’expérience, se laisse guider par son valet machiavélique qui multiplie les fausses confidences, use de mensonges et de paroles séductrices pour attendrir et conquérir Araminte.                                                                                                                Exemple : II.14, DU fait sa première FC à A, en lui apprenant les sentiments de DO pour elle dans le but de la flatter et de faire naître des sentiments en elle : « Ce bon sens, cet esprit jovial, cette humeur charmante ; vous aviez tout expédié. ». Le rythme ternaire énumère ici les qualités de DO que A à emporté avec elle lors de leur première rencontre à l’Opéra. DU  utilise ici cet arguments pour flatter A.

1. Une première application du jugement de S.Marchand :un stratagème à but altruiste                                

• Son but est bien altruiste puisque seul compte le bonheur de son maître. Dubois est en ce sens le digne héritier de l’esclave de l’Antiquité qui intrigue au service de son jeune maître amoureux: tous favorisent l’amour de jeunes gens contre des parents acariâtres et les amoureux sont toujours les bénéficiaires de l’action rusée.                                                       

Exemple : III.1, DU rassure DO sur l’avancée du stratagème, et rappelle que seul son bonheur compte, et qu’il ne doit donc pas s’inquiéter des réactions d’A : « DUBOIS-Ah oui ! je sais bien que vous l’aimez ; c’est à cause de cela que je ne vous écoute pas. Êtes-vous en état de juger de rien ? Allons, allons, vous vous moquez. Laissez faire un homme de sang-froid. ». DU sous-entend ici que l’amour de DO pour A le conduirait à faire échouer le stratagème. L’emploi de l’impératif démontre que DU est sur de lui.

• Dubois passe donc par le stratagème pour réussir l’entreprise amoureuse de son maître. Il n’hésite pas à lui conseiller de séduire Manon afin de rendre Araminte jalouse; à manipuler tout son monde autour du portrait d’Araminte ou de la lettre.                                               Exemple : II.10, DU continue son stratagème et manipule A sur le portrait, invitant celle-ci à garder le portrait avec elle et donc avouer indirectement un certain attachement à ce portrait, et donc à DO : « En arrangeant l’appartement de monsieur Dorante, j’ai vu par hasard un tableau ou madame est peinte, et j’ai cru qu’il fallait l’ôter, qu’il n’avait que faire là, qu’il n’était point décent qu’il y restât. ». Les négations restrictives suggèrent une opposition d’A à son jugement, dans le but de garder le portrait.

1. Une volonté de la part du dramaturge de mettre la ruse en évidence

1. Une dimension dramatique introduite par le dramaturge

•   Marivaux d’ailleurs donne une place plus importante à Dubois qu’à Arlequin dans la pièce, ce qui montre la volonté du dramaturge d’introduire une dimension plus dramatique. Certes c’est Arlequin qui ouvre et ferme la pièce, mais c’est bien Dubois qui mène le jeu et qui fait sans cesse avancer l’action. Arlequin suit la tradition de la Commedia dell’arte, reste bouffon tandis que Dubois, lui, manipule les personnages à sa guise et les transforme en marionnettes.                                                                                                       

Exemple : II.10, confrontation entre DU et AR à propos du portrait d’A : « ARLEQUIN- Ôte-lui quelque autre meuble, s’il y en a trop, mais laisse-lui cette pièce, animal. DUBOIS- Eh moi je te dis qu’on ne la laissera point ; que je la détacherai moi-même, que tu en auras le démenti, et que Madame le voudra ainsi. ». AR n’hésite pas à insulter DU, ce qui rappelle son caractère de bouffon, alors que DU est plus stratège, et insinue qu’A aura le même jugement que lui. A travers le personnage de Dubois se lit donc la préférence de Marivaux pour un valet d’intrigue capable de ruser.