Montrer ce qui, dans cette scène, a pu choquer les contemporains de Hugo

Analyse de la scène 2 de l’acte IV, v. 1568-1656

☛ Montrer ce qui, dans cette scène, a pu choquer les contemporains de Hugo

I. Un personnage picaresque

a. Don César : un véritable comédien

• Vers 1575-1596 : il semble s’adresser aux spectateurs, relate ses aventures
• Vers 1597-1604 : il s’adresse à DS : « mon très cher cousin ! »
• Vers 1605-1639 : il parle seul
• Fin de scène : il fait parler les madrilènes en imaginant leurs pensées
• Il est conscient de se mettre en scène, il s’enthousiasme sur le « beau rôle à jouer », son monologue se transforme peu à peu en dialogue

b. Don César : un picaro

• Le récit de se aventures permet au spectateur de sortir du cadre spatio-temporel étroit de la pièce
• Voyages exotiques :  « cette femme jaune » , « cette Afrique où l’homme est la souris du tigre » comme le picaro des romans espagnols, Don César a multiplié les aventures, les rencontres.

c. La vie de don César : un roman d’aventures

• Son arrivée par la cheminée pour semer les alguazils n’est que la dernière de nombreuses péripéties.
• Vers 1578-1582 : répétition de conjonction de coordination « et » + phrases nominales montrent l’accumulation rapide des évènements
• Choix présent de l’indicatif pour faits passés donne de la vivacité au texte : « Je saute un mur ; j’avise une maison perdue/Dans les arbres ; j’y cours ; personne ne me voit »

II. Le parti pris du grotesque

a. Le thème de la nourriture

• Images liées à la matière : choix du prosaïque, du bas
• Didascalies décrivent des activités terre à terre
• Abandon de l’intellectuel pour le matériel : compare le garde-manger à une bibliothèque
• Comparaisons de DC très prosaïques : « Dans ce charmant logis on entre par en haut, / Juste comme le vin entre dans les bouteilles »

Le monde matériel et concret s’est imposé.

b. La place de l’argent

• Evocation de ses créanciers : « l’argent [lui] manque », soulève thématiques indignes à la tragédie, qui s’opposent à la gravité des problèmes politiques et la noblesse des sentiments de l’acte 3.
• Scène grotesque : contrepoint au sublime de l’acte 3, pour aborder la société dans son entier et rehausser la grandeur des autres scènes.

c. Don César : un personnage du désordre

• Vocabulaire grossier, familier : « chiens d’alguazils », prononce le « oui dà » des femmes du peuple, mise en péril de la bienséance
• Personnage subversif : échappe à la police et se compare à une « bombe », dérange l’ordre social
• Ordre religieux mis à mal :

• jeu de mots sur « spirituel » et « spiritueux »
• comparaison du buffet avec un « autel »

III. Le mélange des genres et des registres

a. Les références grotesques propices au rire (comédie)

• comique de mots : jurons de DC : « chiens d’alguazils », sacripant » + jeux de mots évoqués avant
• comique de gestes : un jeu de mimes avec didascalies qui décrivent les petits gestes de DC après son arrivée et ses grands gestes quand il découvre la maison
• comique de situation : DC chez DS sans le savoir, tandis qu’il parle de vengeance contre son oncle

b. le rôle des objets et les coïncidences invraisemblables (mélodrame)

• coïncidences invraisemblables : DC trouve refuge précisément chez DS, le jour du piège tendu à la reine, juste après le départ de RB
• les objets permettent de nouer l’intrigue : le manteau que met DC permettra à DS de le faire arrêter à la fin de l’acte

c. Une tension tragique

• spectre de la tragédie grâce à remarques de DC : « maison mystérieuse et propre aux tragédies. / Portes closes, volets barrés, un vrai cachot »
• il se questionne : « Vais-je pas m’effarer et prendre un air funeste / Pour n’avoir jamais vu de maison faite ainsi ? »
• tension tragique désamorcé : « Mais je vais me venger de vous, cousin damné, / Épouvantablement quand j’aurai déjeuné »

Les trois questions de l’examinateur

Question 1. Quelles fonctions don César a-t-il dans la pièce ? Don César apparaît d’abord comme le double de Ruy Blas. Il permet l’échange des rôles qui est au cœur du drame et son caractère romanesque assure un certain nombre de péripéties capables de faire rebondir l’action. En outre, en tant que brigand au cœur pur, il permet de nuancer l’image de la noblesse donnée à travers don Salluste. Enfin, il offre un contrepoint comique au reste des personnages, qui semblent plutôt issus de la tragédie ou du mélodrame.