DissertationsEnLigne.com - Dissertations gratuites, mémoires, discours et notes de recherche
Recherche

La Ville Créative : Marketting Urbain Ou Modèle Économique ?

Dissertation : La Ville Créative : Marketting Urbain Ou Modèle Économique ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires
Page 1 sur 28

ntions urbaines de réhabilitation du paysage urbain et soutien aux industries créatives (Île de Nantes)…

De gauche à droite : Faïna Ramdani (L’Atelier français), Sandrine Gibet, Elsa Vivant et Stéphane Distinguin.

L’objectif de ce nouvel Atelier français consistait, comme à chaque fois, à confronter le regard, les travaux de recherche, les expériences et les aspirations de quatre intervenants. Avec en ligne de mire l’idée que construire la ville créative, c’est réserver dans l’espace urbain des lieux pour l’expérimentation, la rencontre humaine et l’innovation sociale. Une cartographie des lieux créatifs du Grand Paris Avant l’intervention des quatre participants, Marion Sabourdy, rédactrice en chef de Knowtex, a présenté une cartographie participative des lieux créatifs du Grand Paris. Knowtex est une communauté généralement assimilée aux sciences dites « dures » (sciences et techniques). Mais elle s’intéresse aussi à la technologie, au design, à l’art, au numérique, à la médiation… À l’image de l’Atelier français, son objectif est de faciliter la rencontre entre des acteurs et des opérateurs professionnels, d’où la création commune de cette cartographie et la rédaction d’une enquête disponible sur les sites des deux structures. Le but de cette carte, qui se veut participative, est de recenser des lieux créatifs articulés autour de trois thèmes : scientifique, technologique et artistique (un lieu peut cumuler deux ou trois grands thèmes). Il s’agit de montrer la variété des sphères créatives ainsi que la

proximité thématique et culturelle de ces lieux qui s’ignorent parfois alors que leurs objectifs sont très proches. L’idée est évidemment de créer et de faciliter des collaborations. Dix-huit lieux ont été visités et figurent sur la carte. Repérés par un code couleur (bleu pour la science, rose pour la technologie et vert pour l’art), ils sont décrits avec leurs coordonnées, leurs liens vers les réseaux sociaux et vers l’article rédigé par Knowtex/L’Atelier français. Marion Sabourdy a appelé les participants à l’atelier à ajouter des lieux, s’engageant à venir rencontrer leurs animateurs sur place et à rédiger un article.

Elsa Vivant

Maître de conférence à l'Institut français d'urbanisme et auteur de Qu'est ce que la ville créative ? (Puf, 2009)

Elsa Vivant s’est exprimée avec le point de vue d’une urbaniste pour expliquer en quoi la ville créative posait des enjeux nouveaux pour la production de la ville. Cette notion traduit un certain nombre d’évolutions, à la fois sociales et culturelles, mais aussi des modes d’action publique. L’urbaniste a d’abord exprimé quelques réserves quant à la dénomination « ville créative » qui, selon elle, n’est pas « un fait mais un concept abstrait mettant en perspective plusieurs tendances et plusieurs phénomènes qui aboutissent à une nouvelle définition de la culture et de la créativité. » Les industries créatives posent aujourd’hui des enjeux opérationnels aux acteurs de la production de la ville. On connaît désormais le rôle influent que peuvent jouer les artistes dans la découverte et l’animation de lieux ainsi que dans la revalorisation de certains quartiers. L’importance économique du secteur culturel n’est plus à prouver. Qu’est-ce qu’une ville créative pour les urbanistes ? Depuis une trentaine d’années, des transformations sociales et économiques bouleversent les modes d’action urbaine : globalisation des échanges, crise industrielle, révolution numérique, développement des télécommunications et des moyens de transport. Contrairement à ce qu’on imaginait, ceux-ci n’induisent pas une dispersion mais une concentration des activités, en particulier des activités décisionnelles et celles liées aux secteurs innovants, dans les grandes agglomérations. Ce changement coïncide avec l’avènement d’une idéologie néolibérale dans les champs d’action publique. Ces éléments permettent de comprendre comment et pourquoi les villes sont passées d’une logique managériale – on gère les services qu’on rend aux citoyens – à une logique de ville entrepreneuriale. Cette dernière se traduit par des stratégies de développement qui favorisent des projets destinés à attirer des entreprises et de nouveaux habitants. « Certaines villes deviennent les entrepreneuses de leur développement et vont anticiper les demandes du marché, en particulier celles des entreprises, quitte à prendre des risques en lançant des stratégies incertaines dont elles assument les coûts financiers », explique Elsa Vivant. Les éléments connus de ces stratégies sont classiques (création d’infrastructures de transport, défiscalisation, développement des télécommunications…) mais investissent aussi

un champ d’actions urbaines qui vise à l’amélioration du cadre de vie par la requalification des espaces publics et la création de nouvelles aménités urbaines (lieux culturels qui génèreront une nouvelle attractivité touristique…). La notion de ville créative rend compte d’une évolution de ces stratégies d’attractivité. Plutôt que d’attirer des entreprises, il s’agirait d’attirer des individus créatifs. Ce tournant a pour origine les travaux de plusieurs auteurs, très controversés dans les champs académiques mais qui ont du succès dans les champs opérationnels. Selon eux, ce sont les qualités créatives d’une ville qui attireraient la classe créative. Or pour les industries « créatives », la ressource essentielle est humaine : leurs productions trouvent leur source dans la créativité des talents qui y participent. Le développement des industries créatives Une autre dimension des politiques de développement mises en œuvre pour accéder au rang de « ville créative » consiste à réorienter sa stratégie de développement économique autour d’une stratégie de développement des industries créatives. Pour Elsa Vivant, la notion d’industrie créative est une construction politique. L’idée a émergé à la fin des années 1990 au sein du DCMS (Département pour la culture, les médias et le sport) du gouvernement de Tony Blair. Autour de l’appellation « industries créatives » s’agrègent plusieurs secteurs d’activités plus ou moins liés aux industries culturelles classiques, qui vont mettre en évidence le poids de ce secteur dans l’activité économique britannique. La Grande-Bretagne sera pionnière pour répondre aux demandes des industriels de ces secteurs émergents, en particulier celles qui concernent les règlementations en matière de droits d’auteur et de propriété intellectuelle. Les villes vont alors développer une nouvelle branche de leur stratégie économique à destination des industries créatives en s’inspirant des travaux d’économie régionale menés sur les secteurs créatifs et les milieux innovants, par exemple ceux de la Silicon Valley. Ces derniers mettent en évidence que dans les secteurs d’activités où la relation de face à face est fondamentale dans la production d’idées nouvelles, le territoire est le support de l’organisation de cette production. « C’est sur ce territoire, poursuit Elsa Vivant, que vont s’organiser les échanges entre une multitude d’acteurs, d’entreprises, qui sont autant de prestataires, de donneurs d’ordre, de sous-traitants. Ce territoire va accueillir une main d’œuvre qualifiée au sein de laquelle les industries viendront chercher les compétences dont elles ont besoin. C’est aussi cet espace qui va permettre la diffusion de l’information. » Un secteur fragile Dressant ce constat, Elsa Vivant soulève un certain nombre de points critiques qui pénètrent aujourd’hui le champ de réflexion des urbanistes. Ces stratégies d’attractivité sont porteuses de contradictions au regard du fonctionnement même des industries créatives : l’effet de valorisation foncière induit par ces politiques peut aller à l’encontre des intérêts des acteurs et des travailleurs créatifs. L’activité du secteur créatif s’organise généralement par projets, ce qui a pour corolaire une fragilisation des statuts professionnels et une généralisation des formes d’emplois atypiques (auto-emploi, auto-entreprise, freelance, rémunération par droits d’auteur, exercice en

libéral…). Ces statuts individualisent le rapport au travail et conduisent à un isolement des travailleurs, qu’ils soient entrepreneurs individuels ou intermittents. Elsa Vivant souligne également le fait que les secteurs créatifs sont fortement discriminants. Les modes d’accès au travail par le biais de la commande requièrent la mobilisation de réseaux et une flexibilité dans les horaires de travail. Ils génèrent des incertitudes sur les revenus qui ne sont pas tenables pour des individus ayant de fortes contraintes personnelles, en particulier pour les parents isolés qui sont généralement des femmes. De nouveaux enjeux pour les urbanistes Les particularismes des industries créatives posent ainsi plusieurs enjeux aux urbanistes. Première question : quelle offre immobilière proposer à ces activités individuelles, qui s’organisent par projets, avec des équipes de taille variable, et qui s’adressent à des travailleurs mobiles ayant tout de même besoin d’un espace de travail fixe ? Les acteurs euxmêmes proposent des solutions innovantes, parmi lesquelles le coworking space (partage d’espaces de travail). « Mais pour les opérateurs d’immobilier de bureau et d’activités, cette logique est

...

Télécharger au format  txt (46.2 Kb)   pdf (316.8 Kb)   docx (22.7 Kb)  
Voir 27 pages de plus »
Uniquement disponible sur DissertationsEnLigne.com