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Les séries TV

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Par   •  8 Mars 2022  •  Dissertation  •  3 118 Mots (13 Pages)  •  849 Vues

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L’invention de la télévision va bousculer la vie quotidienne d’un bon nombre de foyers. Ce nouveau support de communication occupe progressivement une place centrale à la fois dans le domaine de l'information, des loisirs et de l'éducation. En effet, c'est l'activité de loisir qui occupe le plus de temps dans la vie de la grande majorité des Français.

Les séries télévisées ont été présentes très tôt dans les grilles de la télévision française et réalisent de très bons scores d’audience en France depuis les années 70.

Aujourd'hui et depuis les années 2000, les séries sont programmée en prime time, alors qu'elle était réservée avant plutôt aux horaires de l'après-midi et de la première partie de soirée. La série télévisée est ainsi devenue une nouvelle forme de spectacle grand public. On y retrouve une communication expressive qui permet d'extérioriser un sentiment, une manière de voir le monde. C’est le genre de communication le plus propre à l’individu puisqu’elle permet de communiquer une manière subjective de voir quelque chose qui existe réellement ou qui est pure invention. Donc le rôle de l’imagination, de l’émotion et de la subjectivité y est important.

Les séries, du fait de leur popularité et de leur exportation mondiale, ont donné lieu à beaucoup d’enquêtes qui montrent à la fois la pluralité des réceptions et leur enracinement social. Elles appartiennent aussi au domaine de la culture, et cette notion de culture a suscité de nombreux débats entre œuvres « légitimes », consacrées et entre œuvres de la « culture de masse » produites par les « industries culturelles ».

Un autre débat originel sur la culture est aussi présent, à savoir si elle est pensée comme instrument de réorganisation d’une société ou comme ciment d’une conscience nationale.

Nous allons donc chercher à savoir si les séries TV ont réellement un impact sur leur public et si tel est le cas, l’impact serait-il vecteur d’émancipation ou d’aliénation de ce public.


  1. « Un média fort, un public faible »
  1. Une influence forte et inéluctable sur les publics

La spécificité des premiers courants d'enquêtes empiriques c’est d'avoir pensé la question de l'influence sociale et politique des médias sur leur public par rapport à un effet à court terme. L’influence médiatique est donc pensée sous le prisme du schéma canonique de la communication : Des émetteurs veulent atteindre des récepteurs en vue de leur faire adopter leur point de vue, c’est donc un schéma fort simplifié.

Il ne faut pas oublier que l’on est dans le contexte de l’entre-deux guerres, l'environnement intellectuel et social de cette période se caractérise à la fois par une fascination pour les médias de masse émergents et par une crainte de leurs effets, spécialement en matière de propagande. Walter Lippmann[1] assimile le public des médias à une foule que Gustave La Bon[2] avait définie comme étant sujette à toute forme de manipulation, hypnotisable, crédule et vulnérable des années auparavant.

On voit alors que l’on part déjà sur un postulat où le media influence la foule et en plus une thèse de l'influence significative des médias et confirmée (Payne Fund Studies, 1920 - 1930).

De là, ce développe alors un courant de pensée fondé sur les idées de manipulation, d'influence et d’assujettissement. On voit donc émerger le paradigme des effets puissants et illimité des médias, incarné par la Théorie de la seringue hypodermiques de Lasswell[3] en 1948 (Université de Chicago). Il confirme la thèse des Payne Fund Studies avec les capacités d'influence importante des médias auprès d'individus conditionnés et passifs, dont les comportements et les réactions, en réponse à des stimuli, serait de l'ordre du réflexe ou de l'inconscient. Ainsi les médias injecteraient des messages à leur récepteur comme une piqûre.

  • Raisonnement encore trop simpliste

En parallèle, dans l’école de Francfort :

La culture de masse participerait à une liquidation progressive de l'autonomie de l’individu.

Pour Horkheimer[4] et Adorno[5] c’est un objet de manipulation, un bien culturel qui serait imposée d'en haut par un système industriel où on retrouve la logique de la consommation et du profit

Pour Dwight McDonald[6], la culture de masse entraînerait une homogénéisation des contenus et les individus deviennent alors incapables de porter des jugements critiques. A moyen terme les industries culturelles participeraient à un abaissement du niveau des exigences esthétiques et éducationnelles par la consommation des masses laborieuses qui, à la recherche de distraction et de divertissement facile trouveraient refuge dans la consommation offerte par les médias. En accord avec Günther Anders[7], il explique que les médias augmenteraient cette tendance à l'aliénation culturelle.

James Curran[8] : Reprend une thèse de David Morley[9] mais lui explique qu’il est faux de croire que le public pourrait interpréter de manière autonome les messages des médias. Il existe un « fil dénotatif » (un élément non subjectif) qui parcourt le texte médiatique et impose des scénarios d’interprétation. Dans ce sens, la télévision produirait une perte du questionnement intellectuel ou de la simple capacité à fixer son attention et à produire des raisonnements construits et argumentés. Elle ferait la promotion d'une culture de la passivité et du consumérisme.

Beaucoup plus tard, en 2003 on assiste encore à ce genre de pensée puisque Jean Léon Beauvois[10] désigne les médias comme une « propagande glauque » : « Force est de constater que la télévision est aujourd’hui un système à ce point puissant que son emprise sur la plupart des individus dépasse celles d'autres systèmes d'emprise comme la religion »

  1. Une vitrine de la normalité (adhérer à une culture)

Brigitte Le Grignou[11] et Erik Neveu[12] reprennent le paradigme de la lettre volée où Edgar Poe raconte la ruse du détenteur d'une lettre compromettante qui, la met bien en évidence dans son bureau, en ayant griffonné quelques mots pour simuler un brouillon. Cherchant un objet caché, les policiers ne trouvent pas la lettre pourtant offerte à leur vue. Il en est de même de certains effets de la télévision, tels que de produire une connaissance d'un ensemble de personnage, de paysage… Le but est d'exhiber une vitrine des normalités. Si certaines séries américaines contemporaines, font désormais une place à la mise en récit des problématiques de la vie sociale, la tendance dominante est de valoriser les styles de vie dits normaux ou légitime.

Ien Ang[13] (1990) : « Les « européistes » ont démontré une préoccupation obsessionnelle vis-à-vis de la supposée menace de « l’américanisation » culturelle comme conséquence de la transnationalisation du système des médias. Cette posture occulte une évidence : le fait que les symboles culturels américains sont devenus partie intégrante de la façon dont des millions d’Européens construisent leur identité culturelle … l’hégémonie bien réelle de l’Amérique dans le domaine de la production et distribution culturelles »

  • Cette citation nous fait donc penser au Soft Power américain, établissant leur culture et leur façon de vivre comme normal aux vues du grand nombre de séries le reprenant.
  • Diverses recherches conduites en Inde (Mankekar, 1999) montre par exemple combien les programmes de télévision influencent le développement de consommation (aliments préparés, vêtements) perçus comme des marqueurs de modernité occidentale et d'appartenance aux classes moyennes
  • Une recherche au Japon (Saitto, 2007) montre entre autres que les séries américaines entretiennent les stéréotypes de genre

  1. « Un média faible, un public fort »
  1. L’école de Columbia, Two Step Flow of Communication et Uses and Gratifications

Pour Paul Lazarsfeld[14] et Robert K. Merton[15] « la transmission des communications de masse pouvait être moins direct qu'on ne l'a supposé généralement ». En effet, ils pensent que les médias exercent une influence limitée puisque ce sont les relations interpersonnelles qui auraient une importance significative dans les changements d’opinion.

  • Veulent démontrer que les médias n’ont pas l’efficacité suffisante pour modifier significativement, à eux seuls, les comportements des publics.
  • Ils agiraient plutôt dans le renforcement que dans le changement des facteurs déjà existants

Elihu Katz[16] (son mentor est Lazarsfeld, reprend la théorie two step flow of communication) : « l’influence personnel était à la fois plus fréquente et plus efficace que celle des mass média » et qu’il existe des leaders d'opinion qui jouent un rôle important dans la transmission de l'information au sein d'un groupe social

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