Semiologie Du Tableau
Recherche de Documents : Semiologie Du Tableau. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresavoir s'il doit exécuter ou laisser la vie sauve au gladiateur vaincu.
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R. Delord – Latine Loquere
- Le peuple, représenté à l'arrière plan, est flou. Il semble légèrement penché à l'avant, comme attentif au sort qui va être réservé au gladiateur vaincu, mais il est impossible de dire plus précisément quelle est son attitude. => ??? Nous tenterons donc de voir en quoi la représentation de ce combat de gladiateurs par JeanLéon Gérôme respecte ou s'écarte des données historiques et archéologiques ??? II. Composition 1°) Horizontales et verticales - On peut généralement diviser un tableau classique selon un quadrillage de trois cases en hauteur sur trois cases en largeur. Cela fonctionne assez bien avec notre tableau (image 01) ; on notera que la ligne marquée par le haut du mur des gradins crée une ligne diagonale dynamique qui monte de gauche à droite, épouse le champ de vision du gladiateur victorieux, et attire l'attention du spectateur sur les femmes voilées. 1 : le peuple dans les gradins 2 : la loge impériale 3 : la tribune des femmes voilées de blanc 4 : architecture et bas-relief 5 : le gladiateur Thrace victorieux 6 : les tentures de la tribune des femmes (prédominance de la tenture au chardon) 7 : un gladiateur mort en arrière plan, la tête d'un Thrace mort au premier plan 8 : le rétiaire vaincu demandant grâce au public 9 : l'arène (arena : « sable », en latin) - Ce découpage du tableau en colonnes nous montre où se situe le centre d'intérêt du tableau. En effet, autant la suppression de la colonne de gauche ne porte pas à conséquence (image 03), autant celle de la colonne de droite rend incompréhensible l'action représentée et son enjeu dramatique (image 04). 2°) Découpage par le milieu - Un découpage du tableau par le milieu est également pertinent puisqu'il met en lumière quatre zones (image 02) : 1 : la tribune impériale et le casque du gladiateur victorieux 2 : la tribune des femmes voilées et la tenture au motif végétal 3 : les gladiateurs vaincus 4 : l'arène (arena : « sable », en latin) 3°) Les diagonales - Nous nous sommes contentés, pour l'analyse de ce tableau, de tracer trois diagonales assez révélatrice (image 10). - La première (diagonale bleue sur nos images) suit la pente de la tribune des femmes voilées, descend vers la gauche en passant par le sommet du casque du gladiateur victorieux, puis l'angle d'un élément architectural en forme d'autel, accolé à la gauche de l'avancée de la tribune impériale. - La seconde (diagonale rose) passe à la fois par le bras du gladiateur vaincu et suppliant qu'on
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l'épargne et par celui de la troisième femme voilée, celle qui semble la plus penchée vers l'avant pour réclamer la mort du gladiateur terrassé. - La troisième (diagonale verte) est marquée par l'aile du premier aigle impérial, passe par la personne de l'empereur, l'angle de la tenture rouge, le cimier du casque du gladiateur vainqueur. Elle suit le prolongement de la cuisse de ce dernier et termine sa course en passant par l'épaule du gladiateur vaincu. - Ces trois lignes de force marquent encore un peu plus la distinction entre la gauche et la droite du tableau et présentent surtout deux gladiateurs, l'un vainqueur, l'autre vaincu, qui semblent plus s'adresser aux jeunes femmes voilées de blanc qu'à l'empereur. III. Lumière (image 05) - On devine grâce aux rais de lumière la présence d'un velum tiré sur les gradins de l'amphithéâtre afin de protéger les spectateurs du soleil. Il est légitime, de ce fait, de se demander si nous n'assistons pas aux fameux jeux de midi, jeux les plus cruels, d'après les auteurs latins qui en ont été les témoins et qui avaient lieu à l'heure où le soleil, à son zénith, rendait nécessaire le déploiement du velum. Le goût du sensationnel de Gérome et des peintres pompiers en général, s'y prêterait assez bien. Les rais de lumière horizontaux convergent vers le centre de l'arène et attirent notre attention sur le groupe des gladiateurs. Les rais de lumière verticaux remontent de manière évidente vers les trois femmes voilées qui paraissent les plus véhémentes. - Les reflets du soleil sur les éléments métalliques (casques, manique, effigies) attirent également notre regard. IV. Couleurs - Le rouge et ses nuances, très présent dans le tableau, est à la fois le symbole du pouvoir et de la violence, de la pourpre (étoffe très onéreuse réservée aux fonctions les plus élevées de l'état) et du sang versé par les gladiateurs dans l'arène (image 06). - L'architecture de l'amphithéâtre adopte quant à elle des couleurs sombres (noir, gris, bordeaux). Deux raisons à cela : l'une pratique car ces couleurs sombres servent de fond à l'action, l'autre symbolique car l'amphithéâtre est un lieu sombre, sinistre, un lieu de mort (image 07). - Les tons clairs du tableau font ressortir trois zones importantes du tableau, de gauche à droite : le peuple, le groupe de gladiateurs et le groupe de femme voilées de blanc (image 08). - A la dorure des effigies de l'empereur, des aigles et du fauteuil impériaux répond le bronze des casques des gladiateurs au premier plan (image 09). V. Interprétation des symboles 1°) L'aigle noir - On peut voir dans l'aigle noir figurant sur la tenture rouge de la tribune impériale un symbole de mort. Par sa couleur et avec ses ailes rabattues, il est en effet en opposition avec les aigles dorés aux ailes déployées perchés au sommet des colonnes de marbre rouge et symbolisant le pouvoir impérial. 2°) L'ombre d'un empereur - L'empereur est représenté minuscule et de façon très sommaire (couleurs sombres et traits du
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visages grossiers ; seule la couronne de laurier est vraiment reconnaissable) contrairement à l'usage courant qui veut que l'on représente toujours les personnages importants démesurément grands. L'empereur peint par Gérome est un empereur qui n'a pas encore fait son choix, indécis, faible. 3°) L'homme en noir et les femmes en blanc - Un personnage discret semble se cacher dans un recoin sombre de l'amphithéâtre, dans l'angle du muret qui sépare la loge impériale de la tribune des femmes en blanc. Cet homme a son importance puisqu'il nous confirme l'identité des femmes en blanc qu'il accompagne. - Nous sommes donc en présence de toute la troupe des Vestales (6 au total), prêtresses qui bénéficiaient d'honneurs importants (amplissimi honores), de sorte qu'à la fin de la République romaine, elles étaient précédées d'un licteur pendant leurs déplacements. - Personnes sacrées, les Vestales sont intouchables, et nul ne peut leur interdire d'aller où bon leur semble. Dans son Contre Symmaque, le polémiste chrétien Prudence met en doute la pureté des mœurs des Vestales et prétend qu'elles assistaient même aux jeux de l'amphithéâtre. - Même si l'on admet qu'il était possible de croiser les Vestales dans un amphithéâtre, les représenter, comme le fait Gérome, en furie et réclamant à tous cris l'exécution d'un malheureux gladiateur à terre relève d'une recherche du sensationnalisme. La réalité était toute autre et leur intervention toujours miséricordieuse. - Enfin, même si la liberté des Vestales était grande, il semble étonnant – aucun texte n'en fait mention - que des femmes, toutes prêtresses de Vesta qu'elles soient, occupent le premier niveau des gradins normalement réservé aux sénateurs (image 12). Sous le règne de Domitien on fit d'ailleurs ajouter un autre niveau, le maenianum secundum in ligneis, (« deuxième étage en bois ») au sommet du Colisée qui consistait en une galerie destinée aux pauvres, aux esclaves et aux femmes, avec des places debout ou aménagées succinctement sur des tribunes de bois en pente très raide. Là encore, il y a chez Gérome une volonté de choquer, de frapper les esprits. 4°) Le motif du chardon ? - Un autre symbole attire notre regard sur la partie droite du tableau. Nous sommes d'ailleurs guidés vers cette zone à la fois par le regard du gladiateur vainqueur et par le mouvement circulaire
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