Laforgue, Rêve De Far-West.
Documents Gratuits : Laforgue, Rêve De Far-West.. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresol, de surcroît ! ). La forgue se laisse prendre à la griserie de son imagination, il rêve d'un pays neuf, riche de tous les possibles ; l'ivresse du départ se nourrit de réminiscences empruntées à la poésie baudelairienne et symboliste ( on songe à Brise marine, de Mallarmé, « Fuir ! Là-bas, fuir ! », et, bien évidemment, à l'Invitation au voyage de Baudelaire « Songe à la douceur // D'aller là-bas vivre ensemble » ) ; l'adverbe de lieu, par son imprécision même, est chargé de mystère, de rêve et d'espoir ; la quadruple répétition traduit l'impatience, et l'attente d'un monde plus beau.
Le pays des merveilles :
Le rêve de départ se double de celui d'un retour de l'homme à une vie naturelle, fruste et simple sans doute, mais saine ( « colon vague et pur », « chasseur, pêcheur », « des prairies pour lit » ). A la suite de Rousseau, Laforgue se met à rêver à l'existence d'un homme libéré des contraintes de la civilisation, et vivant en accord avec la nature. Ainsi s'expliquent le choix d'espaces immenses, les « Prairies », à la mesure du rêve qui peut s'y déployer, et l'emploi du futur, expression parfaite du rêve qui se construit.
La dialectique du rêve et de la réalité :
Au fur et à mesure que l'on s'avance dans le texte, le rêve s'oblitère au profit de la réalité : on passe ainsi de « là-bas // on m'a dit » à « ce soir // la ferme » ; le rêve est devenu réalité, il s'est concrétisé.
II / Une épopée moderne :
La localisation géographique :
Le nom mythique est prononcé : « Far-West », à lui seul, il évoque un pays lointain et fabuleux ; Laforgue insiste sur l'immensité du territoire ( « les Prairies », « entre la mer et les états mormons » ; les pluriels contribuent à souligner cette impression ) ; le décor est celui que retiendra plus tard le western, avec son paysage obligé ( prairie, ferme, montagnes … ).
L'omniprésence de l'action :
Comme dans l'épopée, l'action rythme le texte ; il n'y a pas de temps mort, de vide ( « aujourd'hui … ce soir … demain la refuite». L'impression est celle d'un personnage vivant à toute vitesse ( le rythme des vers le souligne ) et dont la vie déborde d'événements et de péripéties dignes d'un héros d'épopée ( « chevauchées // rixes // beuveries // jeu ».
Un cadre merveilleux :
La rudesse de la vie est corrigée par la beauté de la nature : Laforgue insiste sur sa douceur ( « des prairies pour lit » ), sur sa luminosité limpide ( « soleil levant » : tout dit le commencement ), sur sa somptuosité ( « corbeilles de mariage » ), sur sa beauté intacte ( « ciels des premiers âges » ; l'emploi du pluriel de ciel réservé aux tableaux souligne la dimension esthétique de ces paysage ; la nature est aussi belle qu'aux premiers jours de la Création ).
Une Odyssée moderne :
Tout comme Ulysse, le héros connaît l'errance, la fuite, l'aventure ( « citoyen du hasard »), puis, sur sa vieillesse, la paix et le repos ( « la ferme » et « des petits enfants » ) ; la vie de famille et la stabilité succèdent à la vie nomade et asociale des premiers vers.
III / Un poème de la rupture :
Avec les modes de vie du Vieux monde :
L'opposition est radicale entre le neuf et le vieux, la liberté et la contrainte, la culture et la nature. Ainsi s'explique le choix d'un mode de vie le plus radicalement opposé à la vie réglée de l'Europe : Laforgue s'imagine en hors-la-loi, en homme « sans foi ni loi », qui n'obéit à rien d'autre qu'à son goût de la liberté.
L'univers auquel rêve Laforgue se définit par le refus des contraintes, de tout ordre :
contraintes morales ( « gars de proie », l'image fait penser à l'oiseau de proie // « au-dessus des Pandectes », le terme évoque à lui seul toute la lourdeur des recueils justiniens de lois ) ;
contraintes intellectuelles : « sifflant l'argot » // « sans littérature » ;
contraintes vestimentaires : « vêtu de cuir », et non selon le code bourgeois en vigueur ;
contraintes sociologiques : « de bivouac en bivouac » : c'est presque un éloge du nomadisme, de l'errance, conçus en Europe comme un déclassement ; sans doute aussi Laforgue se souvient-il de ce thème, récurrent chez Rimbaud, qui associe souvent errance, liberté, rupture avec les conventions sociales et poésie.
Avec les formes traditionnelles poétiques :
L'alexandrin, vers de la tragédie, se trouve désarticulé par une ponctuation très forte, qui en
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