Patrick Dils
Commentaires Composés : Patrick Dils. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresure et des peines ou traitements dégradants. Il est composé d’experts indépendants élus par le comité des ministres du Conseil de l’Europe. Ses membres ont le droit de visiter les lieux de détention et d’enfermement. Un Guantanamo ne serait pas possible chez nous.
Ce sont donc les prisons qui sont concernées ?
Oui mais pas seulement. Nous nous intéressons aussi aux commissariats, aux conditions de garde à vue, aux centres de rétention des étrangers, aux hôpitaux psychiatriques ou aux établissements où des enfants sont placés par souci d’encadrement.
Vous définissez deux grands problèmes dans l’Europe d’aujourd’hui. Quels sont-ils ?
La privation de liberté infligée aux migrants interceptés aux frontières, d’une part. Dans certains pays, la privation de liberté peut aller jusqu’à dix-huit mois, non pas pour un délit mais pour être en situation irrégulière. Il s’agit d’un domaine d’action prioritaire pour le CPT. Autre problème : l’impunité dont bénéficient parfois les personnes responsables de mauvais traitements. Déjà à l’ordre du jour il y a 15 ans, il le sera sans doute toujours mais il faut noter que nous recevons de plus en plus d’informations venant de membres de forces de l’ordre qui ne veulent pas être complices.
Quelle est votre marge de manœuvre dans ces cas-là ?
Nous adressons un message aux autorités. S’il reste lettre morte, il nous reste le recours de la déclaration officielle.
Vous visitez des prisons depuis trente ans. Quel regard portez-vous sur elles ?
Leur surpeuplement - problème de nombreux pays européens - interroge notre culture. Que signifie une peine privative de la liberté ? En quoi est-elle utile ? Pourquoi nos sociétés réclament-elles "de la prison" alors qu’il s’agit d’outils très onéreux qui, s’ils ne disposent pas des ressources nécessaires, peuvent générer des situations non respectueuses des droits fondamentaux. Ne pourrait-on prévoir des peines autres que l’écartement de la société pendant un temps plus ou moins long ?
Au rang de ces peines alternatives, on trouve le débat français sur celles à appliquer aux délinquants sexuels…
Oui et en la matière, certains articles que j'ai lus dans la presse attribuant à la garde des sceaux Michèle Alliot-Marie des propos où elle envisage la castration physique sont difficiles à comprendre pour moi. Ce traitement est inacceptable pour le CPT. Il existe en République tchèque au prétexte qu’il est "demandé par la personne". Mais quelle est la liberté de choix quand la seule alternative est la prison à perpétuité ? Notre axiome est que l’intégrité physique ne peut jamais être mise en cause. La castration chimique résulte d’un traitement pharmacologique réversible, nous pouvons l’examiner mais un traitement psychologique ou psychiatrique peut s’avérer plus efficace.
La lutte contre la torture est-elle toujours d’actualité en Europe ?
Elle se définit sur la base de l’intention d’infliger la souffrance physique ou psychologique dans un but déterminé et reste un problème dans de nombreux pays. Après les attentats de New-York, Madrid et Londres, nous avons constaté une tentation de faire primer la volonté d’obtenir une information sur les droits de la personne. Cette tendance retombe mais il reste que les agendas électoraux privilégient les questions sécuritaires sur celles de l’économie, de la santé etc. Cela crée un climat qui, de manière générale, n’est pas propice aux droits fondamentaux.
Les hôpitaux psychiatriques sont aussi des “lieux à risques” ?
Certainement, mais là aussi - comme pour les prisons - on pense que l’écartement de la société est la seule solution. Or, il existe des alternatives. L’Italie a lancé des expérimentations dès les années 80’. Malheureusement, celles-ci ne sont pas connues et ne sont pas très soutenues par la politique actuelle de mon pays.
Selon vous, décès et suicides en prison sont un signal d’alarme…
Oui. Le signe d’un surpeuplement, d’un manque de moyens. Leurs effets cumulés peuvent déboucher sur des situations graves. Le suicide de détenus frappe de nombreux pays européens.
La formation du personnel est essentielle. Nous insistons sur cet aspect car il n’est pas encore partie prenante de "la culture de la prison" en Europe.
Même si le monde de l’entreprise n’appartient pas à votre champ d’action, considérez-vous qu’une vague de suicides comme celle qui frappe France Télécom est également un signal ?
Cela paraît alarmant.
Quel est aujourd’hui l’emploi du temps de Patrick Dils ?
- Patrick Dils. C’est une vie assez banale. Le matin, je pars à pied au travail. Cela représente 3,5 km de marche, qu’il pleuve, qu’il vente. Le travail me convient bien. L’usine où je suis employé fabrique des casseroles de luxe, c’est une entreprise à taille humaine. Je suis à l’expédition. On envoie dans le monde entier. Je rentre en voiture avec une collègue. Mais souvent ma journée n’est pas finie. Je dois m’occuper de mes nombreuses conférences à travers la France pour parler de mon expérience. Je suis donc souvent sur la route le week-end. Et quand ce n’est pas le cas, je vais voir mes parents à Montigny-lès-Metz.
En plus de tout cela, vous venez de créer Louve, une association...
C’est un projet très ancien, j’y pensais déjà en prison, il y a plus de dix ans. L’association a été créée avec deux amis, Laurent Bouquin et Sophie Auger, je suis le président de Louve qui veut dire Livre ouvert d’une vie d’enfant*. L’idée est d’aider des enfants qui ont des difficultés scolaires en finançant, par exemple, des cours particuliers mais aussi, pourquoi pas, une aide à la cantine. Aider un enfant à grandir, c’est pour moi ce qu’il y a de plus beau.
Est-ce que ce choix découle de votre expérience personnelle ?
C’est un projet qui me tient à coeur. Mon parcours scolaire n’était pas très bon, je crois que j’ai redoublé deux fois, et pourtant j’aimais l’école. Mais j’étais très introverti, j’ai connu les quolibets des autres enfants, j’étais montré du doigt. J’aurais aimé qu’une voix extérieure dise « stop » et mette en route le petit déclic qui fait que parfois un enfant travaille mieux en classe. Pour l’association, j’ai pris conseil auprès de ma compagne qui travaille dans une ONG en Afrique. Louve compte une vingtaine d’adhérents, mais on veut grandir avec la bonne volonté de tous, un peu comme Coluche l’a fait avec les Restos du coeur.
« Il y a des choses qui ne se réparent pas »
Avec les indemnités reçues à l’issue de votre procès, vous auriez pu vivre de longues années sans travailler, y avez-vous pensé ? J’ai reçu près d’un million d’euros ; 300 000 € ont été vers mes avocats et pour mes parents. J’ai eu 700 000 €, bien sûr ça m’a aidé, par exemple pour l’achat de cette maison. Mais la dernière chose à faire aurait été de ne pas travailler et de se contenter de cet argent. Si j’avais fait ça, c’est sûr, je serais clochard aujourd’hui. Je tiens à dire que j’échangerais bien volontiers tout cet argent contre les quinze ans de prison que j’ai vécus. Il y a des choses qui ne se réparent pas.
Etes-vous un homme heureux ?
Tous les matins, dès que je mets le pied par terre, je me dis que je suis heureux et libre. J’adore la vie. Je suis sans haine, sans rancune et ouvert sur les autres. Ce qui m’arrive aujourd’hui, c’est une revanche sur la vie. Le Patrick d’aujourd’hui, c’est celui qui a toujours existé.
La peine de mort.
La peine de mort ou peine capitale est une peine prévue par la loi consistant à exécuter une personne ayant été reconnue coupable d'une faute qualifiée de « crime capital ». La sentence est prononcée par l'institution judiciaire à l'issue d'un procès. En l'absence d'un procès, ou dans les cas où celui-ci n'est pas réalisé par une institution reconnue, on parle d'exécution sommaire, d'acte de vengeance ou de justice privée. La peine de mort est diversement considérée selon les époques et les régions géographiques. À l'origine peine très fortement développée à travers le monde, elle a été déconsidérée à l'époque des Lumières. Fortement en recul dans la deuxième moitié du XXe siècle, elle est actuellement dans une situation incertaine.
Elle est prévue dans les textes de loi de presque cent pays, mais seuls vingt et un pays ont procédé à des exécutions en 2010. Elle est une sanction reconnue bien que désapprouvée par les institutions internationales comme l'Organisation des Nations unies (ONU). Les États abolitionnistes sont aujourd'hui majoritaires, mais ils ne représentent encore qu'une minorité de la population mondiale.
Au niveau mondial, le 18 décembre 2007, l’Assemblée générale de l'ONU a adopté la résolution 62/1493 appelant à un moratoire sur les exécutions. Cette résolution (comme les autres résolutions de l'ONU)
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