Commentaire composé sur la mort du Loup de Vigny
Rapports de Stage : Commentaire composé sur la mort du Loup de Vigny. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires(v.5), « ne pas desserrer » (v.7), « traverser » (v.8), « se croiser » (v.10), « rouler » (v.12) «quitter » (v.13) et « clouer » (v.15). Entre les vers 4 et 12, la violence de la bataille est suggérée par de fréquentes allitérations en [k], [p] et [r]. Le lecteur se figure ainsi le cliquetis des armes usités. Il n’est en effet question que de « coups de feu » (v.8), de « couteaux » (deux occurrences : v.9 et 14) et de « fusils » (v.16).
Dans les vingt premiers vers du poème, les chasseurs ne sont curieusement désignés que par métonymie. Les hommes se réduisent à leurs armes parce qu’ils se comportent en machines à tuer. Leur agressivité et leur violence sont figurées par l’usage du pluriel, la diversité de leurs armes et leurs caractéristiques. Il s’agit, entre autres, de « couteaux » dont le caractère nocif est souligné par l’épithète « aigus » et la comparaison avec les « tenailles » (v.9), tord boyaux moyenâgeux. Rien d’étonnant en cela puisque, dès le vers 4, leur acharnement dans la traque du Loup est traduit par le recours au pléonasme « sa retraite coupée et tous ses chemins pris ». En révélant le plaisir cruel que leur procure la curée, le comportement des hommes machines trahit leur inhumanité et leur bassesse. A l’inverse, le Loup est présenté comme un héros. Le récit mimétique s’attarde sur ses moindres faits et gestes, comme pour mieux souligner sa supériorité. Le Loup est décrit comme une force de la nature : « sa gueule brûlante » (v.5) et « ses mâchoires de fer » (v.7) connotent sa puissance. Loin de se dérober, il se lance dans le combat, seul ; il s’acharne à rester debout, malgré ses multiples blessures ; il triomphe de son adversaire, le « chien le plus hardi» (v.6), avant de « mourir le plus haut possible » (Malraux). L’opposition stéréotypée entre un héros magnifié et des scélérats dépréciés confirment ainsi le registre épique de la première strophe.
Transition : Quoique le texte de Vigny comporte des caractéristiques du récit, il affirme son appartenance à la poésie de maintes manières.
2. Un poème élégiaque
A partir de la seconde strophe, la modification de la focalisation marque le passage du récit à la contemplation poétique. Ce n’est plus surtout par sa forme versifiée et les jeux sonores qu’elle autorise que « La mort du Loup » se présente comme un poème.
C’est aussi par son registre dont le lyrisme confine à l’élégie. L’intériorisation du point de vue est révélée par les multiples occurrences du « je » (vers 21, 24, 33, 34, 39, 44) et de ses dérivés : « mon » (v.2), « me » (v.22) et « moi » (v.48). Le poète se dissocie de la cohorte des chasseurs dont il faisait parti pour exprimer, entre autres, ses sentiments. Les multiples exclamations qui ponctuent les lamentations qu’il égrène dans sa dernière strophe traduisent l’intensité de l’émotion provoquée par la curée du Loup. Le poète est envahi par la « honte » et le regret : le recours aux interjections « hélas » (v.33) et « ah » (v.39) ne laissent aucun doute sur ce sujet.
Transition : Le poète ne s’en tient pas pour autant à un épanchement sentimental stimulé par l’atrocité du spectacle dont il fut témoin. Il entend tirer les leçons du récit qu’il a relaté.
3. Une fable universelle
« La mort du Loup » se présente également comme une fable universelle : personnifiant des animaux, le poème comporte des récits enchâssées qui se veulent didactiques. Le récit développé de la première strophe se joint au canevas de récit que comporte la seconde pour légitimer des morales plus ou moins directement exprimées.
La leçon essentielle de « La mort du Loup » est formulée par deux sentences1 complémentaires : « Seul le silence est grand : tout le reste est faiblesse » (v.38) ; « Gémir, pleurer, prier est également lâche » (v.45). La seconde s’inscrit dans le prolongement de la première ; elle permet de l’expliciter. Dans les deux cas, le passage à la réflexion morale universelle est révélé par le recours au présent gnomique et aux structures généralisatrices que renforce, dans la première sentence, l’usage du parallélisme de construction.
Transition : L’appartenance de « La mort du Loup » au genre de la fable explique que ce texte intègre des caractéristiques du récit, du théâtre et de la poésie. Il n’est pas étonnant, dès lors, que cette hybridité génériquement contrainte serve à mettre en relief des morales elles-mêmes diverses.
II) Les morales de la mort du Loup
Les morales de l’apologue de Vigny ne sont pas toujours clairement exprimées. Il est également possible de les inférer de ses récits enchâssés.
1. Une morale de la liberté
Le récit exemplaire de la seconde strophe entre ainsi au service d’une apologie indirecte de la liberté naturelle. Cette défense se fonde elle-même sur la critique de la société.
Vigny oppose particulièrement son interprétation de la survie de la Louve avec le comportement usuel des chiens. Il manifeste, notamment, la piètre estime que ces derniers lui inspirent en les caractérisant comme des « animaux serviles » (v.30). L’asservissement des chiens est rendu sensible par le fait que la périphrase dépréciative qui les qualifie n’occupe qu’un hémistiche. Les chiens sont présentés comme des êtres diminués ; leur aliénation est figurée par la place restreinte qui leur est accordée dans le vers. La polysémie de l’épithète qui les caractérise suggère que leur servilité est double : elle provient de leur condition d’esclave de l’homme et de leur recours à la bassesse et à la flagornerie. Par les attributs qui les définissent aux yeux de Vigny, les chiens se distinguent radicalement des loups dont l’évocation solennelle clôt la seconde strophe. « Les premiers possesseurs du bois et du rocher » (v.32) sont mis en relief par l’alexandrin qui les célèbre et la périphrase méliorative qui les qualifie.
L’apologie des loups et la satire des chiens entrent donc en interaction constante. Vigny s’en sert pour confronter deux modes de vie opposée. Sa défense d’une existence naturelle est renforcée par sa critique d’une vie sociale qui lui apparaît marquée par la compromission. L’évocation du « pacte des villes » (v.29) suggère qu’il n’est pas possible d’y vivre sans renoncer à son être. A travers l’apologue de Vigny s’esquisse ainsi une des leçons majeures précédemment formulées par La Fontaine dans Le Loup et le Chien : mieux vaut refuser la sécurité si on doit lui sacrifier sa liberté et son intégrité. Dans cette dernière fable, « le cou du chien pelé » métaphorise, non sans éloquence, l’inscription de l’aliénation dans le corps. Pour Vigny comme pour La Fontaine, l’avoir ne vaut pas la mutilation de soi.
Transition : Aussi faut-il, pour Vigny, s’entraîner pour endurer toute forme de privation.
2. Une morale de la dignité
A travers les figures exemplaires du Loup et de sa famille, le poète exalte de maintes manières l’importance de la dignité.
Il la prône explicitement dans la tirade ultime qu’il prête au regard du Loup : celui-ci lui aurait enseigné la nécessité de faire montre de « stoïque fierté » (v.43). L’usage du pléonasme dans cette dernière formule en accentue la force, tout en affinant son sens. L’attitude « stoïque » consiste à endurer les épreuves de la vie sans trouble et sans reproches. Par son équanimité, l’âme digne transcende les traverses de l’existence et manifeste sa supériorité. Aussi la dignité se présente-t-elle dans le poème comme une valeur suprême, qui détermine la manière de vivre et de mourir.
Elle conditionne l’éthique de vie des Loups. Vigny la présente notamment comme l’objet principal de l’éducation qu’inculquera la Louve à sa progéniture. L’usage du contre-rejet « afin » (v.27) souligne l’importance de l’objectif qu’elle poursuit : « leur apprendre à bien souffrir la faim » (v.28), c’est-à-dire leur enseigner les vertus de l’endurance. Cet enjeu est crucial car la maîtrise du corps sauve l’âme de l’asservissement par les appétits primaires. Pour vivre avec dignité, il faut également préférer l’action à la parole. Le dynamisme de l’existence engage sa qualité. Ce n’est pas un hasard si le Loup que ressuscite la prosopopée enjoint avec insistance son destinataire à agir. La redondance du verbe « faire » (v.41/46) employé à l’impératif met en relief l’importance d’un travail incessant qui finit par construire l’âme qui s’y livre.
Ainsi est-il possible de se préparer à mourir sans plaintes. Placées stratégiquement à la fin de la première et de la dernière strophe, deux expressions synonymes se font écho pour mettre en relief l’aptitude du Loup à se détacher de sa souffrance pour mourir « sans jeter un cri » (v.20), ni même « parler » (v.48). Tout comme il avait transcendé les aléas de son sort par sa manière de les affronter, le Loup transcende sa mort par sa manière de la vivre.
Transition : En un certain sens, « La Mort du Loup » illustre donc parfaitement la fameuse
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