La Démocratie En Amerique Tocqueville
Mémoires Gratuits : La Démocratie En Amerique Tocqueville. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresouvent donc leur
origine dans la volonté majoritaire. Ce que le plus grand nombre a voulu est
juste parce que cette décision fut prise librement et entre égaux.
B. Le refus de sacraliser la règle majoritaire
Or la deuxième thèse du texte relativise ce principe. Tocqueville juge même
« détestable » la maxime qui donne à la majorité « le droit de tout faire ».
Cela peut surprendre. Puisque la volonté de la plus grande partie des
citoyens est l’instance qui fonde les pouvoirs d’une nation, il semble logique
d’admettre que cette souveraineté est absolue. Ce qu’un peuple a décidé
ne connaît pas de tribunal supérieur à celui de sa volonté. On comprend
que Tocqueville se demande s’il ne se contredit pas. La résolution de cette
difficulté exige qu’il montre l’existence d’une autre souveraineté que celle
de la nation. Quelle est-elle ? où puise-t-elle son autorité ?
[Transition]
Remarquons immédiatement que Tocqueville ne rejette pas le principe
démocratique, mais entend tracer ses limites. Les deux thèses ne sont donc
pas inconciliables.
2. Résolution du problème (« Une nation » jusqu’à
« les lois »)
A. La loi générale de justice
Dans un premier temps, Tocqueville se réfère à une « loi générale » de justice,
qui n’a pas été « faite » mais « adoptée » par « la majorité de tous les
hommes ». Ces termes sont décisifs. Tout d’abord, nous notons que l’idée
de majorité est toujours présente, mais qu’elle change de contenu. Il ne
s’agit plus d’un peuple particulier, mais de l’ensemble des membres du
genre humain. Tocqueville conserve donc l’idée démocratique, mais il lui
donne pour référence la communauté formée par tous les hommes. Il parle
de « société universelle » pour indiquer que cette assemblée est plus importante
que celles formées par les sociétés particulières. C’est donc au nom
même du principe du plus grand nombre que les majorités formées par les
différentes nations doivent s’incliner devant celle constituée par la totalité
des humains. Cette origine supérieure permet de dire que cette loi n’est pas
identique aux autres. Les hommes font des règles, c’est-à-dire les écrivent et
les votent en suivant des procédures dont le détail varie selon les pays. La
volonté de la majorité impose ces lois, qui forment le droit dit positif.
Mais la loi générale n’est pas le fruit d’une telle démarche car elle est celle
du genre humain. Les hommes l’ont découverte, et la majorité d’entre eux a
reconnu qu’elle devait guider leurs actes. Le terme d’adoption signifie que
cette loi existait avant toute décision législative particulière, comme un
enfant que l’on adopte n’est pas un enfant que l’on a soi-même fait. Nous
comprenons donc que la majorité des hommes a pris conscience de l’existence
de règles universelles qui interdisent le vol, le meurtre, et proscrivent
les discriminations. Tocqueville peut ainsi écrire que cette justice « borne »
le droit de chaque peuple car l’universel est supérieur au particulier.
B. La théorie de la représentation
La suite de la partie renforce cette idée. Tocqueville compare chaque nation
à un jury. Cette métaphore judiciaire a une double signification. Elle reconnaît
en premier lieu le droit des peuples à juger par eux-mêmes de ce qu’ils
estiment bons pour eux. Un jury est en droit souverain. Cependant, sa souveraineté
provient de celle du peuple dont il est le représentant. Ce point est
capital. Représenter signifie exercer une autorité parce qu’on y a été autorisé
par ceux que l’on représente. Ce rapport permet de donner une unité et
une stabilité à un groupe d’individus. L’exercice du pouvoir est délégué à
certains, moyennant des procédures codifiées. Il s’ensuit que les gouvernants
doivent se conformer à un mandat défini, et qu’ils ne sont légitimes
que parce qu’ils commandent en vertu d’une décision majoritaire. Tocqueville
tisse alors une analogie. Il affirme que chaque nation est à l’égard de
l’humanité comme un jury à l’égard de son peuple. Il s’ensuit que le droit
des nations doit être référé à l’autorité suprême du genre humain que l’on
nomme parfois le droit des gens. La loi générale de justice donne ainsi des
obligations aux pouvoirs particuliers. Ils doivent respecter l’autorité de la loi
de justice. La souveraineté d’un peuple est limitée, car elle est toujours particulière
alors que celle du genre est universelle.
[Transition]
Tocqueville a répondu à la question qu’il s’adressait pour commencer.
Il nous reste à examiner les enjeux de cette thèse.
3. Les enjeux de la thèse (« Quand donc » jusqu’à
« à plusieurs »)
A. Le droit de résistance
Puisque la volonté d’une majorité doit obéir à une loi générale commune
quand elle légifère dans un pays donné, il s’ensuit que les citoyens de ce
pays ont le droit de résister aux décisions majoritaires lorsqu’elles ne respectent
pas la justice. Faire de la résistance un droit n’est pas évident car
cela risque d’entraîner des désordres déraisonnables. Le caprice individuel
a tôt fait de prétendre qu’il est légitime pour couvrir ses désirs. Remarquons
que Tocqueville donne ici à son texte un tour plus emphatique en employant
la première personne : « Quand donc je refuse d’obéir à une loi injuste ». Ce
n’est pas cependant un simple effet de rhétorique. Il s’agit de manifester
l’importance de la conscience. Une minorité peut avoir raison contre le plus
grand nombre si elle défend des valeurs universelles bafouées par l’ordre
légal. Dans cette optique, on parle des Justes pour désigner les Français
non juifs qui protégèrent ces derniers pendant la Seconde Guerre mondiale.
La conscience morale est étonnante car c’est une instance subjective
capable de former des jugements et d’inspirer des actes de valeur universelle.
Nous retrouvons la même logique que précédemment. Les pouvoirs
sont propres à des nations particulières, l’exigence de justice est absolue.
B. La vraie nature de la majorité
Le texte s’achève par une analyse de la notion de majorité dont le but est
évidemment de prouver qu’elle n’a pas tous les droits. Tocqueville recourt à
deux
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