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Commentaire d'arrêt - Air Algérie 2012

Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt - Air Algérie 2012. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  21 Novembre 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  3 708 Mots (15 Pages)  •  699 Vues

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DICKO Alex                                                                                                                    Le 05 Novembre 2018

L2 UPA – Droit

Commentaire de l’arret par le Conseil d’Etat, le 6 décembre 2012 « Air Algérie »

Note :

               /20

Remarques :

La suprématie de la Constitution dans l'ordre interne a été affirmée avec force par le Conseil d'Etat dans l'arrêt Sarran du 30 octobre 1998. Pour assurer cette suprématie, un contrôle de constitutionnalité des textes inférieurs apparaît indispensable. Dans un arrêt du 6 décembre 2012, la haute cour administrative a précisé l’étendue de sa compétence pour effectuer ce contrôle en présence de décrets transposant une directive. En l'espèce, deux décrets relatifs aux échanges de quotas d’émission de gaz à effet de serre sont parus. Le premier transpose directement une directive européenne alors que le second, est pris en application d'une ordonnance transposant cette directive. Une société demande au Conseil d’Etat l’annulation pour excès de pouvoir de ces décrets. La société requérante soutient à l’appui de sa demande que la directive et les décrets qui en font application, méconnaissent les principes à valeur constitutionnelle du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre.  En effet, la société prétend que l’inclusion des entreprises du secteur aérien dans le système des quotas d’émission de gaz à effet de serre aurait une incidence financière importante sur les sociétés. Les sanctions sont en outre, considérées par cette dernière comme lourdes, étant donné qu'elles peuvent aller jusqu’à l’interdiction de toute activité dans le ciel de l’Union européenne. Le juge administratif est-il compétent pour contrôler la conformité de la directive et des décrets qui en font application, à des principes à valeur constitutionnelle ? Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord qu’il lui appartient de vérifier la constitutionnalité d’un décret assurant directement la transposition d’une directive (I). Toutefois, le juge administratif ne peut pas vérifier la constitutionnalité d’un décret, se bornant à réitérer les dispositions législatives transposant une directive, en l’absence d’une question prioritaire de constitutionnalité (II).

I. Une compétence confirmée pour contrôler la constitutionnalité  d’un décret assurant directement la transposition d’une directive

Le Conseil d’Etat réaffirme dans cet arrêt, sa compétence en matière de contrôle de constitutionnalité d’un décret assurant directement la transposition d’une directive, illustrant son rôle de protecteur de la Constitution lorsque le Conseil Constitutionnel n’est pas compétent (A). Il  explique ensuite le raisonnement qu’il lui appartient de suivre (B).

A. Le Conseil d’Etat, garant du respect de la Constitution ?

Au considérant 10 de l’arrêt, le juge administratif énonce qu’il lui appartient lorsqu’il est « saisi, à l’encontre d’un décret assurant directement la transposition de dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, d’un moyen tiré de la méconnaissance d’une disposition ou d’un principe à valeur constitutionnelle » « de s’assurer de la constitutionnalité du décret ». Il accepte ainsi de vérifier la conformité d’un décret à un principe à valeur constitutionnelle en présence d’une norme conventionnelle.  Ces dispositions confirment la jurisprudence adoptée dans son arrêt d’assemblée Société Arcelor du 8 février 2007 vis-à-vis du contrôle de constitutionnalité d’un décret transposant directement une directive et illustrent la volonté du Conseil d’Etat d’affirmer la suprématie de la Constitution en droit français sans empiéter sur la compétence du Conseil constitutionnel. Il faut tout d’abord rappeler que le juge constitutionnel est en principe le seul à pouvoir contrôler la constitutionnalité des lois. Néanmoins, il ne contrôle pas la constitutionnalité des décrets. Face à une possible violation de la suprématie de la Constitution dans l’ordre interne,  la Haute-juridiction administrative a adapté sa jurisprudence de manière à protéger au mieux la Constitution. Tout d’abord, dans l’arrêt d’assemblée du 3 juillet 1996, le juge administratif interprète une convention « à la lumière » de principes à valeur constitutionnelle, en l’occurrence un principe fondamental reconnu par les lois de la République affirmant implicitement la  supériorité de la Constitution sur les conventions. Ensuite, le Conseil d’Etat, par l’arrêt d’assemblée Sarran, Levacher et autres en date du 30 octobre 1998,  proclame explicitement la supériorité de dispositions à valeur constitutionnelle  sur un traité dans l’ordre interne. L’arrêt Air Algérie confirmant l’arrêt Société Arcelor, permet la mise en pratique de la suprématie proclamée par l’arrêt Sarran. On assiste ainsi à un renforcement de la position de norme suprême de la Constitution dans l’ordre interne, le juge administratif s’affirmant de plus en plus comme le garant de la Constitution. Le Conseil d’Etat se fonde sur l’interprétation de l’article 88-1 de la Constitution par le Conseil constitutionnel. Dans sa décision relative à la loi pour la confiance dans l’économie numérique en date du 10 juin 2004, le juge constitutionnel se déclare incompétent pour contrôler la constitutionnalité d’une loi  qui se borne « à tirer les conséquences nécessaires des dispositions inconditionnelles et précises » d’une directive. Il dispose donc d’une marge d’appréciation lorsque la directive n’est pas précise ou contient des réserves. Il ajoute que si la directive est précise et inconditionnelle, il ne pourra être fait obstacle à sa transposition « qu’en raison d’une disposition expresse contraire de la Constitution ». Dans sa décision du 27 juillet 2006, le juge constitutionnel utilise une nouvelle formulation en disposant que « la transposition d’une directive ne saurait aller à l’encontre d’une règle ou d’un principe « inhérent à l’identité constitutionnelle de  la France sauf à ce que le constituant y est consenti ». La Haute-cour administrative adapte le raisonnement du Conseil constitutionnel à son rôle institutionnel. Elle utilise dans l’arrêt Air Algérie un raisonnement en deux temps lui permettant d’effectuer un contrôle de constitutionnalité du décret « sous le timbre du droit communautaire » selon l’expression du commissaire du gouvernement M.Guyomar.

 B. Un contrôle de constitutionnalité « sous le timbre du droit communautaire »

A la suite des dispositions précitées du considérant 10, le Conseil d’Etat explique qu’il lui appartient dans un premier temps de rechercher « s’il existe une règle ou un principe général de droit communautaire qui, eu égard à sa nature et sa portée, tel qu’il est interprété en l’état actuel de la jurisprudence du juge communautaire, garantit par son application l’effectivité du respect de la disposition ou du principe constitutionnel invoqué».  Conformément aux conclusions du commissaire du gouvernement M.Guyomar sur l’arrêt Arcelor, le juge doit effectuer une « opération de translation » en regardant s’il existe une équivalence entre le principe constitutionnel dont la méconnaissance est  invoquée et un principe du droit de l’Union européenne. Il peut ainsi contrôler un décret se bornant à tirer les conséquences d’une directive en se retranchant derrière le droit de l’Union européenne. Il affirme même dans un second temps, qu’« afin de s’assurer de la constitutionnalité du décret », il lui appartient  « de rechercher si la directive que ce décret transpose est conforme à cette règle ou à ce principe général de droit communautaire.» Il s’arroge ainsi le pouvoir d’effectuer un contrôle sur la directive elle-même. Le Conseil d’Etat dans l’arrêt Air Algérie explique les modalités de son contrôle de manière beaucoup plus succincte que dans l’arrêt Arcelor. Dans ce dernier arrêt, le  Conseil d’Etat décrit les étapes du contrôle relevant exclusivement de sa compétence et celles qu’il réserve au juge communautaire. Par ce biais, il met en place une coopération entre les juges. Le Conseil d’Etat rejoint ici l’idée d’un « dialogue des juges » prônée par le commissaire du gouvernement Genevois dans ses conclusions concernant l’affaire Cohn-Bendit. Il faut rappeler que seule la Cour de justice est compétente pour déclarer un acte de droit dérivé invalide. Si un requérant invoque à l’encontre d’un  décret assurant directement la transposition d’une directive, la violation d’un principe à valeur constitutionnelle, le juge administratif ne peut pas annuler la directive même s’il considère qu’il y a une violation. L’opération de translation associée à la coopération des juges nationaux et de l’Union européenne permet de soulever une question préjudicielle. La directive fera l’objet d’un contrôle et si celle-ci méconnait un principe général du droit de l’Union européenne et par la même occasion un principe  constitutionnel équivalent, elle pourra être annulée par le juge communautaire. Le considérant 10 de l’arrêt Air Algérie met tout d’abord en évidence la compétence du juge administratif pour effectuer un contrôle de constitutionnalité d’un décret assurant directement la transposition d’une directive. Le terme « directement » met l’accent sur cette condition majeure de sa compétence. Ce considérant insiste ensuite sur le fait, qu’en revanche, lorsqu’une loi « fait écran », « la conformité de dispositions législatives à des principes constitutionnels ne saurait être contestée devant le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, en dehors de la procédure prévue à l’article 61-1 de la Constitution ».

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