Faut-il revenir sur le divorce sans juge ?
Dissertation : Faut-il revenir sur le divorce sans juge ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar jumadt • 21 Mars 2018 • Dissertation • 2 274 Mots (10 Pages) • 1 697 Vues
L’ancien garde des Sceaux et ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas a dit dans un communiqué de presse sur la réforme du divorce par consentement mutuel du 18 novembre 2016 « Le mariage ne se fait pas devant le juge, pourquoi cela serait le cas du divorce ? ».
Le divorce sans juge également appelé divorce par consentement mutuel déjudiciarisé correspond à un divorce amiable entre deux époux qui s’entendent sur le principe du divorce et sur les conséquences que celui-ci apporte. De plus, ce divorce est établi en dehors de tout recours judiciaire c’est à dire que le juge n’intervient pas contrairement aux autres procédures de divorce.
Le divorce sans juge a été institué par la loi du 18 novembre 2016 qui consacre le nouvel article 229-1 du Code civil, ce dernier dispose « lorsque les époux s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets, ils constatent, assistés chacun par un avocat, leur accord dans une convention prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par leurs avocats et établi dans les conditions prévues à l’article 1374. Cette convention est déposée au rang des minutes d’un notaire… ». Le divorce sans juge marque l’évolution du divorce par consentement mutuel mis en place par la loi du 11 juillet 1975 et réformé en 2004 pour améliorer le temps de procédure. Ce divorce est apprécié des époux du fait de son coût peu onéreux et de la liberté qu’il leur confère concernant la liquidation du régime matrimonial. Le divorce sans juge est donc dans la continuité du divorce par consentement mutuel classique, cependant celui-ci intervient dans le but de réduire incontestablement la durée de la procédure et de la simplifier mais aussi de limiter le champ d’intervention du juge et donc de désengorger les tribunaux. Dans ce divorce, le juge est ainsi subordonné par l’avocat, et c’est le notaire qui va établir la convention, il ne s’agit donc plus d’une procédure juridique.
Depuis que ce divorce a fait son entrée dans notre droit positif, il est au centre des débats. En effet, il soulève plusieurs questions légitimes du fait qu’il va à l’encontre de l’évolution contemporaine du droit de la famille. En effet, ce droit est un droit pédocentrique c’est-à-dire qu’il est centré sur l’enfant, cependant dans cette procédure la place de l’enfant est mis de côté et laissée au discernement des parents. De plus, ce divorce a été présenté comme étant une libéralisation du droit de la famille, mais cet aspect est à nuancer car les individus n’ont pas le choix de choisir entre le juge et le notaire.
Ainsi, faut-il revenir sur le divorce sans juge ?
Dans un premier temps, le divorce sans juge est un divorce simplifié (I) mais il fait l’objet dans un second temps de nombreuses critiques (II).
I. Un divorce simplifié
La simplification de ce divorce s’observe par deux mécanismes, tout d’abord par la volonté d’une procédure simple et rapide (A) puis par la subordination du juge par l’avocat (B).
A. Une procédure simple et rapide
Ce divorce a été mis en place dans le but d’offrir aux époux, d’accords sur le principe du divorce et sur ses effets, une procédure de divorce simple et rapide. En effet, on retrouve cette dernière à l’article 229-1 du Code civil, néanmoins s’il y a un seul désaccord entre les époux, le divorce sans juge ne sera pas appliqué.
Les époux souhaitant divorcer par le bais du divorce sans juge doivent prendre chacun un avocat. Ces derniers vont rédiger une convention qui relate toutes les volontés des époux et qui contient certaines dispositions précises telles que l’état liquidatif du régime matrimonial ou encore les éléments relatifs à l’identité des conjoints et leurs avocats.
Une fois que la convention a été rédigée et signée par les époux, elle doit être déposée « au rang des minutes » d’un notaire. Celui-ci doit vérifier que le délai de réflexion de quinze jours prévu à l’article 229-4 a bien été respecté et que la convention n’a pas été signée avant. Une fois cette vérification faite, le notaire a également quinze jours pour enregistrer la convention et lui conférer une date certaine avec force exécutoire. Néanmoins, il convient de préciser que le notaire ne remplace pas le juge car il ne contrôle pas le fond de la convention, cette dernière étant soumise aux avocats.
Ainsi, le divorce sans juge offre aux époux souhaitant divorcer une procédure rapide car les seuls délais prévus par cette dernière est le délai de rétractation de quinze jours, puis l’avocat a sept jours pour déposer la convention et le notaire quinze jours pour l’enregistrer. Grâce à cette procédure, le divorce peut être prononcé en un mois et demi en moyenne contre trois mois et demi pour le divorce par consentement mutuel devant le juge.
Cependant, pour conserver le gage de qualité en matière de rapidité, certaines limites sont posées concernant ce divorce. En effet, lorsqu’un enfant souhaite être entendu par le juge ou si un des époux est placé sous un régime de protection alors ce divorce n’est pas applicable. Ces deux situations ont été écartées pour que l’objectif principal de ce divorce soit possible c’est-à-dire une procédure simple et rapide.
Toutefois, cette simplification ne rime pas avec une baisse de la qualité de la procédure. En effet, malgré une volonté de la raccourcir, les intérêts des époux n’en sont pas oubliés. On assiste donc à une subordination du juge par l’avocat où ce dernier va effectuer des tâches similaires au juge.
B. Une subordination du juge par l’avocat
Depuis 1993, on essaie de centrer au maximum le droit de la famille au niveau d’un même juge qui correspond au juge des affaires familiales. Cependant, l’originalité de ce divorce résulte dans le fait que le juge est subordonné par l’avocat. En effet, l’avocat détient un rôle majeur dans cette procédure et va dans certaines mesures remplacées le rôle du juge concernant l’intérêt des époux.
Dans l’article 229-1 du Code civil il est précisé que les époux doivent être « assistés chacun par un avocat ». Ce divorce sans juge implique donc une nouvelle condition, les époux doivent désormais posséder leur propre avocat chose qui n’est pas nécessaire dans un divorce par consentement mutuel judiciaire. Cette mesure a été mise en place dans le but de protéger les intérêts des époux de manière individuelle. La volonté étant que l’avocat ne défendra que les intérêts de son client sans prendre en compte ceux du conjoint. Cette condition engendre donc un coût de la procédure plus élevé mais c’est un gage de protection des intérêts personnels des époux car l’avocat ne peut pas être influencé par l’un deux.
De ce fait, l’avocat devient donc un élément central et déterminant de la procédure. En effet, la convention des parties prend la forme d’un acte d’avocat qui ne peut être remplacé par une convention établie par le notaire. Il y a donc aucune possibilité de substitution ce qui démontre bien la place majeure qu’occupe l’avocat au sein du divorce sans juge.
De plus, l’avocat doit remplir certaines tâches similaires à celles du juge dans un divorce par consentement mutuel classique. En effet, il doit tout d’abord s’assurer que le consentement de son client concernant la volonté de divorcer est bel et bien libre et éclairé. Il doit ensuite s’assurer que les époux sont d’accords sur tous les effets du mariage car un seul désaccord et la procédure n’est plus envisageable. Puis, il va s’assurer que la convention rédigée par les époux soit bien équilibrée et qu’elle préserve ainsi les intérêts de son client. Il va également vérifier que la convention contient tous les éléments requis par la loi donc vérifier qu’elle est bien légale. Enfin, si les époux ont des enfants, l’avocat doit s’assurer que ces derniers ont bien été informé par leur parents de leur droit à être auditionné par un juge prévu à l’article 229-2 du Code civil. Si les enfants le souhaitent, alors le divorce sans juge est impossible et les époux doivent divorcer par consentement mutuel judiciaire.
L’avocat possède donc un rôle semblable à celui du juge et cette subordination des tâches est un facteur clé dans la mise en place d’une procédure simple et rapide. Cependant l’acte d’avocat n’offrira jamais la même sécurité aux époux que l’homologation faite par le juge.
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