La Chute Des Souvenirs
Dissertation : La Chute Des Souvenirs. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresla ramener chez lui. Il s’était rendu compte que les hommes pour qui elle avait un faible, étaient presque tous désincarnés, comme branchés sur des canaux bien huilés qui font que les filles tombent chaque fois et se réveillent le nez dans le ruisseau au petit matin. Quand l’homme avait envie d’elle, emporté par son instinct et sans la moindre hésitation, il lui assénait quelques grasses flatteries et elle succombait dans son délire et s’offrait tout entière à son désir.
Moi, je n’avais jamais osé la prendre de force, ou la travailler de façon qu’elle craque parce que tout simplement quand je lui parlais, je ne me sentais plus, je perdais chacun de mes repères, baigné par l’émotion que faisait naître sa voix dans mon coeur. Alors souvent, je m’engouffrais dans un de ces corps vide d’esprit quand il venait l’entourer de ses bras et je souffrais d’autant plus de sentir tout ce désir qu’elle exprimait pour cet homme qui n’était pas moi. Je voulais seulement que quelque chose lui éveille l’esprit et lui donne à songer à moi, mais elle s’abandonnait à mon corps d’emprunt. Je restais près d’elle tant que je voyais que je ne perturbais pas son aura. Souvent, je l’envahissais et les ténèbres venaient noircir ses ondées. Alors, il me fallait ressortir de l’enveloppe parce que je commençais à dévorer son âme à trop vouloir d’elle.
Maman qui souffrait horriblement de mon état consentit selon l’avis des médecins à débrancher les appareils et je perdis ma belle insatiable en pénétrant dans les couches infernales. Là, il me fut reproché d’avoir perdu ma liqueur séminale, de m’être reposé sur les épaules de maman, de n’avoir pas pris mes responsabilités, d’avoir trop espéré des jeunes femmes de la terre sans avoir fait un pas vers elles, d’avoir eu des pensées coupables pour les jeunes femmes que je croisais dans la rue, d’avoir eu peur des hommes et enfin, d’avoir été triste et mélancolique. A l’annonce de mon jugement, je vis mon étincelle divine, ma flamme s’enfuir en direction du feu continuel. Mon Esprit me toisait de haut fort mécontent de mes inactions. Quand il m’abandonna à son tour pour rejoindre le feu continuel, je vis la multitude en moi, j’avais toujours été en guerre perpétuelle contre moi-même. De cette opposition, je n’avais rien osé construire préférant être passif et me laisser porter au large d’abord par les uns, ensuite ramené vers la plage par les autres, mais je n’avais jamais pu rejoindre la côte. Je n’avais pas su trouver la paix, prendre le temps de faire zazen, assis sur mon coussin. Je n’étais pas mort à moi-même pour renaître d’Eau et d’Esprit. Je n’avais pas cherché Dieu de toute mon âme.
Bientôt, il me semblait que j’allais cesser d’exister. Je perdais mes égos les uns après les autres, chacun était des morceaux d’elle tant elle m’avait contaminé l’existence. Entre ma traversée des lacs de feu et la Chute des Souvenirs, je n’avais conservé que les grandes lignes de ma passion, mais ils m’avaient arraché le prénom de mon aimé. Mon dernier souvenir d’elle s’évapora et peu après, je fus dissous complètement. J’émergeais au bas de la Chute, déchu de toute polarité.
Devenu élémental, sans passé, je me refusai à plonger de nouveau dans la création et déclamai à qui voulait m’écouter qu’il était inutile de tenter l’aventure. Je refusai mon aide aux magiciens et des générations d’élémentaux se succédèrent tandis que je refusais obstinément de reprendre le cours normal des incarnations.
J’eus comme un choc lorsqu’un élémental en tout point semblable aux autres s’ébroua sur le rivage. Il en venait des centaines en permanence mais celui-ci, étrangement, me semblait différent, comme digne d’intérêt. Il accapara tout mon être et j’entrepris de l’instruire de ce que j’avais acquis. Je lui expliquais les règles, mes craintes sur la plongée dans la création, espérant l’effrayer afin qu’il reste près de moi. Il me demandait de justifier mes craintes et je lui répondais que vivre me semblait une quête vaine et inutile, qu’il n’y avait aucun état vers lequel évoluer. J’aimais qu’il soit intéressé par ce que j’éprouvais, mais alors que nous étions en balade, il me montra le germe d’un cristal qu’il avait choisi pour s’incarner. Devant moi, il s’infiltra dans la matière cristalline et pendant des milliers d’années, il développa la patience. Quand les hommes l’ôtèrent de la roche et le taillèrent en petits morceaux, il quitta le règne minéral pour rejoindre le végétal. Il évolua parmi les grands arbres où il apprit à se diriger vers la lumière mais
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