Commentaire cass soc 17 avril 2019 : le transfert du contrat de travail
Commentaire d'arrêt : Commentaire cass soc 17 avril 2019 : le transfert du contrat de travail. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar lolarose • 4 Février 2020 • Commentaire d'arrêt • 2 296 Mots (10 Pages) • 693 Vues
Un transfert du contrat de travail se réalise lors d’un rachat d’une entreprise. Ce transfert peut poser différents problèmes, comme l’opposition du salarié à un transfert ou bien à une modification de son contrat de travail par le nouvel employeur et la chambre sociale de la cour de cassation le 17 Avril 2019 vient éclairer ces interrogations.
Dans cette affaire une société de vente et de commercialisation de fleurs sur internet est cédée à un repreneur qui demande aux salariés à Nantes de se déplacer à Orléans ( environ 300km entre ces deux viles). Les salariées refusent et ils sont alors licenciées pour faute personnelle.
Les salariés saisissent le Conseil des Prud’hommes pour que leur licenciement soit prononcé sans cause réelle et sérieuse et ainsi obtenir diverses indemnités. La Cour d’Appel de Rennes dans un arrêt du 10 Mars 2017 fait droit à leur demande, mais l’employeur mécontent forme un pourvoi en cassation aux moyens que le transfert d’activité avait par lui même entrainer une modification des contrats de travail des salariées puisqu’il ne pouvait maintenir les conditions antérieures de travail de celles-ci, faute de disposer d’un établissement à Nantes.
Ainsi selon celui le refus des salariées de poursuivre l’exécution de leur contrat à Orléans, constituait une cause réelles et sérieuse de licenciement ne relevant pas des dispositions relatives au licenciement économique. Il est alors possible de se poser la question suivante :
Est ce qu’un salarié peut s’opposer à une modification de son contrat de travail du fait de l’application des règles relatives au transfert de l’article L1224-1 du code du travail ?
La cour de cassation répond par l’affirmative à cette question en rejetant le pourvoi de l’employeur aux motifs que le transfert est un simple changement d’employeur et si il y a un autre changement qui constitue une modification du contrat de travail le salarié aura la possibilité de s’y opposer. Cependant il faut regarder si le changement est une modification du contrat de travail ou bien un changement des conditions de travail lié au pouvoir directionnel de l’employeur ce qui ne nécessite pas un accord du salarié.
Ainsi la cour de cassation va, dans un premier temps identifier, le refus impossible du changement d’employeur par le salarié en cas de transfert ( I), et ensuite elle va identifier un refus possible du changement de lieu lié à une modification du contrat de travail (II).
I- Un changement d’employeur opposable au salarié par l’application de l’article L1224-1
A) La mise en œuvre affirmée de l’article L.1224-1 du Code du travail
La Cour de cassation énonce sa décision en rappelant tout d’abord l’application de l’article L1224-1 du Code du travail qui affirme le principe du transfert du contrat de travail.
Ce principe permet de maintenir le contrat de travail d’un salarié en cas de transfert d’entreprise lors d’une « succession, vente, fusion » ou encore en cas de « transformation de fond ou de mise en société de l’entreprise ». Autrement dit, si l’entreprise A rachète l’entreprise B, l’entreprise A doit reprendre les contrats de travail des salariés de l’entreprise B.
Néanmoins, en l’espèce, les juges de la Cour se contentent seulement d’énoncer l’applicabilité de ce principe au travers de l’article L1224-1 du Code du travail et n’en énoncent pas les conditions d’application. Où plutôt, les juges ne rappellent pas les conditions d’application relatives au
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transfert d’entreprise qui ont été dégagées par la jurisprudence antérieure. Celle-ci s’étaient dès lors fondées sur l’article L1224-1 du Code du travail mais également sur la disposition similaire de cet article en droit de l’Union Européenne énoncée par la Directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001.
En effet, à la lecture croisée de ces deux dispositions nationales et européennes, il est possible d’extraire trois conditions cumulatives qui vont dès lors affirmer la présence d’un transfert d’entité. C’est ce transfert d’entité qui va permettre d’identifier un transfert du contrat de travail et ainsi, autoriser la continuité des contrats des salariés dans la nouvelle entreprise.
Dans un premier temps, il faut le transfert d’une entité économique. C’est la Cour de Justice des Communauté Européenne dans une décision du 2 décembre 1999 qui affirme cette première condition. Elle considère que l’entité économique doit poursuivre l’exercice d’une activité économique, qu’elle doit être dotée de moyens matériels et humains (comme par exemple, la main-d’œuvre, les machines ou encore les brevets), et enfin qu’elle est en sa possession un personnel propre dédié à cette activité qui sera transférée.
Une deuxième condition est dégagée par la jurisprudence française et notamment par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 18 juillet 2000. Celle-ci énonce que l’entité économique doit également être autonome, c’est-à-dire distincte, détachable des autres services, activités de l’entreprise qui ne seront pas transférées. Cette autonomie s’apprécie au regard de deux paramètres : l’entité doit être investie d’un personnel propre qui va s’apprécier selon un faisceau d’indices au regard des qualifications spécifiques liées à l’entité (comme par exemple un savoir faire particulier). Elle doit également être investie d’une organisation autonome de la production.
Pour finir, l’entité doit être transférée. Cette dernière condition, énoncée par la Cour de Justice des Communautés Européennes dans un arrêt du 14 avril 1994, s’apprécie au regard de deux sous critères. En effet, l’entité transférée doit poursuivre, reprendre les mêmes activités économiques antérieures au transfert. Elle doit également maintenir l’identité de cette activité, c’est-à-dire conserver une certaine homogénéité entre l’activité exercée par l’ancienne entreprise et la nouvelle.
En ce sens, si, au regard de ces conditions, un transfert d’entité est démontré, cela indique donc qu’il peut y avoir un transfert de contrat de travail. Le contrat sera dès lors repris par la nouvelle entreprise à l’identique. Cependant, le seul changement que subira le contrat de travail sera donc celui de l’employeur ( B).
B) Le changement automatique d’employeur rappelé le juge
La chambre sociale de la Cour de cassation affirme dans cet arrêt que « lorsque l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail entraîne une modification du contrat de travail autre que le changement d'employeur, le salarié est en droit de s'y opposer ». Par l’emploi du terme « autre » la Cour vient déduire l’effet automatique du changement d’employeur. En effet lorsque le transfert du contrat de travail est opéré il a pour vocation à entrainer automatiquement le changement d’employeur. Ainsi il y a substitution du nouvel employeur à l’ancien.
Néanmoins comme le rappelle également la Cour, lorsque l’application de l’article L1224-1 du Code du travail entraine une modification du contrat de travail « le salarié est en droit de s’y opposer », excepté lorsque la modification du contrat concerne le changement d’employeur. En d’autres termes le changement d’employeur est imposé au salarié et ne peut le contester. Le changement d’employeur fait donc une exception à la règle en droit du travail qui veut que lorsque l’employeur souhaite modifier le contrat de travail d’un salarié il doit obtenir le consentement de ce dernier. Cette solution exposée par la Cour de cassation quant à l’impossible
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refus du salarié n’est en réalité pas toute neuve. Puisque effectivement elle déjà été énoncée dans deux arrêts de la chambre sociale : celui en date du 30 mai 2010 et celui en date du 1er juin 2016. En outre il existe en droit commun un principe appelé « effet relatif des contrats » selon lequel seules les parties à un contrat sont tenues par celui-ci, et il semble poser problème dans son application au doit du travail. En effet ce principe vient démontrer que le contrat ne lie pas les tiers et qu’ainsi, si l’ancien employeur décide de céder son entreprise à un nouvel employeur, a priori ne le pourrait pas car le nouvel employeur est vu comme un tiers à ce contrat. Cependant pour la protection des salariés ce principe est mis à mal afin de permettre la continuité de leur contrat de travail avec le nouvel employeur.
Lors du transfert d’entreprise l’employeur peut donc être amené à modifier le contrat de travail (hors changement d’employeur), néanmoins cette modification nécessite le consentement préalable du salarié (II).
II- Le nécessaire consentement du salarié en vue d’une modification du contrat de travail occasionnée par le transfert
A) Une modification du contrat de travail identifiée par le juge
En l’espèce, les salariées ont fait l’objet d’un licenciement pour refus de modification du lieu d’exécution de travail. Considérant qu’un tel changement s’apparente à
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