Commentaire de l'arrêt Cass crim du 27 mars 1991
Commentaires Composés : Commentaire de l'arrêt Cass crim du 27 mars 1991. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresisque, le lendemain matin, son épouse s'était levée et "allait bien". Enfin, le demandeur au pourvoi reproche aux juges d'appel de n'avoir pas vérifier si ses déclarations affirmant que son épouse allait bien étaient mensongères ou pas.
La question à laquelle doit répondre la chambre criminelle de la Cour de cassation est de savoir si les éléments constitutifs de l'infraction de non-assistance à personne en péril sont réunis ou pas.
La chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le mari au motif que tous les éléments, tant matériels qu'intentionnels, caractérisant le délit de non-assistance à personne en péril ont été caractérisés par la Cour d'appel de Paris.
Il convient d'étudier, dans un première partie, les éléments constitutifs de l'omission de porter secours (I). Puis, dans une deuxième partie, il convient de s'attarder à ce qui pose problème dans cet arrêt, à savoir les modalités de l'assistance (II).
I- Les éléments constitutifs de l'infraction :
Comme pour toute infraction, le délit de non-assistance à personne en péril nécessite un élément matériel (A) et un élément moral (B). Si un de ces éléments fait défaut, l'infraction ne peut pas être constituée.
A- L'élément matériel : la nécessité d'un péril
Il faut un péril (1) constant, imminent et grave(2).
1- L'existence d'un péril :
Pour que l'infraction de non-assistance à personne en danger soit retenue, il faut qu'une personne soit en péril, puisque c'est précisément cette situation qui motive le secours nécessaire. On peut se poser la question de savoir ce que veut dire le terme " péril ". Il n'existe pas de définition légale. L'état de péril serait un état dangereux, une situation critique qui fait craindre de graves conséquences pour la personne qui y est exposée : elle risque soit de perdre la vie, soit des blessures, soit une altération grave de sa santé...Bref une menace sérieuse pèse sur la personne physique.
En l'espèce, c'est à juste titre que les juges d'appel ont retenu l'existence d'un péril. Le fait que l'épouse ait absorbé une grosse quantité de médicaments dont le mélange peut être motel constitue bien un péril. En effet, cela peut avoir des conséquences graves et même entraîner sa mort comme c'est le cas. Donc, on peut en déduire que, de par l'existence d'un péril, le mari aurait du porter secours à son épouse.
2- L'existence d'un péril constant, imminent et grave :
Le péril constant est celui qui est incontestable ce qui n'impose pas, par exemple, de vigilance particulière à l'égard de la personne qui menace à tout bout de champ de se suicider et n'oblige pas à anticiper sur un péril qui pourrait se révéler ultérieurement.
Le péril imminent est celui qui est sur le point de se réaliser. Il importe, en effet, d'insister sur le fait que l'infraction de non-assistance est une infraction instantanée punissant le refus de porter secours à un moment donné en présence d'une situation dangereuse à ce moment-là.
Le péril grave est celui dont le caractère est plus difficile à apprécier. L'infraction étant définie par une situation d'urgence, la gravité du péril doit s'apprécier en fonction des apparences et ne suppose pas une issue funeste à l'abstention.
En l'espèce, les juges d'appel ont retenu que le péril dont était victime l'épouse était constant, imminent et grave. En effet, le caractère constant du péril peut se justifier par le fait que la victime était en état de dépression. Cela rendait le péril incontestable car une personne déprimée peut à tout moment décider de mettre fin à ses jours et nécessite une attention, une assistance particulière. Le caractère imminent du péril peut aussi se justifier par la quantité de médicaments absorbés et par le mélange (l'épouse a mélangé du Lexomil et du Xanac). Donc, il est clair qu'à la suite de cette absorption, le péril est sur le point de se réaliser. Quant à la gravité du péril, on a vue qu'elle n'était pas toujours aisée à apprécier. Cependant, en l'espèce, le mari étant médecin, il était tout à fait apte pour apprécier la gravité ou non du geste de son épouse. De plus, il savait si les doses absorbées par son épouse ainsi que les médicaments choisis seraient mortelles ou non. C'est donc à juste titre que la Cour d'appel rappelle avait tout à fait conscience de la gravité de la situation.
Cet arrêt est intéressant car il permet de faire la différence entre le péril immédiat et le péril imminent qui peuvent peser sur une personne. En effet, on peut se poser la question de savoir si un péril imminent est un péril immédiat ou non. Il résulte de cet arrêt que le péril imminent doit être distingué du péril immédiat. En effet, lorsque son épouse a absorbé les médicaments devant lui, le médecin lui a porté secours. A ce moment, le péril a été immédiat. En revanche, le lendemain matin, le péril n'était plus immédiat mais imminent, c'est-à-dire sur le point de se réaliser en raison de la fragilité psychologique de la victime. Or, à ce moment, le mari était absent au motif, selon lui, que la vie de son épouse était hors de danger et qu'elle " allait bien ". On peut donc dire que le mari est coupable de non-assistance à personne en péril imminent mais pas de non-assistance à personne en péril immédiat.
B- L'élément moral : la connaissance du péril et l'abstention volontaire en l'absence de risques :
Les dispositions de l'Article 63 al 2 ancien Code pénal, qui visent le refus de porter secours à une personne en péril, exigent, pour être applicables, que le prévenu ait eu personnellement conscience du caractère d'imminente gravité du péril auquel se trouvait exposée la personne sont l'état requérait secours et qu'il n'ait pu mettre en doute la nécessité d'intervenir immédiatement en vue de le conjurer.
Ce même texte prévoit également que l'on peut s'exonérer de porter secours si l'assistance est risquée pour son auteur ou pour des tiers. Très vite doctrine et jurisprudence ont considéré que cette formule n'imposait pas héroïsme ou témérité, mais qu'elle ne signifiait pas qu'un risque léger puisse justifier le refus de porter assistance à une personne exposée à un grave péril. Concrètement, les tribunaux ont le pouvoir d'apprécier, dans chaque cas d'espèce, s'il y a une certaine proportionnalité entre le danger auquel est exposé la victime et le risque auquel s'exposerait son sauveteur. Mais la jurisprudence a une interprétation très stricte de cette notion de risque puisque, dans un Arrêt du 4 février 1998, elle ne retient aucun arguments avancés par un médecin qui invoquait la distance à parcourir ainsi que les conditions climatiques difficiles pour justifier son non-déplacement.
Dans ces conditions, on peut donc dire que dans notre espèce, qu'en restant le lendemain auprès de son épouse ou, le cas échant, en prévenant un voisin ou de la famille ou même un confrère afin que son épouse ne soit pas seule, le mari ne s'exposait à aucun risque.
En l'espèce, le mari a bien eu personnellement conscience du caractère d'imminente gravité du péril puisqu'il est médecin. En effet, de par sa profession, il savait dès la réalisation ce que risquait son épouse lorsqu'elle a absorbé les médicaments. Cependant, dans cette affaire, il ne me semble pas juste d'affirmer qu'au moment du péril, le mari a omis de porter secours à son épouse. En effet, il l'a veillée toute la nuit en surveillant sa tension et on rythme cardiaque. Il semble même que le mari s'est justement servi de ses connaissances médicales pour sauver la vie de son épouse au moment où elle a absorbé les substances mortelles. En revanche, on peut se poser la question de savoir si celui-ci a commis l'infraction de non-assistance à personne en danger en quittant le domicile conjugal, laissant une femme qui la veille avait tenté de se suicider seule, au seul motif que selon ses dires elle "allait bien". Il me semble que si le mari a apprécié l'état de santé de son épouse en tant que médecin, il ne devrait pas être coupable d'omission de porter secours. Il ne serait pas normal de n'invoquer sa profession que pour prouver qu'il était en mesure d'apprécier la gravité du péril et de refuser de le faire pour prouver qu'il était capable aussi, de par sa profession de médecin, d'apprécier l'état de santé de son épouse le lendemain matin. Cependant, il est vrai que les personnes dépressives et suicidaires sont toujours imprévisibles et, en tant que médecin, le mari étant bien placé pour le savoir. Se faisant, la Cour d'appel de Paris a raison de précisé qu'il n'aurait jamais dû laisser son épouse seule. Il aurait dû soit rester avec elle, soit prévenir quelqu'un. C'est en ce sens que le mari a commis l'infraction de non-assistance à personne en danger.
II-
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