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Droit Penal Des Affaires

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avaux de l’Ecole de Chicago, des auteurs s’efforcent de bâtir une théorie de l’économie du droit. Le droit pénal des affaires est bien dès lors la branche du droit pénal spécial qui traite des infractions commises dans le cadre d’une entreprise et qui sont sou tendues par des considérations économiques, donc de profit. Il en résulte que le délinquant d’affaires est un professionnel. On intègre donc dans le droit pénal des affaires le droit pénal commercial, le

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droit pénale de la concurrence, de la consommation et de la bourse, et bien évidemment l’abus de biens sociaux. Inversement, on exclura le droit pénal du travail, le droit pénal de l’environnement et le droit pénal immobilier : les infractions commises dans ces cadres ne sont pas en principe commises par des professionnels. Cela dit, le droit pénal des affaires existe bel et bien. Le droit des affaires est traditionnellement pénalisé. Il l’est cependant plus ou moins selon les époques et selon les régimes politico-économiques : un régime libéral fera moins appel à la pénalisation qu’un régime autoritaire et d’un autre côté les périodes de crises économique connaissent une plus forte pénalisation que les époques d’expansion économique. De tout cela, il résulte d’abord que le droit pénal des affaires pose un problème de légitimité. En outre, la présence des idées d’entreprise et du profit entraînent un certain particularisme de ce droit face aux autres branches du droit pénal spécial. Et enfin ce droit pénal des affaires comporte des limites, des alternatives.

I – La justification d’une pénalisation du droit des affaires A – A l’encontre de la pénalisation Des auteurs, soit libéraux politiquement, soit méfiants à l’égard du droit pénal plaident pour une restriction de la voie pénale. Les premiers entendent laisser jouer la loi du marché et les seconds (qui peuvent se confondre avec les premiers) considèrent que des sanctions non pénales ont autant d’effets que les peines avec en moins certains désastres. En outre, ces esprits invoquent deux autres arguments. - D’abord les faits sont parfois ignorés de la justice pénale. A quoi bon dès lors prévoir l’appel cette justice ! Cette ignorance se fonde parfois sur des raisons juridiques comme le secret de l’entreprise dont la violation peut donner lieu à poursuites. Il est vrai que les commissaires aux comptes sont tenus de révéler au parquet les faits délictueux qu’ils découvrent à l’occasion de leurs contrôles de la comptabilité des entreprises. D’autres fois, l’ignorance des autorités se fonde sur des raisons factuelles : le flagrant délit est rarissime et les plaintes des victimes ne sont pas très fréquentes. Il y a pourtant des victimes comme les associés, les concurrents, les consommateurs, les petits épargnants… Mais ces gens là déposent peu plainte soit qu’ils ignorent les faits, soit qu’ils sont complices, soit encore qu’ils ne croient pas à l’utilité de leur démarche. - Ensuite, le juge pénal est mal à l’aise en matière de délinquance des affaires. Il ignore les subtilités de la vie des affaires. Il a peur de la paralyser, voire n’aime pas le monde de l’entreprise. 2

B – En faveur de la pénalisation Et pourtant une certaine pénalisation est indispensable tant pour des raisons matérielles (préjudice causé aux salariés et épargnants) et morales (recherche affirmée du profit). Balzac dans son roman Lucien Leuwen a écrit : « Les assassinats sur la Grand’route me semblent des actes de charité comparés à certaines combinaisons financières ». Cette légitimité du droit pénal des affaires est d’autant plus évidente que ce droit n’est pas une remise en cause du système d’économie libérale, même si G. Ripert soutenait le contraire dans son Déclin du droit publié en 1949 (n° 56). A vrai dire, le droit pénal est très compatible avec un système libéral et même il le fortifie comme l’a montré le professeur américain Charles Fried dans l’ouvrage collectif Les enjeux de la pénalisation de la vie économique (Dalloz 1997, p. 102 et s.). Il est vrai que cet auteur entend limiter la sanction pénale à des faits clairs et graves, des faits de « turpitude morale frappant le citoyen ordinaire » (p. 106). Ce point de vue est le meilleur. Cela dit, le droit pénal des affaires n’est pas le droit commun pénal. Le banqueroutier n’a rien de commun avec le voleur d’un véhicule ou l’auteur d’un délit sexuel. Il existe un particularisme du droit pénal des affaires.

II – Le particularisme de la pénalisation dans le droit des affaires A – La théorie de l’infraction Les sources de l’infraction ne sont pas toujours celles du droit commun pénal. Certes les délits sont contenus dans les lois comme les autres délits. Mais en droit des affaires il existe un droit communautaire (de l’Union européenne) et celui-ci prime le droit interne. La chambre criminelle de la Cour de cassation l’a admis dans un arrêt du 22 octobre 1970 dans la célèbre affaire des Fils d’Henri Ramel. Plus récemment, la Cour de justice des Communautés européennes a rendu un arrêt remarqué le 13 octobre 2005 dont le principe est celui-ci : la législation communautaire (les directives et les règlements communautaires) peut prendre des mesures « en relation avec le droit pénal des Etats membres pour garantir la pleine efficacité des normes qu’elle édicte en matière d’environnement ». Ce qui est une invitation, une obligation même pour les Etats à pénaliser les dispositions communautaires. En l’espèce il s’agissait d’environnement à la limite des affaires (mais qui peut en faire partie). Cependant on peut imaginer que par la suite, ce principe sera étendu à d’autres secteurs. La structure de l’infraction n’est pas non plus toujours la même en affaires et en droit commun. C’est vrai d’abord pour l’élément matériel : l’omission joue un grand rôle en droit des affaires, plus important qu’un droit commun. Il y a beaucoup de délits d’omission en droit 3

des sociétés. La jurisprudence admet même la complicité par abstention alors que l’article 121-7 du Code pénal exige une action dans la complicité, et dons un comportement positif. Un arrêt de la chambre criminelle, en date du 28 mai 1990, a qualifié de complice le membre d’un directoire de société qui connaissait l’existence d’abus de biens sociaux et qui ne s’y est pas opposé. Quant à l’élément moral du délit, la jurisprudence l’entend de façon répressive. On sait que la Cour de cassation avait, depuis 1845, créé des délits dit matériels pour lesquels l’élément moral était présumé en sorte que le prévenu ne pouvait se sauver qu’en prouvant sa folie ou la contrainte. Les rédacteurs du Code pénal de 1992 ont supprimé cette notion. Cependant, pour des infractions qui sont en général des délits d’affaires, la Cour de cassation a imaginé une sorte de présomption de connaissance qui en revient pratiquement aux anciens délits matériels. Elle décide en effet que « la seule constatation de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l’intention coupable exigée par l’article 121-3 du Code pénal » (par exemple Crim. 14 janvier 2004). B – La théorie de la responsabilité Pendant longtemps, seule a été envisagée la responsabilité du chef d’entreprise. Les premières applications de cette idée remontent au XIXème siècle et la formule imaginée par la jurisprudence s’est perpétuée. Ainsi un arrêt de la chambre criminelle, en date du 28 février 1956 décide : « dans les industries réglementées sur le plan de la salubrité et de la sécurité publique, la responsabilité pénale remonte essentiellement au chef d’entreprise ». Cependant la responsabilité de l’employeur suppose la réunion de certaines conditions. Il faut d’abord que le préposé ait commis une faute qui soit une infraction pénale. Il faut ensuite une faute du patron, qui est en réalité un défaut de contrôle ou de surveillance. Cependant cette faute est présumée en sorte que le patron ne pourra pas se dégager en prouvant son absence de faute. En somme, l’infraction de l’employé révèle celle du patron et cela de façon quasiment irréfragable. Certes une loi du 10 juillet 2000 sur les délits non intentionnels exige une faute qualifiée en cas de causalité indirecte entre le comportement de l’agent et le préjudice. Mais la jurisprudence n’admet pas cette dépénalisation en faveur du chef d’entreprise. Elle entend maintenir une grande rigueur pour forcer les employeurs à bien surveiller leurs préposés. Toutefois, la jurisprudence reste humaine. Il y a des cas dans lesquels le patron est dans l’impossibilité matérielle de surveiller correctement ses préposés. C’est pourquoi, depuis 1901, la chambre criminelle admet que le chef d’entreprise peut déléguer une partie de ses 4

pouvoirs à un préposé. Encore faut-il que la délégation ne soit pas générale et que le préposé soit pourvu de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires à l’exercice de sa fonction » (chambre criminelle, 5 arrêts en date du 11 mai 1993). Il faut aussi que l’entreprise soit d’une certaine dimension. La conséquence de la délégation est que le chef d’entreprise échappe à sa responsabilité et que seul le préposé délégué est responsable. Le nouveau Code pénal, de 1992, a créé un nouveau sujet passible de poursuites, la personne morale (art. 121-2 du Code pénal). Il y a certes un débat sur la possibilité

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