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Manon Lescaut, Abbé Prévost

Dissertation : Manon Lescaut, Abbé Prévost. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  15 Avril 2024  •  Dissertation  •  2 791 Mots (12 Pages)  •  285 Vues

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Dissertation en français sur Manon Lescaut  :

        « Nous autres romanciers, nous sommes les juges d'instruction des hommes et de leurs passions » comme le disait Emile Zola. Le roman, un des genres les plus lu dans le monde possède la plupart du temps deux objectifs. Une premier être captivant et divertissant qu’est celui de l’intrigue. Un autre plus abstrait qui concerne sa portée didactise en cherchant à instruire celui qui lira l’ouvrage. Certains auteurs expliquent le but de leurs écrits comme le fait ici Zola. Ces objectifs sont les mêmes que ceux de son confrère romancier, l’Abbé Prévot. L’auteur de Manon Lescaut cherche tout comme Zola, à instruire les hommes et juger leurs passions. C’est là la ligne directrice sur laquelle Manon Lescaut est inscrite. L’auteur fait dire à ses narrateurs que le plaisir de la fiction n'est qu’un détour pour délivrer une leçon morale. Ce jugement sur le roman est centré non seulement sur le plaisir mais aussi et surtout sur sa capacité à instruire le lecteur. On peut tout de même se demander : la morale de ce roman est – elle véritablement claire ? Nous montrerons dans un premier temps qu’il est légitime qu’un roman invite le lecteur à tirer des leçons du parcours des personnages. Puis nous soulignerons les limites de la portée morale du récit de Des Grieux. Enfin, nous prolongerons notre analyse en considérant Manon Lescaut comme un roman qui n’est pas seulement didactique mais qui montre aussi l’ivresse des passions et les désordres de l’amour et du monde.

Ce roman didactique, va tout d’abord instruire et inviter le lecteur à tirer des leçons des personnages. L’Abbé Prévot utilise des stratégies romanesques vraiment intelligentes qui permettre de donner l’illusion de la réalité. En effet, ce récit est écrit tout du long à la première personne du singulier c’est-à-dire « je », quelque soit le narrateur, aussi bien avec le marquis de Renoncour qu’avec le chevalier Des Grieux. Cela facilite grandement l’identification du lecteur aux personnages. Mais ça apporte aussi une dimension réaliste à l’histoire, accumulée à la mise en scène entre Renoncour et Des Grieux. Ce dernier racontant le récit de sa vie depuis quelques années, il y a vraiment une impression d’être aux côtés de Renoncour comme un auditeur qui écoute un récit. Les lieux réels comme Amiens, Paris ou encore Chaillot amènent encore une fois dans ce récit réaliste cette sensation de réalité. L’assimilation crée par toutes ces stratégies vont causer de l’empathie de la part des liseurs pour les personnages. Tous les sentiments que peuvent avoir les personnages vont être partagés avec les lecteurs qui les ressentiront aussi fort quels qu’ils soient. Cependant, la souffrance est un des sentiments les plus forts et auquel il est très simple de compatir, ce qui va conduire le lecteur à être frapper de plein fouet de la même douleur que les personnages. En étant à la place de celui qui lit cette œuvre, on va compatir avec les personnes notamment lorsque Des Grieux et Manon sont emprisonnés, ou alors lors de la mort de Manon où un double effet de souffrance est créé. Il y a la tristesse de la mort de Manon, mais aussi la douleur que nous partage Des Grieux, et cette souffrance est bien sûre amplifier grâce à l’utilisation du « je ». La tragédie de l’histoire de ces deux protagonistes et des péripéties qu’ils vivent est donc lourdement partager avec le lecteur.

Toutefois, l’identification aux personnages et leurs émotions ne suffisent pas au lecteur pour tirer des leçons. Il y a aussi une politique morale établie dans ce livre à travers les héros puisque plusieurs personnages délivrent des leçons à d’autres qui servent aussi à être entendues telles que des mises en gardes pour les lecteurs, c’est même leur premier but je dirai. Tiberge par exemple, qui est l’ami d’enfance du chevalier Des Grieux est un personnage moral. A de nombreuses reprises il va le mettre en garde concernant Manon et toutes les perversités qu’elles lui fait subir, mais également pour sa fuite ou ses choix en général qui sont souvent peu réfléchis. Cependant le héros du livre ne l’écoutera jamais tout en jouissant toujours de leur amitié et des services que Tiberge lui rend. Il y a également Lescaut qui est le frère de Manon. Ce personnage qui est lui-même discutable sur un point de vue moral puisqu’à de nombreuses reprises il veut amener Manon et Des Grieux à se prostituer ou même ce dernier à tricher aux jeux. Néanmoins, il apporte parfois de bons conseils aux protagonistes comme lorsqu’il leur déconseille de se faire passer pour des frères et sœurs auprès de Monsieur G.M. pour le manipuler et lui soutirer de l’argent. Lui aussi n’a pas été écouté par les amants. A la fin du livre on voit donc où ne pas écouter ces conseils les à amener, à chaque fois des malheurs leur sont arrivés. L’expression « un plaisir éphémère pour un regret éternel » illustre bien la situation. En premier temps, derrière chacune de leur mascarade, ils gagnent de l’argent et peuvent jouir de richesses diversifiées. Cependant, ça va les mener à la prison, à être emmener de force par le père de Des Grieux et couper les ponts avec lui par la suite, à perdre l’estime de Tiberge, à se déchirer à l’intérieur de leur relation et à la mort avec le décès de Manon. Toutes ces conséquences sont comme des retours de bâton que la vie leur fait subir et ça peut amener le lecteur à plus écouter ces leçons, en voyant bien que ne pas les prendre en compte mène à la perte.

La portée morale du récit de Des Grieux a cependant certaines limites. En effet le lecteur ne dispose pas de tous les éléments pour tirer des leçons valables. On peut tout d’abord se questionner sur l’objectivité de ce récit car la narration ne l’est pas vraiment. L’histoire est altérée par le jugement de Des Grieux et de Renoncour. Ces deux personnages ont de nombreux points communs. Tous deux sont de bonnes familles puisqu’ils sont marquis et chevalier, ce sont des érudits comme l’Abbé Prévot l’auteur du roman. On peut d’ailleurs spécifier qu’il a mis beaucoup de sa personne dans cet ouvrage car comme Des Grieux, il a parfois mis la religion dans un second plan pourtant lui aussi a fait de la théologie étant abbé, il a commis des erreurs, a connu les passions de l’amour et a fait de la prison, tout comme le héros de son livre. Mais le plus gros point commun de ses deux personnages est leur narration puisque ce sont les deux narrateurs du roman et ils parlent tous les deux à la première personne du singulier donc « je ». Cela signifie que perçoit le livre à travers leur propre critique étant donné qu’ils vivent l’histoire. On ne peut donc pas clairement percevoir l’histoire objectivement puisqu’elle est affectée par leur jugement. Ils ne peuvent pas être neutres même avec toute leur volonté, on nous offre une vision donc subjective de l’histoire. Les émotions et sentiments de Des Grieux vont diminuer l’impact de leurs mauvaises décisions à Manon et lui, et ce même si elles hors des normes. On peut donc remettre en question la portée morale de cette œuvre ce qui ne serait pas arriver avec un narrateur extérieur à l’histoire. Mais cela à de l’importance et ça limite donc la morale et comment peut la recevoir le lecteur. On peut donner comme exemple ici quand Renoncour : il parle de Des Grieux comme un homme fou amoureux et vraiment très gentil, ceci est son point de vue et un point de vue qui peut être différent selon chaque personne, ça ne peut pas être une vérité générale. On peut aussi par exemple juste remettre en cause notre propre opinion des personnages. Beaucoup vont moins aimer le personnage de Monsieur G.M. parce qu’il envoie les deux héros en prison et qu’on est du point de vue de Des Grieux, cependant si le narrateur serait ce monsieur, notre vision des choses serait surement différente.

La portée morale de ce roman se limite aussi par la fiction. En effet, ce récit malgré qu’il soit réaliste reste une histoire inventée. Mais le lecteur est consumé par ce plaisir de la fiction. Il va tellement se plonger dans l’histoire qu’il va tout prendre comme vérité générale comme à travers l’opinion de Des Grieux, et il n’aura donc plus d’esprit critique. Il ne va pas se demander si les événements sont moraux ou immoraux. Il ne remettra rien en question puisqu’il aura l’impression de réalité et donc selon cette idée, il va croire réellement tout comme véridique. Néanmoins, cela pose un gros problème. En effet, en l’absence de cette critique qui devrait être constante, lecteur ne fera peut-être plus la différence entre les moments justes ou complétement irréfléchis. Mais en tant que lecteur critique, nous savons que de nombreuses fois,  l’intrigue va s’écarter de toute préoccupation morale. Pendant leurs nombreuses escroqueries envers Monsieur G.M., c’est ce dernier qu’on trouvera méchant de les enfermer en prison, également lorsque Manon se prostitue, cela n’est pas amené tel quel donc on ne voit pas autant le côté malsain, pareillement à la tricherie aux jeux car on prendra Des Grieux en pitié. Et cela amène à inverser ce qui est bien et mauvais. On pensera les punitions méritées comme des actes affreux et notre morale ne tiendra plus à rien. Cela limite donc beaucoup cette portée didactique que le livre nous apporte. On peut aussi souligner que cette absence de morale, donc toutes ces transgressions inconscientes sont les passages qui permettent la critique de la société et des pratiques discutables et « secrètes » que les aristocrates ont mais que l’on excuse pour leur richesse. C’est de cette manière que l’Abbé Prévot va critiquer la société de l’époque mais cette mise en avant diminue la portée morale de l’ouvrage.

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