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Madame de la Fayette : le portrait

Commentaire de texte : Madame de la Fayette : le portrait. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  4 Juillet 2022  •  Commentaire de texte  •  1 779 Mots (8 Pages)  •  423 Vues

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TEXTE 6

LE PORTRAIT DE MLLE DE CHARTRES

INTRODUCTION :

Au XVIIe siècle, le mouvement littéraire principalement dominant est le classicisme, avec plusieurs auteurs connus dont Mme de Lafayette mais aussi Racine ou encore Molière. Ses principes sont de fonder chaque genre littéraire sur des règles de construction claires et rigoureuses, et de défendre l’idéal de l’honnête homme, en proposant une morale dans chaque œuvre. En 1678, Mme de Lafayette publie anonymement, La Princesse de Clèves. La nouveauté de son style et le fait qu’elle renouvelle le genre romanesque entre la préciosité et le classicisme ne laisse pas ses lecteurs indifférents. Ce récit met en scène le parcours d’une jeune adolescente, Mlle de Chartres, à la cour d’Henri II. Elle sera mariée avec le Prince de Clèves, mais tombera amoureuse du Duc de Nemours. Le passage que nous allons étudier se situe au début du roman. L’héroïne est présentée à la cour pour la première fois. Le lecteur découvre alors tout le bien, la vertu et le mérite que lui a enseigné sa mère, Mme de Chartres. Nous allons voir en quoi ce portrait est original. On observe une progression dans cet extrait, de la ligne 213 à la ligne 217, où elle apparait à la cour et suscite l’admiration. Une seconde partie, bien plus longue, de la ligne 217 à la ligne 238 où l’on découvre l’éducation choisie par sa mère. Enfin, de la ligne 239 jusqu’à la fin, dans laquelle on nous la décrit physiquement.

ANALYSE LINEAIRE :

1ère partie (l.213-217) :

Dans le début de ce texte, un suspense est installé par Mme de La Fayette. En effet, l’adverbe « alors » (l.213) annonce un évènement perturbateur, étonnant, associé à l’utilisation du passé simple, synonyme d’action avec le verbe « parut » (l.213). Ce suspense est renforcé par le fait que le narrateur ne nomme pas directement Mlle de Chartres mais par les périphrases : « une beauté à la cour » (l.213) et « une beauté parfaite » (l.214) et par l’emploi du pronom personnel « elle ». Cette apparition du personnage à la cour peut nous faire penser à celle des princesses dans les contes. D’ailleurs, Perrault s’en est inspiré pour Cendrillon (lors du bal). Dans notre extrait, la jeune fille suscite l’admiration, la surprise, soulignées par les hyperboles « tout le monde » (l.213-214) et « beauté parfaite » (l.214), et par le champ lexical du regard et de l’admiration « parut », « attira les yeux » (l.213), « admiration » et « voir » (l.215). Son extraordinaire beauté est renforcée par sa distinction dans une foule de personnes qualifiées comme « belles » (l.216). Nous apprenons seulement son nom à la ligne 217 ou plus exactement qu’elle appartient à la famille du vidame de Chartres. L’emploi du superlatif « une des plus grandes héritières de France » (l.217) souligne également sa noblesse et prépare l’intrigue, car en tant que grande héritière, elle est nécessairement l’enjeu d’un mariage.

2e partie (l.217-238) :

Nous apprenons ensuite qu’elle a perdu son père jeune et qu’elle est restée avec sa mère, Mme de Chartres, donc celle-ci a eu plus d’influence sur sa fille. Le narrateur fait l’éloge de Mme de Chartres en faisant une accumulation méliorative : « dont le bien, la vertu et le mérite était extraordinaire ». Nous pouvons également constater que le narrateur met en avant ses qualités morales alors que sa fille a été décrite sur son physique. Nous observons alors une substitution fille-mère : « elle » (l.216) = fille > (l.220) = mère. Ce n’est plus la jeune fille qui est évoquée, mais les actions de sa mère : étonnant de parler de la mère alors que c’est la fille le personnage principal ! D’ailleurs, c’est la mère qui devient le sujet de tous les verbes : « elle avait passé » (l.220), « elle avait donné » (l.221), « elle ne travailla pas seulement » (l.222) etc. Nous apprenons également qu’elle s’est éloignée de la cour, et par conséquent sa fille aussi, ce qui a renforcé son influence. En plus de cela, c’est Mme de Chartres elle-même qui l’a éduquée par « ses soins » (l.221) comme le souligne le déterminant possessif, ce qui est original pour cette époque, et qui a voulu une éducation complète, tant sur le plan moral (« esprit » l.223) que physique (« beauté »). Mais elle a surtout voulu lui transmettre sa « vertu » (l.223). Rappelons que la sienne est qualifiée d’« extraordinaire » (l.219). Mme de Chartres veillait à donner à sa fille une éducation différente ne visant pas à la réprimander mais à lui faire aimer la vertu. Elle s’oppose à l’éducation de « La plupart des mères ». Ce pluriel de généralité montre ce qui est selon elle une mauvaise éducation. Nous apprenons qu’elle a une « opinion opposée » car elle aborde des sujets tabous tels que l’amour.

Nous avons ensuite le discours narrativisé des conseils de Mme de Chartres. L’adverbe « souvent » (l.226) + l’imparfait d’habitude « faisait » (l.227), « montrait » (l.227), « contait » (l.229) etc. insistent sur la durée de cette éducation et l’influence que celle-ci a pu avoir sur la jeune fille. Mme de Chartres avertit sa fille des dangers de la galanterie, comme en témoigne le parallélisme antithétique à la ligne 227 avec les adjectifs « agréable » et « dangereux » dans la phrase « elle lui montrait ce qu’il a d’agréable pour la persuader plus aisément sur ce qu’elle lui apprenait de dangereux ». Nous comprenons également que Mme de Chartres est une fine psychologue et qu’elle sait être persuasive. L’emploi de l’énumération péjorative « le peu de sincérité des hommes, leurs tromperies et leur infidélité, les malheurs domestiques » insiste sur les dangers qui menacent la jeune fille.

Mme de Chartres oppose alors la galanterie, source de « malheurs », à la « tranquillité » d’une « honnête femme » (l.231). Il s’agit d’une éducation moraliste. Mme de La Fayette est en effet une amie de la Rochefoucauld et a connu les moralistes de son époque (La Bruyère, La Fontaine). Nous retrouvons ici l’idéal du classicisme (Cf. Molière), qui défend la vertu au détriment de l’amour (Cf. Racine qui peint des conséquences funestes des passions (Phèdre, Bajazet…). Le nom « tranquillité » rappelle l’ataraxie des philosophes, d’autant plus qu’elle permet d’atteindre le « bonheur » (l.237). En outre, la vertu permet de se singulariser (l.233), comme la sagesse pour le sage (Cf. célèbre passage de Lucrèce « Suave mari magno » où le sage est au-dessus de la foule aveugle). Mme de Chartres se distingue donc des autres mères et veut que sa fille se distingue également. Mais elle montre aussi les difficultés, comme le souligne le champ lexical de l’effort, avec les termes « difficile » (l.235), « défiance » (l.236) et « grand soin » (l.236) : rend vertu encore plus attirante car pas à la portée de tout le monde ! (Cf. Prodicos, apologue : « Hercule à la croisée des chemins »). Enfin, Mme de Chartres emploie une sorte de proverbe moraliste, afin de faire passer un message à sa fille et de conclure son discours : le seul « bonheur d’une femme […] est d’aimer son mari et d’en être aimée » (l.237-238). Le chiasme insiste sur la réciprocité de l’amour.

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