Pensée et imagination au XVIIe siècle
Dissertation : Pensée et imagination au XVIIe siècle. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar LePaysDesMerveilles • 14 Mars 2020 • Dissertation • 2 406 Mots (10 Pages) • 3 815 Vues
Dissertation : Parcours “Pensée et imagination au XVIIème siècle”
Sujet : La Fontaine, dans sa dédicace à Madame de Montespan, qualifie les fables de “jeux où [s]on esprit s'amuse”. À la lumière de votre lecture des livres VII à XI des Fables et des textes que vous avez pu étudier dans le parcours “pensée et imagination au XVIIème siècle”, vous vous demanderez si les fables ne sont que des écrits ludiques dans lesquels se déploie l’imagination.
Problématique : Les Fables de La Fontaine ne s’accordent-elles qu’à des écrits ludiques ?
Certes les récits contenus dans les fables sont des jeux plaisants
Des cadres variés et des personnages originaux
Des intrigues pleines de rebondissements
Mais ils permettent aussi à la pensée de l'auteur de se déployer
Une visée didactique : une leçon de vie
Une critique de la société
Longtemps, les apologues ont aidé notre société à lui faire comprendre ses vices et ses erreurs, à critiquer le pouvoir et les institutions… Utile moyen de contourner la censure par un premier niveau de lecture tout à fait inoffensif, l’apologue prend une nouvelle tournure lorsqu’il est réinterprété : son objectif n’est pas de délivrer un message unique, mais d’inciter le lecteur à la réflexion. Le conte, le conte philosophique, l’exemplum, la parabole, l’utopie, la contre-utopie… tous sont des formes différentes de ce genre argumentatif qu’est l’apologue, un récit court cherchant à viser morale. Parmi toutes ces formes, la fable règne en maître, avec Jean de la Fontaine en aide de camp. Nous pouvons ainsi nous demander, en suivant la pensée de cet auteur, si les fables ne sont que des écrits ludiques dans lesquels se déploie l’imagination. Nous devrions alors procéder à une réflexion à propos de ces “écrits ludiques” qui correspondent à du divertissement, où cette “imagination” ne correspond qu’à de l’amusement, tout en nuançant notre propos. Notre véritable questionnement reviendrait donc à nous demander si les fables de La Fontaine ne s’accordent-elles qu’à des écrits ludiques. Nous étudierons pour cela le fait que les récits contenus dans les fables sont des jeux plaisants, mais qu’ils permettent également à la pensée de l’auteur de se déployer.
Toutes les fables de La Fontaine contiennent des récits où s’adonnent des jeux plaisants. Le but premier d’un apologue est ainsi retrouvé, à savoir “plaire”. Ce désir de plaire se retrouvent dans la fable, grâce, tout d’abord, à ses cadres variés et ses personnages originaux. La Fontaine, prenant part dans la querelle des Anciens et des Modernes, s’amusait à détourner les récits mythologiques. En effet, dans sa fable bien-connue Les Deux Coqs, l’auteur s’inspire des récits antiques d’Esope et de l’Illiade d’Homère, afin de nous livrer une réécriture de la guerre de Troie, où elle est comparée et reléguée à un simple combat de basse-cour. Ce décalage nous fait rire et nous amène à des cadres différents de celui de la forêt dans Le Corbeau et le Renard, ou celui de la prairie dans Le Loup et l’Agneau, autres fables de La Fontaine. Et dans ces univers sauvages et variés, les hommes deviennent des animaux, afin d’apporter la légèreté utile à la fable. Car souvent dans ces fables, la mort n’est pas loin. Dans Les Poissons et le Cormoran, on assiste même à un génocide ! Mais le fait qu’ici, les hommes soient remplacés par des écrevisses nous fait presque oublier le côté souvent tragique des fables et nous convainc de continuer cette lecture qui se veut toujours plaisante. Mais ces personnages ne sont pas que des représentations vides des hommes. On assiste dans les fables à une stéréotypie des personnages, c’est-à-dire que ceux-ci possèdent un caractère particulier. Dans l’Ours et l’Amateur des Jardins, La Fontaine décrit ce même ours comme un personnage “à demi léché”, un personnage sans éducation, mal élevé. Dans Le Chat, la Belette et le petit Lapin, la belette, profitant de l’absence du lapin pour lui voler son logis, est considérée comme un personnage rusé, hypocrite et voleur, ce dont La Fontaine témoigne par la périphrase “la dame au nez pointu”. De plus, de fables en fables, les mêmes animaux ont très souvent des caractères similaires. Du Corbeau et le Renard aux Animaux malades de la Peste, en passant par Le Loup et l’Agneau, le renard est toujours présenté comme un personnage rusé, tandis que le loup est souvent cruel. La stéréotypie des personnages se retrouve ainsi au fil de toutes les fables.
Ces animaux originaux se retrouvent donc bien dans leurs univers sauvages afin de planter le décor des récits plaisants. Il faut maintenant y ajouter des intrigues pleines de rebondissements afin de contribuer au désir de plaire. La Fontaine, habité par une volonté de dynamiser le récit, intervient de nombreuses fois dans ses fables. Il utilise de nombreux effets de rupture et de pause, comme dans l’Ours et l’Amateur des Jardins où il intervient trois fois ! Ainsi, dans cette fable, les interactions du fabuliste nous mettent en garde sur le choix de ses amis et des conséquences. Pour cela, il se moque par exemple de l’ours en le désignant de “fidèle émoucheur”, alors que celui-ci finira par casser la tête de l’homme. De plus, ces interventions et l’utilisation du discours direct servent à créer un lien de connivence entre le lecteur et le fabuliste. A l’aide de la question rhétorique “Que fit-il ?” dans les Poissons et le Cormoran, le fabuliste répond aux questions du lecteur et lui permet de se sentir investi dans ses fables. L’intérêt du lecteur pour la fable se cré également à l’aide des effets de chute et des coups de théâtre introduits par La Fontaine. En effet, ces effets, malgré le fait qu’ils soient extrêmement récurrents dans les fables, sont très souvent inattendues. Dans le Mari, la Femme et le Voleur, on s’attend normalement à ce que le voleur soit chassé de la maison du couple. Mais le mari, désignant le voleur par “Ami voleur”, fait tout le contraire, en lui permettant de le voler ! Cette situation est inattendue, et crée ainsi un effet de chute. Le lecteur est dorénavant attiré par cette surprise qui le poussera à continuer sa lecture afin de retrouver ces rebondissements qui font parties du grand intérêt des fables. Mais cet intérêt est également suscité par l’effet du merveilleux. L’élément le plus marquant que l’on retrouve dans la plupart des fables est bien entendu l’utilisation des animaux. Ils ne sont pas simplement posés là comme dans une prairie ou une étable ; ils sont personnifiés. Ainsi, dans le Chat, la Belette et le petit Lapin, le chat apparaît tel “Grippeminaud”, le juge corrompu, reconnaissable à sa robe fourrée, du Cinquième Livre de Rabelais. Cette personnification, ici extrêmement précise, permet au récit de poser son intrigue où, dans un terrier transformé en tribunal immoral, seront jugés par un chat parlant, une belette et un lapin tout aussi dotés de la parole. Cet effet du merveilleux est donc bien plaisant, comme le fait que des crevettes puissent “députe[r]” dans les Poissons et le Cormoran. Ces personnification d’animaux, qui nous semblent impossible, nous font rire grâce au décalage avec la réalité et permet ainsi au récit d’être bien vivant et agréable.
La fable se retrouve donc bien être un récit plaisant, grâce à ses caractéristiques initiales. Ses cadres variés et ses personnages originaux qui s’enchassent dans des intrigues pleines de rebondissements permettent aux lecteurs d’apprécier pleinement les fables. Mais l’intérêt de celles-ci ne réside pas simplement dans leur côté ludique : les fables sont également des récits qui permettent à la pensée de l'auteur de se déployer.
Rappelons que les fables sont une forme d’apologue. Nous savons que le but premier d’un apologue est de plaire. Mais son second but, et certainement le plus important, est d’instruire. La fable ne déroge pas à cette règle, puisqu’elle a une visée complètement didactique. Son objectif, derrière son côté agréable, est de donner une véritable leçon de vie. Et pour cela, rien de plus que l’utilisation de la morale. Qu’elle soit explicite ou implicite, elle sera toujours présente dans les fables. Dans le Vieillard et les trois jeunes Hommes, la morale explicite qui concerne “La main des Parques blêmes/De vos jours, et des miens se joue également”, à savoir la fragilité de la vie, est même gravée sur l’épitaphe des trois jeunes défunts. Cette particularité nous facilite même la volonté de regarder la mort en face, de rester serein face à elle, qui est finalement un des buts de cette fable. Et les fables en général contiennent
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