Le premier ministre et le parlement

Le Président ne se contente pas du rôle de « pilier » du régime, il a besoin d’une personne chef du Gouvernement et qui dirige son action, le Premier ministre.

Le Président est le chef de l’Etat et est censé être une sorte « d’arbitre du régime », au-dessus des discordes entre partis, chargé d’apaiser le jeu politique. A ses côtés, le premier Ministre, chef du Gouvernement, dirigeant l’action de celui-ci et disposant de l’administration publique.

Cependant, en réalité le Président ne se contente pas de ce rôle de « pilier » du régime et notre Constitution n’étant pas suffisamment claire sur l’équilibre que doivent adopter prérogatives présidentielles et ministérielles, il arrive bien souvent que le rôle du Premier Ministre se retrouve masqué, il serait donc légitime de s’interroger à ce sujet.

Le Premier ministre est souvent donc en retrait face à une figure charismatique imposée par le Président, tout a commencé sous De Gaulle. Héros de la Seconde Guerre Mondiale, fondateur des Ive et Ve Républiques et sauveur de la France pendant la Guerre d’Algérie, sa réputation n’est plus à faire et il n’est un mystère pour personne que c’est une personnalité impressionnante qui a engendré cette tradition de Président imposant, maître de tout et au cœur du régime.

La Ve République est souvent qualifiée de « régime semi-présidentiel », s’opposant alors directement à la Constitution qui insiste sur la qualification du « régime parlementaire ». Mitterrand parle du « strip-tease » du Premier Ministre, Sarkozy le décrit comme un simple « collaborateur ».

Il est donc nécessaire de se demander si les attributions du Premier ministre ne sont-elles pas étouffées par la figure présidentielle ?

Il est nécessaire de déterminer les pouvoirs respectifs du Président et du Premier ministre (I) et d’essayer de comprendre de quelle manière ils s’équilibrent ou se neutralisent notamment grâce à la cohabitation (II).

1. Les pouvoirs du Président et du Premier ministre

Afin de savoir si cette domination existe, l’étude des pouvoirs du Président irresponsable politiquement (A) face à celle du Premier ministre politiquement responsable (B).

1. Le Président, figure de charisme irresponsable

• le chef de l’Etat est irresponsable aux yeux de l’article 67 de la Constitution, ses responsabilités ne sont pas assez grandes. Cependant, l’article 67 présente une exception : l’article 68. Il dispose que : « Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. » En clair, il faut absolument le protéger pour éviter qu’il ne soit trop facilement la cible d’accusations, mais ses fonctions obligent tout de même une possibilité d’action de « justice ».

• Le Président et non le Premier ministre préside les Conseils de Défense et Conseils des Ministres. C’est un premier abus car rappelons le Premier Ministre est chef du Gouvernement et de la Défense Nationale. Pourquoi la direction de deux institutions relevant de la compétence du Premier Ministre revient-elle au Président ?
  

• Second problème, l’article 16 de la Constitution permet la gestion exclusive du pays en période de crise au Président. Le président étant un un arbitre du régime, est-ce à lui que revient cette lourde tâche et non pas au premier Ministre, déjà chargé de mener à bien la Politique Nationale, la Défense et la gestion de l’administration ?

1. Le Premier ministre, responsable politiquement

• C’est donc le chef du Gouvernement, c’est-à-dire le chef de l’entité qui détermine et conduit la politique de la Nation et qui dispose de l’administration, ainsi que de la force armée.

• Les pouvoirs du Premier Ministre sont établis à l’article 21 de la Constitution : il est responsable de la défense nationale, ce qui est un paradoxal lorsque l’on sait que c’est le Président de la République qui préside les conseils de Défense nationale, assure l’exécution des lois, dispose du pouvoir réglementaire et peut même supplier le Président sous certaines conditions.

• Il semble que sa légitimité ne soit pas aussi forte que celle du Président, élu au suffrage universel direct tandis que le chef du Gouvernement est nommé par celui-ci via l’article 8 de la Constitution. Il dispose tout de même de certaines prérogatives très importantes. Par exemple, comme l’explique l’article 9 de la Constitution, les actes du Président doivent être contresignés par le Premier Ministre. De plus, le Président ne peut prendre des décisions importantes, telles que la dissolution de l’Assemblée Nationale ou de la promulgation d’un référendum, sans en avoir discuté avec le Premier Ministre.

Le Premier ministre semble étouffé par les pouvoirs du Président, certains pouvoirs ne lui revienne pas alors qu’il semble être le plus légitime de les exercer. Il est chargé de conduire d’une poigne de fer la politique nationale, tout en veillant à ne pas commettre d’erreur s’il ne veut pas se voir contraint à présenter sa démission.

1. Le Premier ministre, d’acteur à figurant

Pour continuer notre développement, il est nécessaire de nous intéresser à la période de cohabitation (A) et ensuite à la période de fait majoritaire (B).

1. La cohabitation, un bien pour le Premier ministre

• Lorsque le Président de la République nomme le Premier Ministre, il le choisit du même bord politique que la majorité de l’Assemblée Nationale. Il arrive donc que le Président et Premier ministre ne soient pas de la même couleur politique, c’est donc la cohabitation.
• Etant de couleur politique différente, il fréquent que le Président et le Premier ministre ne s’entendent pas et dans ce cas, le Premier Ministre reprend l’ascendant sur le jeu politique. En effet, les actes pour lesquels le Président a besoin de la signature du chef du Gouvernement sont plus difficiles à obtenir, et inversement. La plupart du temps, le chef de l’Etat s’efface et s’en tient aux pouvoirs qu’il peut exercer seul

C’est en période de cohabitation que le rôle du chef de Gouvernement du Premier Ministre est le mieux respecté