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Les Valeurs Et Les Vertus Du Sport

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gue Roland Barthes, en 1957, qualifiait encore le Tour de «course», «de grande épopée». Bobet, qui ne se dope pas, «est un héros tout humain». Clairement, il pouvait y avoir identification du public. Le long des routes, devant la télévision ou l’oreille collée contre son transistor, le quidam pouvait y croire: «avec de la «volonté», cela pourrait être moi».
 Qui, sérieusement, aujourd’hui, s’imagine à la place d’Armstrong ou de Contador?

Certains pensent que le tour de France est un sport ignoble. Le Tour de France n’est pas un sport, c’est un spectacle, et il n’a pas plus ignoble d’assister à représentation cycliste de la Douleur qu’aux souffrances «d’Arnolphe ou Andromaque». Les spectateurs, un temps réticent, se sont adaptés à cette situation.

Pour continuer de citer Roland Barthes: «Le public se moque complètement de savoir si le combat est truqué ou non, et il a raison; il se confie à la première vertu du spectacle, qui est d’abolir tout mobile et toute conséquence: ce qui lui importe, ce n’est pas ce qu’il croit, c’est ce qu’il voit».

Plusieurs facteurs contribuent pour le public français à cette mise en scène spectaculaire et à l’éloignement de la sphère sportive:

Une identification impossible:

Depuis la fin de Richard Virenque et de Laurent Jalabert, il n’y a plus de Français susceptibles de titiller les meilleurs. Cela permet de s’éloigner de l’esprit chauvin du sport et de regarder avec détachement les images. Qui aurait été triste si l'inconnu Christophe Le Mével, premier français, avait subi une défaillance dans le Mont Ventoux? Personne.

Si un Français était fort, le public s’y attacherait et, comme en football, son intérêt pour la course évoluerait selon ses performances. Là, ce sont tous les mêmes. Bien sûr, certains sont plus sympathiques que d’autres, les frères Schleck par exemple. Mais, dans l’instant présent, le public aurait tout autant aimé les voir défaillir que de les voir s’échapper. L’important est qu’il se passe quelque chose, pas ce qui se passe.

Le paysage:Sans cesse décrit et commenté à la télévision, il place le Tour dans une sorte d’intemporalité. Jamais, pendant un match de foot l'on passerait la moitié du temps à décrire la ville dans laquelle il se déroule.

Les commentateurs:

Ils jouent, peut-être à l’insu de leur plein gré, un rôle spectaculaire. En ne commentant que l’instant présent, en ne faisant qu’effleurer — quand ils effleurent — les fonds du dossier alors que les courses sont si longues, ils sont indispensables. Que ce soit Laurent Fignon ouThierry Adam sur France2, s’exclamer, faire des blagues, rire parfois sous cape, leur arsenal est multiple. Ils sont Scapin, quand ils jouent leur Tartuffe et portent à l‘échafaud le malheureux Danilo Di Lucas, «rattrapé par la patrouille»: «Quel con!» s'exclame Fignon. «On sait pourtant qu’aujourd’hui, quand on se dope, on se fait forcément prendre», approuve Adam. C'est Falstaff de Shakespeare se jouant des autres avant sa propre chute. De telles déclarations péremptoires permettent aux spectateurs soit de s’énerver contre eux, soit d’opiner bravement de la tête, donc de participer. En cela, leurs auteurs sont indispensables.

La chute d’Armstrong:

La retraite de Lance Armstrong avait laissé un goût amer. Il était parti sans perdre, les victoires des suivants paraissaient — ou étaient, cf Landis — illégitimes. Grâce lui soit rendue d’être revenu pour de nouveaux actes, d’avoir savamment mis en scène son retour en jouant avec Twitter et les médias. Les journalistes sportifs ont fustigé ce tour ennuyeux. Certes, Alberto Contador n’a jamais été menacé par le coureur texan. D’un point de vue d’un regard froid, purement analytique, il n’y avait pas de suspens.

Pour le spectateur lambda que je suis, qui adore assister en direct à la mort des héros, le simple fait de voir le septuple vainqueur du tour décrocher dans une montée était un événement d’une portée considérable. Un seul regret qui rend cette saison légèrement décevante: Lance Armstrong n’est pas allé jusqu’au bout. Il avait deux possibilités:

Tout d'abord, mourir. Si seulement il avait pu subir une fringale, un vrai coup de moins bien, qui l’aurait vu défaillir et gravement lâché, la caméra aurait pu zoomer sur ses yeux, sur son visage révulsé. Les spectateurs auraient applaudi de le voir se faire dépasser par des coureurs anonymes. Une belle représentation de la «Douleur». Miguel Indurain, après cinq titres, malgré son manque de charisme, avait eu la décence de presque mourir sur la route ce qui rendait les envolées des autres encore plus lyriques.

Autre solution, l'Américain aurait pu ou dû revenir, provoquer le coup d’éclat. Un instant, ce fut le cas pendant le Petit Saint Bernard. Il a accéléré et donné l’impression qu’il était en descente tellement il allait vite. Pendant ce bref moment, j’ai dû recevoir une dizaine de mails d’amis, pourtant au boulot, qui me lançaient tous en substance: «Regarde! Armstrong!».

Si seulement il avait dépassé les autres et continué sur sa lancée. Il a été victime de la stratégie d’équipe qui oblige à respecter son leader, ce que Barthes appelle «le catch régulier». «Un combat régulier n’est rien d’autre qu’un combat exagérément poli: “les combattants mettent du zèle, non de la rage à s’affronter [les attaque d’Andy Schleck dans le Ventoux], ils savent rester maître de leurs passions [Contador devant les disgressions twiterriennes de Arsmtrong], ils ne s’acharnent pas sur le vaincu, ils s’arrêtent de combattre d’ès qu’on leur donne l’ordre [Contador vis à vis d’Arsmtrong]”».

Les scandales:

Ne nous cachons pas derrière notre selle: le scandale, c’est ce que tout le monde attend. Un Tour de France sans scandale, c’est une course de Formule 1 sans accident: c’est moins bien. Heureusement, les

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