La Société Japonaise Présenté Dans Un Film De Kurosawa
Mémoire : La Société Japonaise Présenté Dans Un Film De Kurosawa. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresaponaise par un des plus grands maîtres du cinéma mondial » ou encore comme « chronique sociale, portrait du japon de l’après guerre », ce film de Kurosawa représente un support idéal pour étudier la place du salary man au japon depuis le début de son industrialisation. Le film débute par le mariage de Nishi avec la fille de son patron, handicapée depuis l’enfance. Mais Nishi n’est pas ce qu’il semble être, c’est en fait le fils d’un ancien employé de l’entreprise qui s’est suicidé en se défenestrant après une sombre affaire de corruption encore en cours d’enquête. Le but de Nichi n’est pas de découvrir ce qui est arrivé à son père, car il le sait déjà, mais plutôt de faire tomber tous ceux que le suicide de son père a protégé, et ainsi de dévoiler au grand jour les rouages de l’institution sociale qu’est l’entreprise au japon.
A un moment Itakura dira à Nichi afin de l’avertir sur la nature de l’un de personnage : « ce n’est pas un homme, c’es un fonctionnaire. ». Cette phrase comporte plusieurs éléments qui peuvent interpeller le spectateur.
Itakura explique à Nichi qu’il ne faut pas faire confiance à Wada.
1) Définitions et vocabulaire.
Tout d’abord le vocabulaire utilisé dans le film ainsi que sa traduction risque de nous poser problème. Dans la phrase citée plus haut, Itakura utilise le mot « yakunin » en japonais, qui peut être traduit par fonctionnaire ou bureaucrate. Cependant en français ces deux mots ont d’importantes connotations. Par exemple la traduction « fonctionnaire » qui a été choisi par les traducteurs chargés des sous-titres du film sert en français à désigner un employé de la fonction publique, ce qui n’est pas du tout le cas des personnages qu’il désigne dans le film. L’entreprise est bien privée, c’est d’ailleurs le nœud du problème : une histoire de malversation entre une entreprise publique et une privée.
C’est en fait, si on regarde ce qu’en définie le film, un homme de bureau au service d’une entreprise allant du secrétaire au comptable en passant par le chef de département. C’est ce qu’en japonais on désigne du mot anglais salary man, mais dont la traduction salarié pose encore une fois problème. En français on utilise le mot « col blanc » pour désigner les employés de bureau en opposition aux « cols bleus », les ouvriers, mais même si ce mot semble le plus approprié, il est très peu utilisé et sonnera étrangement aux oreilles des français. Néanmoins nous devront bien les nommer dans le cadre de ce dossier et pour cela nous utiliserons les mots « salarié », « col blanc », et « fonctionnaire » puisque c’est la traduction qui est donné par les traducteurs du film, et que nous citerons fidèlement les dialogues.
Une autre définition, plus temporelle cette fois ci dois être précisée. En effet, le film est tourné en 1960, et la société japonaise n’étant pas un cadre fixe, depuis beaucoup d’éléments ont évolués. De 1955 à 1965, c’est l’âge d’or au Japon, l’économie est prospère, la politique désorganisée et se repose sur les Etats Unis. Ainsi nous étudierons plutôt dans ce dossier, la société japonaise depuis la perspective du film et donc l’état culturel et économique de 1960.
2) « Le groupe » au Japon.
Nishi et Itakura, les deux personnages principaux qui cherchent à se venger, sont des hommes d’environs 30 ans qui avaient été recrutés pendant la deuxième guerre mondiale. Leur génération correspond à celle de l’industrialisation au Japon, dont ils représentent la jeunesse. Nishi donnera plusieurs fois des indices aux policiers alors que ces derniers avaient la réponse sous les yeux. Entre Nishi qui appartient à l’entreprise et Itakura qui y est extérieur ils possèdent un regard omniscient sur les rouages de la société. C’est leurs actions qui sont porteuses de justice et se sont les seuls véritablement informé sur ce qui a lieu dans l’entreprise en dehors des individus directement concernés. Ainsi cette phrase qui oppose les cols blancs aux humains désigne une tendance de l’entreprise japonaise à assujettir ses employés qui surprend le spectateur et qui nécessite d’être approfondi.
Tout d’abord, le groupe est une institution sociale au japon dont il nous faut décrire les différents aspects. Dans toute société les individus sont divisés en groupes ou en strates. Par exemple la classification sociale, ou encore les groupes raciaux aux Etats Unis ont une grande importance dans les comportements. Chacun de ses groupes est repéré à partir de leur structure et leur fonction, celles-ci pouvant se chevaucher ou tout juste se rejoindre sur certains points. La fonction qu’un individu occupe dans l’entreprise peut être celle de comptable ou bien de chef de service. C’est en quelque sorte sa position dans l’entreprise, obtenue par le mérite et non le hasard. Par contre la structure, que l’on peut rejoindre au mot BA (場) en japonais, représente un lieu ou une institution dans lesquels les membres ont des relations privilégiés entre eux. On peut aussi le traduire par un « champ » en physique, c'est-à-dire une zone dans laquelle une force rassemble des composants différents. Si on reprend l’exemple de l’employé d’une entreprise, pour lui l’aspect structurel du groupe ce sera d’appartenir à l’entreprise Sony.
Ces deux catégories servent donc à situer l’individu dans le groupe qui lui-même appartient à la société globale. Un Français, lorsqu’il se présentera à quelqu’un commencera par dire « je m’appelle M.X, je suis ingénieur en qualité » mais un japonais dira « Je suis M.X, j’appartiens à l’entreprise Sony. ». Les japonais ont plutôt tendance à se présenter en ce situant dans une structure précise, ici l’entreprise Sony.
Par ailleurs le rôle joué par l’individu au sein de cette entreprise n’est que secondaire, ce qui permet une certaine malléabilité de la division du travail comme nous le verrons plus tard. On comprend donc l’importance que prend l’institution qu’est l’entreprise dans la vie de l’individu puisqu’il se désigne à travers elle. L’entreprise est une composante importante de son identité et sans elle, il ne saurait plus comment se présenter et ne serait plus que « M.X », sans aucune affiliation à partager. Ainsi l’entreprise détermine l’existence sociale de l’individu en l’incluant dans un groupe et il en naît une relation dans laquelle l’individu a un grand investissement affectif. Ceci est aussi visible à travers l’expression japonaise uchi-no qui désigne l’entreprise, uchi signifiant maison ou intérieur. Des expressions comme « la grande famille du chemin de fer » utilisé pout désigner la société nationale des chemins de fer montre aussi à quel point l’entreprise est construite sur le modèle de la famille. En effet, c’est une grande famille où les membres représentent le groupe domestique et le patron le chef de famille. Dans le documentaire «昭 和30年代の日本家族の生活 » nous voyons que, à midi les employés montent sur le toit pour se divertir lors d’activités comme une chorale, un match de badminton ou pour discuter au soleil, mais tout cela « sur » l’entreprise. De même les entreprises fournissent des services comme un logement ou une voiture ou encore des soins. Il n’est pas rare non plus de voir (comme c’est le cas pour Nishi dans le film) des mariages au sein d’une même entreprise. Cet ensemble de facteurs tend à lier l’individu à l’entreprise par un lien réciproque de besoin qui réduit son autonomie et le rend dépendant.
La place sentimentale de l’entreprise pour le salarié se retrouve aussi très nettement dans la manière dont il envisage les autres entreprises. Puisque le « nous » est privilégié que devient le « eux » ? Et bien afin renforcé le « nous » et de permettre à l’entreprise de devenir une structure stable et affirmé, il naît une rivalité envers les groupes semblables. Cette rivalité fera aussi partie de l’identité du salarié et une défaite de l’entreprise par rapport au rival revient à un échec personnel. Dans le film le délit de malversation avait pour but d’éliminer la concurrence. Cela montre bien que les employés sont près à tout pour protéger et favoriser le « nous » par rapport au « eux ».
D’autre part, les entreprises japonaises fournissant souvent à leurs employés des logements dans un immeuble commun, les familles sont ainsi réunis et une vie collective s’organise à tel point que l’entreprise devient un groupe social distinct comprenant les employés et leurs familles. Le sentiment d’appartenance est tellement fort qu’il ne peut avoir aucune autre vie sociale. C’est dans ce cadre là que l’individu doit résoudre tous ses problèmes. Ce dernier point peut être illustré par la volonté de Nishi à se venger en passant par l’entreprise. Il aurait très bien pu avoir sa vengeance autrement qu’en infiltrant l’entreprise de son ennemi, ce qui a d’ailleurs du lui prendre beaucoup de temps. Néanmoins, si on considère que pour un salarié japonais l’entreprise prend une telle place qu’il lui devient inimaginable de mêler des étrangers à leurs problèmes d’une part, et que d’autre part, pour Nishi l’ennemi ne s’apparente pas à l’organisation du système qui a mené son père au suicide mais plutôt à l’entreprise Dairyu et ses dirigeants, on comprend que le seul moyen qui lui soit venu à l’esprit ait été d’infiltrer l’entreprise
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