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Le Sens Du Travail

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e la culture Occidentale.

---------------1) A la Grèce antique tout d’abord. Les grecs n’ont jamais valorisé le travail au sens du travail manuel. Pour un homme libre dans la Grèce antique, le travail est une activité servile qui ne constitue pas un idéal, ou un attribut de l’homme libre. C’est pourquoi il est plutôt perçu comme une déchéance qui relève du statut de l’esclave. Ce sont les esclaves qui travaillent et non les hommes libres. L’idéal de la vie humaine que se donnait les grecs ne faisait pas du travail le but de la vie, ils voyaient plutôt le but de la vie humaine, son achèvement dans la contemplation plutôt que dans l'action pragmatique. La vie idéale, c’est un corps sain et un esprit sage qui se consacre à la Culture, donc aux œuvres de l'esprit. Que l’on puisse voir dans le travail le but de la vie, voilà qui paraît servile et étranger à la mentalité grecque. (texte) Hannah Arendt rectifie ainsi un préjugé que nous avons tendance à projeter sur la conception grecque du travail : « croire que le travail était méprisé parce qu’il était réservé aux esclaves », c’est complètement se méprendre : « les anciens faisaient le raisonnement inverse : ils jugeait qu’il fallait avoir des esclaves à cause de la nature servile de toutes les occupations qui pourvoyaient aux besoins de la vie ». (texte) Ne viser que la satisfaction des besoins est une motivation quasi- animale, ce n’est là que la nécessité à laquelle est soumise tout homme, mais ce n’est pas une motivation digne de l’homme libre. Le Destin soumet les hommes à la nécessité du travail, la seule manière de secouer le joug de cette nécessité, c’est de s’en libérer en confiant le travail à un instrument qui l’exécutera. L'homme qui était vaincu dans une guerre, subissait ce coup du sort qui le métamorphosait en un être proche de l’animal domestique. Il avait perdu sa liberté et devenait esclave. Mais d’un autre côté, personne n’est à l’abri du Destin. Le revirement du sort pouvait tout aussi bien renverser la nécessité. Sous le coup d’un changement politique, ou des conditions de vie sociale, l’esclave pouvait aussi retrouver la condition d’homme libre, en étant affranchi. Il était aussi possible que certaines activités changent de statut, retrouvent une noblesse qui leur enlevait leur caractère servile. L’esclavage pour les grecs n’avait pas d’abord une justification économique, pour se procurer de la main d’œuvre à bon marché, comme cela a été le cas aux États-Unis avec la traite des noirs dans les plantations de coton. Il participait essentiellement d’une conception de la vie cherchant à « éliminer des conditions de la vie le travail ». L’homme libre ne pouvait pas considérer comme humaine cette soumission à la nécessité qui au fond ravalait l’homme au rang d’animal domestique.

Aussi, le fait que nous disposions aujourd’hui de machines capables de faire le travail subalterne à notre place, ne modifie en rien cette conception. Il est assez curieux de noter qu'Aristote dit que si les navettes circulaient toutes seules (cf. le métier à tisser), les maîtres n'auraient pas besoin d'esclaves. Nous avons de telles machines. C’est aux machines de se charger de la servitude du travail, afin que l’homme libre jouisse dans le loisir de sa liberté retrouvée et puisse se consacrer à la contemplation, à la connaissance, aux œuvres les plus élevées de l’esprit, aux activités de l’art et à la culture physique. L’idéal grec défendait une certaine aristocratie de l’esprit contre les valeurs serviles du travail plébéien.

2) Mais ce n’est pas en fait l’influence qui a le plus marqué notre conception du travail. La tradition judéo-chrétienne leste le travail de présupposés beaucoup plus lourds. La Bible dit que le travail est la conséquence d’un châtiment, la conséquence du péché d’Adam et Ève chassés du paradis. En raison du péché originel, Adam se voit « condamné à gagner son pain à la sueur de son front ». Plus loin, quand Caïn tue son frère Abel, il est dit qu’en plus, non seulement il devra travailler la terre, mais en plus, son travail restera stérile. Cela laisse supposer que dans un état paradisiaque, l’homme pouvait se donner du loisir, mais aussi que la vraie vie, est ailleurs et au-delà, sans ce fardeau qu’est le travail. La chute de l’homme, c’est sa déchéance, et la déchéance l’entraîne à être jeté hors du paradis, maudits pour avoir goûté le fruit défendu et sa punition est consommée dans le travail et la souffrance, puisqu’en plus, la femme, elle, se doit « d’enfanter dans la douleur ».

Ce relent de malédiction jeté sur le travail pèse lourd dans le destin de l’Occident, car il nous autorise à voir dans le travail une sanction. En un sens, au Moyen Age, entre le bagnard qui casse des cailloux sur les routes et le serf qui toute sa vie travaille pour un Seigneur, il n’y a théologiquement guère de différence ! L’un et l’autre sont des "réprouvés de Dieu". Le bagnard est en plus un réprouvé de la société. Il est facile de relever dans toute la littérature chrétienne ce dolorisme attaché au travail. Bien que la religion ait beaucoup perdu de son empire, dans la conscience populaire demeure un certain fatalisme, une résignation sourde à l’égard du travail, « que voulez-vous, mes hommes doivent bien travailler, c’est comme çà ! ». L’ombre de l’ancienne malédiction flotte toujours sur le travail. Un arrière-fond de pensée mythique gît dans l’inconscient collectif. En Occident, le travail a été marqué par l’idée religieuse de la culpabilité de l’homme. Cet arrière-fond mythique a été plus décisif dans la conception du travail en Occident que l’héritage grec.

3) Cependant, le christianisme a été capable, tout en continuant de porter la malédiction attachée au travail, de la surmonter. C’est l’éthique protestante qui a su remarquablement montrer que le travail est le moyen de racheter l’existence misérable de homme, pour en faire un moyen de salut. Il a suffit pour cela de faire du travail un acte sacré, de donner à entendre aux hommes, que le travail sauve l’homme de la perdition, qu’il redonne sous le regard de Dieu une valeur à l’humain. Honte donc à l’oisiveté mère de tous les vices ! Le travail fait plaisir à Dieu parce qu’il glorifie sa Création. Le loisir, même sous la forme de la contemplation, est directement répréhensible. Le Protestantisme a réussi ce tour de force consistant à présenter le travail comme l’équivalent de la prière. C’est pour cette raison que Max Weber dans L'Ethique protestante et l'esprit du Capitalisme situe l’origine du capitalisme et sa conception du travail dans la morale protestante. (texte) Luther a réussit à imposer cette idée extraordinaire selon laquelle, la contemplation plaît moins à Dieu que le travail dans l’accomplissement d’un métier. Le métier, c’est la volonté de Dieu dans sa providence particulière. La Providence crée la vocation du travail pour chaque homme. Le travail, c’est la seule voie ouverte pour l’homme, par laquelle il peut trouver le salut. Le protestantisme a toujours regardé avec suspicion les ordres religieux reclus et la mystique contemplative, il a favorisé une « mystique du travail ». Aussi, « la contemplation inactive, en elle-même dénuée de valeur, est-elle directement répréhensible lorsqu’elle survient aux dépens de la besogne quotidienne. Car elle plaît moins à Dieu que l’accomplissement de sa volonté dans un métier. Le dimanche n’est il pas là d’ailleurs pour la contemplation ?». L’Occident a trouvé là une caution religieuse du travail, une sacralisation de la mentalité besogneuse qui était le revers de sa caution négative comme malédiction. Que réclame l’homme besogneux ? Qu’on lui dise qu’il accomplit le but même de la vie ! Il admet que le sens de la vie réside dans le travail et puisque c’est surtout la religion qui a pourvu de sens la vie humaine, c’est à la religion elle-même de tenir ces propos. Le travail « constitue surtout le but même de la vie, tel que Dieu l’a fixé. Le verset de Saint Paul : « si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus » vaut pour chacun, et sans restriction. La répugnance au travail est le symptôme d’une absence de la grâce ». En d’autre terme, l’homme est sur Terre pour travailler, non pas pour se donner du loisir et se divertir. Celui qui découvre la tâche dans laquelle il peut réaliser l’œuvre la meilleure, découvre par là le sens de la vie qui lui est propre. La Providence a prévu pour chacun un métier auquel il doit se consacrer, non pas au non d’un destin fatal qui imposerait résignation, mais à titre de « commandement de Dieu » qui enjoint à l’homme de travailler à la gloire divine.

Suffit-il d’être riche pour se dégager d’une telle obligation ? Non, le riche, comme le pauvre, se doit de travailler. « Le possédant lui non plus ne doit pas manger sans travailler, car même s’il ne lui est pas nécessaire de travailler pour couvrir ses besoins, le commandement divin n’en subsiste pas moins, et il doit lui obéir au même titre que le pauvre ». C’est là un commandement moral, mais qui participe d’une éthique religieuse ; tant que la religion conserve son autorité, elle impose ses prescriptions. La motivation de la richesse comme but avoué du travail reçoit alors une justification importante. Le christianisme, dans ses textes fondateurs, avait jeté un discrédit violent sur l’argent. Souvenons-nous

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