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Littoralisation

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ésidentielles sur la côte basque, et davantage agricoles sur la côte charentaise.

* UR ADBX – IRSTEA, Bordeaux ** GREThA-UMR 5113-Université de Bordeaux Les auteurs remercient les deux rapporteurs anonymes pour la qualité de leurs suggestions et de leurs commentaires sur les précédentes versions de l’article ; la Safer Aquitaine-Atlantique pour la mise à disposition à titre gracieux des données pour le Pays basque. Ces travaux s’inscrivent dans les recherches menées au sein des projets ANR Jeune Chercheur « DyFU », PSDR 3 « ACTeR », et Liteau 3 « Respireau ».

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 444–445, 2011

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a Loi littoral a obtenu un satisfecit lors de son bilan de 2006 (Diact, 2007) : elle aurait ainsi « permis d’amortir l’ampleur du recul des espaces naturels, sans pour autant empêcher nos régions littorales de connaître un développement économique » (1). Parce qu’elle a « posé des principes précurseurs qui gardent aujourd’hui toute leur actualité » (2), « l’heure n’est pas au lancement d’un chantier législatif mais à un approfondissement des principes de la loi ». Ce bilan positif est cependant loin d’être unanime : selon un rapport récent du CGPC (3), « la pression démographique continue que connaissent ces territoires [littoraux] depuis 30 ans du fait de leur attractivité, n’a pas généré la mise en œuvre de politiques globales à l’échelle des difficultés rencontrées (…). » (Fareniaux et Verhlac, 2008). Laissée aux collectivités locales, la régulation de l’espace littoral apparaît « éclatée, pas unifiée », et « la carence des politiques foncières rend pour l’instant difficilement maîtrisables les évolutions en cours. » (Datar, 2004). Si l’intensité des conflits d’usage liés à la littoralisation est régulièrement soulignée, les mécanismes par lesquels s’exerce la pression urbaine méritent d’être approfondis. L’invocation des politiques foncières et de leurs carences dans la maîtrise de l’urbanisation littorale, récemment matérialisée par la multiplication d’établissements publics fonciers locaux dans ces espaces, doit contribuer à orienter la réflexion vers une meilleure connaissance du fonctionnement des marchés fonciers littoraux. Ainsi, la question de l’influence du littoral sur les prix fonciers prend de plus en plus d’importance à mesure que s’en précisent les enjeux. Partant du constat d’une littérature lacunaire sur la relation entre la distance au littoral et les prix du sol, cet article explore la structuration spatiale des marchés fonciers résidentiels et agricoles en zone littorale. Il compare deux sites aux caractéristiques d’urbanisation côtière différenciées : un espace littoral déjà fortement artificialisé, voire saturé, la côte basque, et un espace encore agricole, mais en voie d’artificialisation rapide, le littoral charentais. Une revue des fondements théoriques de la formation de la valeur foncière sur ces marchés est en premier lieu proposée, ainsi qu’une justification des sites d’étude choisis. Par la suite, la méthode d’investigation de la structuration spatiale des marchés fonciers littoraux retenue, qui combine des techniques non paramétriques et de l’économétrie spatiale, est exposée. Finalement, les principaux résultats obtenus au regard des enjeux théoriques identifiés sont discutés.

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Littoralisation et pression foncière : conflits d’usage et aménités sur les espaces côtiers

Le littoral est soumis à une pression considérable du fait de son attractivité. Le phénomène de littoralisation se caractérise par un puissant mouvement de migration vers les territoires littoraux : des taux de croissance démographique plus élevés que sur le reste du territoire ; une construction de logements d’autant plus dynamique qu’elle est alimentée par le développement des résidences secondaires ; une forte artificialisation des sols alimentée par le modèle du logement individuel, le tout créant, à l’instar des zones périurbaines des grandes villes, un « modèle de développement extrêmement consommateur d’espace » (Datar, 2004). Or, par opposition aux territoires périurbains, le milieu littoral présente la caractéristique d’être restreint. La limitation de l’offre foncière littorale est d’abord naturelle, liée à sa forme spécifique : il s’agit d’une « bande » littorale, où l’espace est rare. Mais la limitation de l’offre foncière trouve aussi sa source dans la réglementation des usages du sol et les dispositifs de protection des espaces fragiles tels que le Conservatoire du littoral ou la Loi littoral. Au niveau local, les documents de planification du type schéma de cohérence territoriale (SCoT) ou plan local d’urbanisme (PLU) accordent une place de plus en plus importante à la protection d’espaces naturels littoraux très convoités. Ces zonages produisent un accroissement des prix fonciers par deux canaux distincts (Lecat, 2006) : un effet rareté qui restreint ainsi l’offre foncière ; un effet aménité ensuite, puisque le maintien à l’état naturel de certains espaces produit des aménités localisées qui sont intégrées dans le prix (Irwin et Bockstael, 2004 ; Geoghegan, 2002). 1 2 3 La limitation de l’offre foncière littorale, combinée à une demande très dynamique, produit des distorsions tant sur le marché immobilier que sur le marché foncier. Sur le marché immobilier, l’accroissement des prix a créé des distorsions sur le marché du logement : certains segments, comme le logement social, le locatif intermédiaire, ou encore la primo-accession y sont notoirement sous-représentés (Cete, 2007).

1. Discours du Premier Ministre F. Fillon à l’occasion du Conseil National du Littoral, 31.I.2008, en ligne. 2. Communiqué de presse de J.-L. Borloo, Ministre d’État, ministre de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement Durables, et de N. Kosciusko-Morizet, Secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie, 11.10.2007, en ligne. 3. CGPC : Conseil général des ponts et chaussées.

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Sur le marché foncier, l’accroissement des prix induit une forte pression à la conversion résidentielle des terrains agricoles, en vertu du principe de comparaison des rendements futurs entre les usages du sol (Segerson et al., 2006). Ainsi, les prix des terres agricoles atteignent souvent une valeur sans lien direct avec les résultats économiques de l’agriculture. La conséquence est un recul de l’activité agricole, mesuré par une diminution des SAU (Cete, 2007). Les aménités littorales sont variées et localisées, et la valeur attribuée à ces aménités par les individus va conduire à leur capitalisation dans les prix du foncier. Cependant, ces aménités ne seront pas capitalisées de la même manière suivant l’usage final qui sera fait du sol. Il faut pour cela revenir sur les logiques de formation des valeurs foncières. Le mécanisme de formation des prix fonciers repose sur le calcul économique des rendements du sol, et dépend donc de l’usage final qui en est fait. Le prix d’une terre agricole est ainsi égal à la valeur actualisée des rendements futurs liés à cette activité, eux-mêmes déterminés sur les marchés internationaux des denrées. Dans l’éventualité d’une conversion d’un usage agricole à un usage urbain, le prix foncier est égal à la somme actualisée des rendements agricoles jusqu’à la date de conversion, et des rendements urbains (nets des coûts) à partir de la date de conversion (Capozza et Helsley, 1989) : le prix du sol intègre donc une composante « urbaine », qui sert de courroie de transmission entre le marché foncier et le marché immobilier. Il s’avère donc indispensable de différencier le segment du foncier agricole d’une part, et le segment du foncier à bâtir de l’autre, car le mécanisme de formation de la valeur y est fondamentalement différent. En théorie, le segment du foncier agricole peut être considéré comme un marché foncier « pur », où le sol s’échange uniquement en tant que bien de production ; le segment du foncier à bâtir apparaît plus comme un marché hybride, où s’échangent non seulement le sol, mais aussi les droits qui lui sont rattachés, en l’espèce un droit à bâtir. Sur le segment du foncier à bâtir, la composante urbaine intégrée dans le prix du sol révèle la porosité entre les marchés immobilier et foncier. La logique de transmission de la valeur s’opère de l’immobilier vers le foncier à travers le mécanisme du compte à rebours : l’opérateur définit un prix de vente du bien immobilier (« prix de sortie »), lui soustrait ses coûts (de construction,

financiers, etc.) ainsi que sa marge, et définit une charge foncière acceptable, c’est-à-dire un prix du sol maximal qui assure une rentabilité à l’opération. Par construction, le compte à rebours est à l’origine d’un « effet de levier » : les variations des prix immobiliers sont amplifiées sur le marché foncier (Granelle, 1998). La composante urbaine dans le prix foncier est égale à la valeur actualisée de l’augmentation de prix anticipée qui découle de la conversion du terrain en usage urbain (Cavailhès et Wavresky, 2003). C’est une « prime de croissance », qui est d’autant plus élevée que la pression urbaine est forte, et qui peut être extrêmement élevée. Plantinga et al. (2002) estiment qu’aux

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