Le contrôle de légalité - Droit administratif
Dissertation : Le contrôle de légalité - Droit administratif. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Annesoso • 26 Octobre 2015 • Dissertation • 2 607 Mots (11 Pages) • 5 748 Vues
DISSERTATION « LE CoNTROLE DE LÉGALITÉ » |
Selon Prosper Weil, « l'existence même d'un droit administratif relève en quelque sorte du miracle » puisque l'administration a elle même créé les règles auxquelles elle se soumet. Cette auto-limitation s’opère en aval par le biais de la responsabilité, une fois que l’administration a agi et dans l’hypothèse où son action a causé un préjudice et ce depuis l'arrêt Blanco du 8 février 1873 rendu par le Tribunal des conflits. Elle s’opère surtout en amont de l’action de l’administration par le respect de la légalité. En effet la puissance publique se soumet à la légalité c’est à dire qu’elle est assujettie à la « loi » dans un sens large. C’est un principe en ce que la légalité s’applique à l’administration toute entière et à toutes ses décisions, tous les actes y compris les contrats et les opérations matérielles et ce même si aucune sanction n’est prévue. Le principe de légalité se définit donc comme la soumission de la puissance publique au respect des règles de droit.
Le principe de légalité a vocation à s'imposer dès que l'administration agit, Prosper Weil ajoutant d'ailleurs que « né d'un miracle, le droit administratif ne subsiste au surplus que par un prodigue chaque jour renouvelé ». Si le phénomène est chaque jour renouvelé c'est que chaque jour l'administration se soumet mais que chaque jour elle risque de rompre avec la légalité. Le cas échéant, le juge administratif intervient à travers le contrôle de la légalité pour remettre l'administration dans le droit chemin.
Cette soumission de la puissance publique est un choix de l’administration au lendemain de la Révolution alors que les juridictions judiciaires se voyaient interdire de connaître du contentieux administratif. Cette circonstance aurait pu mener l’administration à se soustraire de tout respect du droit opposant d'une part une administration toute puissante et d'autre part un individu sans protection. Au contraire, un corps d’organes s’est juridictionnalisé soumettant l’accomplissement de l’action administrative aux règles de droit en vigueur. Ainsi, les règles que l’administration doit respecter constituent un corps spécifique ayant pour objectif principal de trouver cet équilibre entre ces deux satisfactions contradictoires : la satisfaction prioritaire de l’intérêt général qui suppose des moyens exorbitants de l’administration et la satisfaction de la protection de l’individu contre la surpuissance de l’administration. Selon Maurice Hauriou, l'individu est soumis au principe du préalable c'est-à-dire qu'il ne peut pas se soustraire au respect des décisions de l'administration. Le principe de légalité est donc un contrepoids nécessaire : certes l'individu doit respecter les décisions de l'administration mais l'administration doit respecter des règles de droit, les décisions ne sont pas supposées être opportunes ou arbitraires.
Tout l'intérêt résulte dans cet équilibre entre l'intérêt général à travers la possibilité d'imposer sa volonté unilatéralement et les intérêts particuliers à travers notamment la sécurité juridique. L'équilibre est un état de stabilité, une répartition égale, il a la particularité de ne jamais renvoyer à un résultat parfait, l'objectif est que le résultat soit aussi satisfaisant pour l'une que pour l'autre des parties. L'administration a provoqué elle même sa soumission de sorte que se pose la question de savoir si elle n'a pas créé un faux équilibre qui pencherait finalement en sa faveur.
Le principe de légalité permet-il une protection suffisante des individus ?
Cela n'allait pas de soit mais le principe de légalité permet bien une protection suffisante des individus, suffisante parce qu'il protège effectivement l'individu des excès de l'administration (II) sans être excessif au regard de l'intérêt général (II).
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- Une protection effective des individus
Le principe de légalité permet effectivement de protéger les individus des excès de l’administration parce que cette dernière est soumise à un large corps de règles (A) et que le contrôle auquel le juge soumet l’administration est efficace (B).
A. La soumission de l'administration à un arsenal de règles de droit
Le principe de légalité soumet l'administration à la légalité. La légalité ne se réduit pas aux seules règles de valeur législative. En effet, il faut comprendre la loi dans un sens large et l'entendre comme toutes les sources formelle de l'administration constituant un bloc de légalité. Ce corps de règle est important, il comprend le bloc de constitutionnalité, les traités, les lois évidemment, mais aussi la jurisprudence et les actes réglementaires. Les actes réglementaires sont eux mêmes soumis aux autres sources mais font partie du bloc de légalité en ce que le Tribunal des conflits a considéré dans l'arrêt Septfonds du 16 juin 1923 qu'ils posaient une norme générale comme la loi. Ils sont de plus hiérarchisés selon l'auteur de l'acte en cause et tout acte réglementaire se soumet aux actes réglementaires ayant une valeur hiérarchiquement supérieure. Sont soumis à toutes ces normes, y compris aux actes réglementaires, les contrats conclus par l'administration et les actes administratifs individuels. L'administration ne décide donc pas en opportunité, elle illustre des règles préétablies qui sont présumées légales et non arbitraires.
L'administration lorsqu'elle édicte une nouvelle décision, qui aura force exécutoire sur l'individu, doit se soumettre au bloc de légalité. Dans la majorité des cas la norme contrôlée doit entrer dans le champ de la norme de référence selon un rapport stricte de conformité garantissant une soumission efficace. Le rapport de conformité permet à l'administration de concrétiser la norme supérieure, il y a un rapport dynamique selon lequel plus on descend dans la hiérarchie plus la norme concrétise la norme de référence. Pour autant, même si conformité n'est pas identité, ce rapport est satisfaisant. Ce rapport est un cadre stricte de l'action de l'administration et garantie que même s'« il est dans la nature des choses que ceux qui exercent le pouvoir croient être investis du pouvoir de décider discrétionnairement du contenu et des exigences de l'intérêt général » (Prosper Weil), ils ne le puissent pas. Le rapport de conformité peut parfois céder la place à un rapport de compatibilité. Ce rapport de compatibilité laisse une plus large marge de manœuvre à l'administration. L'administration doit seulement prendre un acte qui n'est pas contraire à la norme de référence. Cependant, la situation reste satisfaisante puisque l'administration n'est soumise à ce rapport que par dérogation, dans les rares hypothèses du droit de l'urbanisme (Conseil d'Etat, 26 mars 2001, SARL Le Blanc Coulon) et des rapports entre loi interne et loi internationale (Conseil d'Etat, 26 novembre 2010, association de défense des droits des militaires). En dehors de ces hypothèses, la puissance publique doit rester dans un rapport de conformité. Si l'illégalité de l'acte est allégué c'est que l'administration est probablement sortie de ce rapport, ce que le juge pourra contrôler.
B. Un contrôle efficace des actes de l'administration
A l'initiative de l'individu qui allègue une illégalité, le juge administratif opère un contrôle sur les actes de l'administration veillant à faire respecter le principe de légalité. Le recours peut être de plein contentieux ou devant le juge de l'excès de pouvoir qui range les vices dans deux catégories : la légalité externe et la légalité interne. Au titre de la légalité externe, le juge peut sanctionner l'illégalité au regard d'un vice de forme, d'un vice de procédure ou d'un vice d'incompétence. Ce dernier témoigne particulièrement de l'efficacité du contrôle puisqu'il est un moyen d'ordre public qui est donc systématiquement sanctionné. La légalité interne quant a elle permet au juge de contrôler les motifs c'est-à-dire l'erreur de fait (Conseil d'Etat, 14 janvier 1916, Camino) et l'appréciation juridique des faits qui se divise elle même entre le contrôle de la qualification juridique des faits (Conseil d'Etat, 4 avril 1914, Gomel) et le contrôle de l'adaptation de la mesure aux faits, et enfin l'erreur de droit. Pour compléter ce panel, et toujours au nom de la légalité interne, le juge administratif peut aussi contrôler le but de la mesure à travers la notion de détournement de pouvoir (Conseil d'Etat, 26 novembre 1875, Pariset). Le juge n'entre pas dans un contrôle d'opportunité mais, même si le Conseil d'Etat ne le considère pas ainsi, ce contrôle du but de l'action administrative peut sembler assez subjectif et pourrait permettre un respect de la légalité appliqué strictement à la situation de l'individu ce qui pourrait lui être d'autant plus favorable.
A l'exception de la qualification juridique des faits, tous les moyens sont toujours susceptibles d'être contrôlés étant précisé qu'il est interdit pour le juge administratif de statuer ultra-petita mais aussi infra-petita. En plus des moyens d'ordre public, le juge doit répondre à tous les moyens invoqués par l'individu qui entend faire contrôler l'action de l'administration : le juge contrôle tous les aspects de la légalité tant que le requérant le demande. L'individu est à l'origine du contrôle et ce contrôle est opéré par une institution indépendante selon le principe de la séparation des pouvoirs ce qui garantie une protection juste. Le contrôle normal, de droit commun, contrôle le plus répandu, exige la sanction de tous les vices de manière uniforme garantissant un contrôle performant. Il existe bien deux autres contrôles moins puissants mais mêmes ceux-ci restent satisfaisants. En effet, dans le contrôle minimum, tous les vices sont contrôlés à l'exception de l'appréciation de la qualification juridique des faits et, dans le contrôle restreint, l'erreur sur la qualification juridique des faits n'est sanctionnée que si elle est manifeste. Ces deux contrôles sont donc largement convenables et ce n'est qu'à titre d'exception qu'ils se substituent au contrôle normal. La variation de l'intensité du contrôle permet une protection satisfaisante de l'individu à travers une protection effective mais aussi équilibrée.
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