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Commentaire de l'arret du 7 mars 2006 premiere chambre civile

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Répondant à la question qui se pose face à elle, la Haute juridiction rend un arrêt de rejet en affirmant le principe selon lequel le prêt qui n'est pas consenti par un établissement de crédit est un contrat réel qui suppose la remise d'une chose. Par conséquent, elle approuve sur ce point la décision de la Cour d'Appel puisqu'il incombe bien au demandeur à l'instance, le créancier présumé, de rapporter la preuve du versement de la somme litigieuse. De plus, la Cour de Cassation a refusé de qualifier les chèques émis par le demandeur de moyen de preuve ou même de commencement de preuve. Cependant, elle a exprimée son désaccord avec la motivation des juges du fond concernant l'éventuelle preuve qu'apportaient ces chèques par la formule « abstraction faite du motif erroné »

La démarche de la cour a été des plus méthodique ; elle s'est d'abord penchée sur la nature et la forme du contrat de prêt au regard de la qualité des parties (I) avant d'en déduire les conséquences découlant d'une telle qualification, notamment au regard du droit de la preuve (II).

le prêt d'argent entre particuliers : un contrat réel formaliste

Le prêt d'argent devient un contrat réel dès lors qu'il est conclu entre des particuliers (A), sa validité est alors soumis à la condition de la remise de la chose (B).

A) La nature des prêts consentis par des particuliers

la réaffirmation d'un principe par la Haute juridiction

L'existence des contrats réels en droit français à longtemps été discutée (F Combescure « Existe t'il des contrats réels en droit français? » Rev. Crit légale et jurisprudentielle 1903 p 477) et plus récemment M. N Jobard Bachelier « Existe t'il encore des contrats réels en droit français? Ou la valeur des promesses de contrat réel en droit positif » RTD civ 1985 p 1 et s. Cette catégorie de contrat était jugée anachronique et dépassée puisqu'il s'agit d'un vestige de l'époque romaine qui faisait prôner le formalisme. De plus la doctrine estimait que le Code civil qui y faisait référence manquait singulièrement de netteté. Mais l'existence des Contrats n'a jamais cessée d'exister comme le rappelle avec constance la Cour de cassation.

La Cour affirmait en 1981 que « un prêt de consommation, contrat réel, ne se réalise que par la remise de la chose prêtée à l'emprunteur lui même ou à un tiers qui la reçoit (...) pour le compte de l'emprunteur » (Cass. 1ère civ 20 juillet 1981).

Puis la 1ère chambre civile a posée comme règle le 28 mars 2000 que « le prêt consenti par un professionnel du crédit n'est pas un contrat réel »; dans ce cas, le contrat se forme par le simple échange des consentements.

Mais c'est l'arrêt du 7 mars 2006 qui va venir mettre un terme à ces doutes et parachever l'évolution amorcée par la Cour de cassation. Certains auteurs se réjouirons de cette « résurgence du contrat réel » (J Dupichot). Cet arrêt nous permet en effet d'affirmer que le prêt de consommation demeure un contrat réel ; par exception il devient consensuel concernant les prêts consentis par des établissements de crédit.

Ainsi, la Cour affirme dans le cas de l'espèce que « le prêt qui n'est pas consenti par un établissement de crédit est un contrat réel qui suppose la remise d'une chose ». A ce titre il existe dans le contrat réel une forme d'indivisibilité entre le consentement du prêteur et la remise des fonds à l'emprunteur. Le transfert de la propriété résultant de ce prêt se situe toujours au moment de la remise de la chose. En l'absence de l'un de ces deux éléments, le contrat de prêt n'est pas formé. Dans le cas des contrats consensuels, seul le consentement est exigé.

l'importance de la qualité des parties

Stéphane Piedelièvre, dans le commentaire de cet arrêt de la Cour de Cassation du 7 mars 2006 (JCP, la semaine juridique Edition générale, n°27, 5 juillet 2006 ll 10109) dira d'entrée de jeu que « selon que vous êtes un établissement de crédit ou un non professionnel, la Cour de cassation fera du contrat de prêt un contrat réel ou un contrat consensuel ».

Dans le cas de l'espèce, le demandeur pensant avoir formé un contrat consensuel avait invoqué les conditions de formation de celui-ci en énonçant les articles 1132 et 1135 du Code Civil et en affirmant qu'un contrat restait valable même si la cause n'était pas exprimée. Mais le demandeur s'est mépris, une telle qualification consensuelle est impossible entre particuliers pour un prêt de consommation. Ainsi un contrat formé entre particuliers est un contrat unilatéral et réel régi par le code de la consommation. Rappelons à nouveau le de principe énoncé par la Cour qui s'attache tout particulièrement à la qualification des parties pour en déduire le caractère réel du contrat : « Mais attendu que le prêt qui n'est pas consenti par un établissement de crédit est un contrat réel... ».

Le professeur Piedelièvre résume ainsi la situation : « on doit en déduire que le prêt de consommation demeure un contrat réel ; par exception, il devient consensuel pour certains prêts de sommes d'argent : ceux consentis par les établissemnts de crédit, et ceux en quelque sorte détachés du droit commun par le Code de la consommation qui sont de toute façon conclus par des professionnels du crédit ».

Le choix de différencier les contrats en fonction de la qualité des parties s'expliquerait par la volonté de protéger les contractants eux-mêmes. Faire d'un contrat entre particulier un contrat réel amène un certain formalisme qui devrait inciter le prêteur à la réflexion. Mais l'arrêt du 7 mars 2006 illustre t'il réellement une volonté de protéger le prêteur? Il est possible d'en douter comme nous le verrons dans la suite de notre raisonnement ( II/ B). Le professionnel du crédit quant à lui est beaucoup moins protégé par la conclusion d'un contrat consensuel ; le législateur considère que sa compétence découlant de sa qualité est à même d'appuyer son consentement. Ainsi le professionnel agit en connaissance de cause et un formalisme n'est pas nécessaire contrairement au particulier eu égard à l'ignorance découlant de sa qualité.

Ainsi, au regard de la qualité des parties dans l'arrêt du 7 mars 2007 (les deux parties sont des non professionnels), celles ci sont soumises aux règles de forme qu'implique le contrat réel, notamment la condition de la remise de la chose.

B) la condition de la remise de la chose

Une condition de forme indispensable à la formation du contrat de prêt entre particuliers

La cour de cassation énonce comme condition de la formation du contrat de prêt entre particulier qu' « un contrat réel (...) suppose la remise d'une chose ». Le professeur Piedelièvre dira que la remise de la chose prêtée n'est autre qu'un « gage de l'intégrité de son (le prêteur) consentement ». dans le cas de l'espèce, les juges du fond déboutent le demandeur de ses prétentions au motif « qu'il n'établissait pas la cause de l'obligation stipulée ». La Cour de Cassation fait de cette condition d'établissement de la cause de l'obligation (la remise de la chose) une condition essentielle de la formation du contrat de prêt entre particuliers. Autrement dit, tant que les choses ne sont pas remises, le prêt n'est pas formé.

On pourrait ainsi penser qu'il n'est pas possible de concevoir de prêt tant que la chose n'est pas livrée, car l'obligation de la rendre, qui est l'essence de ce contrat, ne peut pas apparaitre avant qu'elle n'ait été reçue (R-J Pothier, op. Cit, n°6 – J. Domat, lois civiles, livre 1, titre 5, section 2, n°3 – L. Guillouard, op. Cit, n°8). Mais pourquoi faudrait-il que l'obligation de restituer ait pris naissance pour que le contrat se forme? On peut concevoir sans difficulté que l'obligation de restituer naisse de l'accord des volontés sous condition suspensive de la remise de la chose. Ainsi, certains comme G- Baudry Lacantitinerie et A. Wahl (op. Cit, n° 597) ou J. Mazeaud (op. Cit, n° 1434) considèrent que la remise de la chose n'est pas une condition de la formation du contrat, mais davantage le premier acte de l'exécution du contrat. De plus, pour ces opposants, cette remise de la chose porterait atteinte au consensualisme et à l'autonomie de la volonté puisqu'elle remettrait en cause la restitution qui se doit d'être réalisée de bonne foi.

Quoi qu'il en soit, nous pouvons dire que la remise de la chose constitue une partie du consentement du contractant. Si la chose n'est pas remise, le contrat n'est pas formé. En l'espèce, la Cour de cassation a constatée l'absence de cause de l'obligation du cocontractant (la remise de la chose), de telle sorte que le contrat de prêt ne peut être formé.

l'article 1892 du Code Civil envisagé comme base légale du rejet formulé par la Cour.

La

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