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Molière, Le Malade imaginaire, Acte 1, Scène 1

Analyse sectorielle : Molière, Le Malade imaginaire, Acte 1, Scène 1. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  30 Décembre 2023  •  Analyse sectorielle  •  2 002 Mots (9 Pages)  •  551 Vues

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Le Malade Imaginaire de Molière (1673)

fin Acte I scène 1

analyse linéaire n°9

« Plus, du vingt-sixième, un clystère carminatif, pour chasser les vents de monsieur, trente sols. » Dix sols, monsieur Fleurant. « Plus, le clystère de monsieur, réitéré le soir, comme dessus, trente sols. » Monsieur Fleurant, dix sols. « Plus, du vingt-septième, une bonne médecine, composée pour hâter d’aller et chasser dehors les mauvaises humeurs de monsieur, trois livres. » Bon, vingt et trente sols ; je suis bien aise que vous soyez raisonnable. « Plus, du vingt-huitième, une prise de petit lait clarifié et dulcoré pour adoucir, lénifier, tempérer et rafraîchir le sang de monsieur, vingt sols. » Bon, dix sols. « Plus, une potion cordiale et préservative, composée avec douze grains de bézoar, sirop de limon et grenades, et autres, suivant l’ordonnance, cinq livres. » Ah ! monsieur Fleurant, tout doux, s’il vous plaît ; si vous en usez comme cela, on ne voudra plus être malade : contentez-vous de quatre francs, vingt et quarante sols. Trois et deux font cinq et cinq font dix, et dix font vingt. Soixante et trois livres quatre sols six deniers. Si bien donc que, de ce mois, j’ai pris une, deux, trois, quatre cinq, six, sept et huit médecines ; et un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze et douze lavements ; et, l’autre mois, il y avoit douze médecines et vingt lavements. Je ne m’étonne pas si je ne me porte pas si bien ce mois-ci que l’autre. Je le dirai à monsieur Purgon, afin qu’il mette ordre à cela.

Allons, qu’on m’ôte tout ceci. Il n’y a personne. J’ai beau dire : on me laisse toujours seul ; il n’y a pas moyen de les arrêter ici. Ils n’entendent point, et ma sonnette ne fait pas assez de bruit. Drelin, drelin, drelin. Point d’affaire. Drelin, drelin, drelin. Ils sont sourds… Toinette. Drelin, drelin, drelin. Tout comme si je ne sonnois point. Chienne ! coquine ! Drelin, drelin, drelin. J’enrage. Drelin, drelin, drelin. Carogne, à tous les diables ! Est-il possible qu’on laisse comme cela un pauvre malade tout seul ? Drelin drelin, drelin. Voilà qui est pitoyable ! Drelin, drelin, drelin ! Ah ! Mon Dieu ! Ils me laisseront ici mourir. Drelin, drelin, drelin.

Molière est un des plus grands dramaturges français, célèbre pour ses comédies de caractères au travers desquelles il s’amuse à critiquer la société et les défauts humains par le biais de personnages excessifs et très caractériels. Il publie Le Malade Imaginaire en 1673. C’est une comédie ballet constituée de trois actes accompagnés chacun d’un intermède chanté et dansé, qui vient s’inscrire dans le mouvement littéraire du Classicisme, mouvement du XVIIe siècle marqué par l’idéal de l’honnête homme. La comédie classique cherche à divertir mais également à dénoncer certains travers de la société, il s’agit de « corriger les mœurs par le rire ». Le Malade Imaginaire met en scène Argan, un vieux père de famille hypocondriaque qui veut à tout prix marier sa fille Angélique avec un médecin. Dans cette scène d’exposition que nous étudions, il est seul sur scène, occupé à faire ses comptes sur le coût de tous ses soins médicaux du mois.

→ La scène 1 de l’Acte I du Malade Imaginaire remplit-elle toutes les fonctions de la scène d’exposition ?

I- Les comptes d’Argan

II- Un personnage autoritaire

→ I- Les comptes d’Argan (paragraphe 1) :

lignes 1 à 11 : les comptes d’apothicaire :

  • la 1ère phrase commence avec des guillemets, on se doute qu’Argan lit quelque chose écrit par un autre : une suite de traitements médicaux et d’ordonnances
  • « Plus du vingt-sixième », « Plus du vingt septième» : premier mot de la phrase : on devine au préalable déjà une longue énumération de traitements médicaux : anaphore des plus + insistance
  • « un clystère carminatif pour chasser les vents » + « chasser dehors les mauvaises humeurs » → insistance sur le bas corporel et les nombreux lavements d’argent + comique de situation car tournure de phrase comiques
  • « trente sols », « trois livres » → prix des ordonnances, même moindres : prix très élevés
  • « Dix sols Monsieur Fleurant » → on apprend le nom de l’apothicaire + Argan dialogue fictif qui négocie
  • « je suis bien aise que vous soyez raisonnable » → Argan compte sur le bon sens de Fleurant pour accepter
  • « du vingt-huitième » : là pour désigner le 28e jour du mois : Argan est probablement soigné quotidiennement
  • « une prise de petit lait clarifié et dulcoré » → un barbarisme qui représente au final un produit laitier sucré : accumulation de termes médicaux étranges pour donner du sérieux à l’ordonnance et au médecin
  • « adoucir, lénifier, tempérer et rafraîchir » → encore une énumération savante de verbes à l’infinitif qui montre les effets attendus du traitements : effets exagérés qui viennent presque décrédibiliser l’ordonnance
  • « vingt sols »  → M.Fleurant annonce pour chaque ordonnance un prix très gonflé
  • « Bon, dix sols » → moment de réflexion et pause dans la lecture de la facture, Argan prend le temps d’évaluer le prix qui lui semble correct, il négocie les prix : on est sur la réflexion personnelle du personnage avec un terme assez familier
  • retour des guillemets,il se replonge dans la lecture de ses ordonnances
  • « Plus » → on retrouve cette énumération de tous les traitements médicaux, « plus » est encore placé en début de phrase : anaphore, pour insister sur les nombreux traitements qui viennent s’additionner
  • « une potion cordiale et préservative [...] et grenades, et autres » → on retrouve là encore une énumération de termes savants, médicaux étranges employés par M.Fleurant pour donner du sérieux à ses ordonnances qui sont en réalité des produits basiques, cette exagération sur les termes employés vient décrédibiliser la médecine, on commence à comprendre l’opinion de Molière sur cette dernière : une satire de la médecine
  • « cinq livres » → des prix importants encore une fois qui suivent directement les traitements
  • « Ah ! »→ interjection, exclamation d’Argan on revient à sa réflexion personnelle : il s’étonne des prix encore
  • « monsieur Fleurant tout doux s’il vous plaît » → il juge donc que les prix sont trop élevés et c’est avec humour (comique de mots) qu’il le fait comprendre : mise en scène d’un dialogue fictif, il s’adresse à lui avec l’apostrophe « monsieur Fleurant »
  • « on ne voudra plus être malade » → paradoxe qui vient illustrer tout le personnage d’Argan, comme si la maladie était un choix, on commence à se douter de l’obsession d’Argan avec la maladie
  • « contentez-vous de quatre francs, vingt et quatre sols » → Argan continue de négocier peut importe l’avis de son apothicaire, l’impératif montre bien que c’est lui qui décide
  • « trois et deux […] sols six derniers » → il continue ses comptes et réductions de prix avec ses calculs : comique de répétition des chiffres qui dure toute la scène

lignes 11 à 19 : accumulation de traitements : obsession pour la maladie

  • « Si bien donc que » → surenchère de mots conclusifs : pléonasme, on a donc le droit à un bilan final de toutes ses ordonnances du mois
  • « j’ai pris […] douze lavements » → comique de répétition, Argan compte un à un ses lavements et ses médecines : insistance sur la quantité avec le compte (chiffre par chiffre) pour faire ressortir le nombre exorbitant de traitements et d’ordonnances avec 8 médecines et 12 lavements
  • « l’autre mois, il y avait 12 médecines et 20 lavements » → des quantités tellement grandes qu’elles en deviennent très dangereuses, on comprend donc bien l’obsession d’Argan avec la médecine et son hypocondrie car il est tout le temps entrain de demander des soins
  • « je ne m’étonne pas si […] ce mois-ci que l’autre » → comique de situation : un malade se plaint de ne pas être assez malade : c’est le manque de soin et de traitements qui ferait qu’il se sent moins bien alors que ces derniers sont là pour soigner des maladies déjà présentes : paradoxe, pour lui les médicaments sont nécessaires pour être en bonne santé
  • « Je le dirai à Monsieur Purgon afin qu’il mette ordre à cela » → Argan va réclamer plus de médecines et de lavements : ironie et renversement de la situation, il veut arranger la situation car pour lui son manque de soin est un manque d’ordre : hypocondrie confirmée (Purgon = purger : comique de mots)

→ Une longue tirade mais un passage très vivant grâce au comique, l’alternance entre Argan et la lecture des ordonnances et le dynamisme du personnage et de la scène.

→ II- Un personnage autoritaire (paragraphe 2) :

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