Lecture analytique Alcools le pont mirabeau
Commentaire de texte : Lecture analytique Alcools le pont mirabeau. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Léa Foucher • 19 Mai 2019 • Commentaire de texte • 1 687 Mots (7 Pages) • 1 912 Vues
Introduction :
Quand Apollinaire fréquentait Marie Laurencin, ils traversaient souvent ensemble ce pont Mirabeau, un pont métallique qui relie le 15ème et le 16ème arrondissement de Paris. Dans ce poème, il se remémore cette époque. Le pont Mirabeau incarne la modernité en ce début de 20ème siècle. Apollinaire revendique cette modernité par le concept poétique de « l’Esprit Nouveau », qu’il présente en 1917, dans une conférence sur la modernité en poésie. Ce poème est inspiré par une histoire d’amour singulière ainsi que par la « Belle époque », une époque de prospérité économique et politique marquée par un renouveau incroyable des arts. Apollinaire mène dans ce poème une réflexion sur le temps et évoque sa douleur, liée à une rupture amoureuse au travers de l’image de l’eau qui coule.
Problématiques :
- Comment Apollinaire renouvelle-t-il dans ce poème, les thèmes traditionnels de la perte amoureuse et du temps qui passe, au travers d’un poème qui se situe entre tradition et modernité ?
- Comment Apollinaire renouvelle-t-il le lyrisme traditionnel au travers de l’image de l’eau qui coule ?
- Que symbolisent le pont et la Seine pour le poète ?
- Qu’est-ce qui fait l’originalité de ce poème ?
- En quoi ce poème est-il moderne ?
- Un poème élégiaque
Une réflexion sur le temps qui passe : l’éternel se mêle au transitoire
- L’image de l’eau qui coule pour exprimer le temps qui passe : tradition
- Forme du poème 🡪 longueur des vers différentes 🡪 ondulations🡪 eau
- Champ lexical de l’eau qui coule : « la Seine », « coule », « eau », « onde »
- Chaque vers s’écoule et mime l’eau
- L’eau joue un rôle essentiel dans ce poème c'est à la fois la Seine qui coule et le temps qui passe, la vie, l'amour.
- Une fluidité dans le rythme : la fuite du temps et de l’amour
- Enjambements (v.8/9 ; v.9/10) --> deuxième quatrain qui incitent à ne pas marquer de pauses
- Champ lexical du passage : « passe », « s’en va » : lié à la fuite de l’amour
- Présence importante de rimes en (-eure) dans les strophes en distique 🡪 Retour inéluctable des heures : thème typiquement élégiaque
- Rimes féminines partout sauf dans le deuxième vers des quatrains 🡪 rimes féminines plus douces et fluides
- Métaphore des amours qui coulent (premier quatrain) (transitoire) // rime interne amours / toujours (v.4) (permanence)
- Le pont symbolise l'immobilité, la stabilité 🡪 éternel, il s'oppose sans cesse au mouvement de l'écoulement de l'eau et à la fuite de l’amour 🡪 transitoire
- Même après la disparition de l’amour ou après la mort, l’eau continue de couler sous le pont (transitoire// éternel)
Une complainte nostalgique sur l’amour disparu
- Le désespoir, la solitude du poète et la peur de la mort
- Vers avec des rimes masculines 🡪 Isolées dans le poème (v.2 ;8 ; 14 ; 20)
- « Je demeure » (refrain) 🡪 permanence du poète qui souffre + meure (idée de la mort qui se rapproche quand le temps passe)
- Le poète reste seul et désespéré face au temps qui passe inéluctablement
- La nostalgie du poète
- « La joie venait toujours après la peine » (v.4) 🡪 imparfait, souvenir du passé 🡪 mélancolie
- Rime entre « souvienne » et « peine » 🡪 souvenir nostalgique
- « Restons » (2ème quatrain) 🡪souhait désespéré de rester dans le souvenir
- La complainte plainte du poète
- Allitération en (ou) et (on)🡪 gémissements, pleurs, langueur du poète
- Allégorie de l’espérance (v.16) 🡪 « comme l’Espérance est violente » 🡪 le poète espère qu’elle revienne et cela ravive sa douleur
- Un poème qui relate une expérience à la fois personnelle et universelle
- Une plainte à la fois personnelle et universelle
- Première personne présente au singulier (je) et au pluriel (nos) et disparaît dans les deux derniers quatrains
- Pronoms assez mystérieux, pas vraiment de destinataires précis (renforce l’universalité)
- Une histoire et des émotions qui deviennent universelles
- Verbe couler
- Présent d’énonciation (la Seine coule sous le pont au moment où l’on parle)
- Présent des vérités générales (action qui reste vraie en tout temps) 🡪 Le pont Mirabeau et la Seine deviennent universels et peuvent s’adapter à l’histoire de chacun
- « la joie », « la peine » : articles génériques : joie et peine universelles
- Nos amours (article possessif pluriel) (premier quatrain) 🡪 l’amour (article défini singulier) + présent des vérités générales (« l’amour s’en va ») 🡪 Du particulier au général, amour personnel devient universel
- Un poème qui se situe entre tradition et modernité :
- Un poème à la fois traditionnel
- Le lyrisme
- Thèmes abordés : amour, mort, temps qui passe : thèmes typiquement lyriques
- Registre lyrique : « je » 🡪 expression des sentiments personnels (typiquement traditionnel)
- Réappropriation d’un héritage culturel :
- « Ni temps ne passé Ni les amours reviennent » (3ème quatrain) 🡪 Comme les romantiques au 19ème siècle, le poète constate son impuissance face au temps que l’on ne peut retenir
- Référence à Verlaine (« sonne l’heure »)
- Moyen Age : balade avec un refrain
- Respect partiel des décasyllabes (métrique traditionnelle)
- Le poète respecte plusieurs normes poétiques ici et montre une influence romantique assez importante.
- … Et moderne
- Par l’image du pont :
- Le pont Mirabeau : pont métallique et donc moderne
- Mirabeau 🡪 mot valise (mirer-beau-eau), image de l’eau comme un miroir, référence aux tableaux impressionnistes et cubistes (modernes pour l’époque)
- Construction en miroir : « les mains dans les mains restons face à face »
- Peut-être le poète seul, qui voit son reflet dans le miroir, mains tendues face à l’eau
- Forte présence du présent : ancrer le texte dans l’époque, dans la modernité :
- Par la forme du poème (on va vers le calligramme)
- Ondulations : eau
- On peut aussi y voir un Pont : intégrer visuellement la forme et le fond (Forme-sens)
- Les bordures du pont : 2 vers aux extrémités
- Milieu du pont : 2 vers centraux
- Par une écriture libre ou la musicalité prend le pas sur les règles et les conventions
- « Vienne la nuit » 🡪 « vienne » et « nuit » 🡪 synérèses 🡪 liberté d’écriture qui donne un effet musical de précipitation qui imite le passage rapide du temps
- Musicalité présente de manière thématique : « sonne l’heure » (Verlaine : « chanson d’automne » : « et blême quand sonne l’heure »)
- La césure du décasyllabe n’est pas respectée partout : Apollinaire montre qu’il connaît les règles classiques mais veut rester libre dans son écriture pour donner une musicalité moins traditionnelle au poème.
- Absence de ponctuation :
- Ambiguïté, phrases équivoques, liberté interprétation
- Fluidité du poème
- Musicalité différente en fonction de notre interprétation
- Le poète décide de réinventer l’écriture traditionnelle pour laisser une plus grande place à la liberté et à la musicalité.
- Le renouvellement du lyrisme et de l’héritage culturel : un poème musical et incantatoire
- Le refrain et les répétitions, une forme-sens fondée sur la circularité et les répétitions
- Une forme régulière :
- 4 strophes en quatrain interrompues par un refrain
- Quatrains en décasyllabe
- Refrain en distiques
- Mais une rupture du rythme et de sa régularité
- Cassure du décasyllabe central de chaque quatrain (en un vers de 4 syllabes et un de 6)
- Effet cyclique de retour :
- Chanson avec refrain (répété), en vers impairs (heptasyllabe)
- Répétition du premier vers à la fin du poème (antépiphore)
- Cycle de l’eau
- La musicalité du poème, des sonorités très travaillées
- Un poème sous forme de chanson (refrains, couplets) 🡪 reprise chantée par des artistes tels que Léo Ferré ou Marc Lavoine
- Répétitions sonores :
- Vers 13/14- 15/16 (comme)
- Nombreuses allitérations en (M) et en (L) au travers tout le poème 🡪 musicalité, fluidité de l’eau
- Assonances en (ou) et (on) 🡪 plainte du poète
- Chiasme (vers 10) 🡪 lassitude des amoureux et amour éphémère
- Rimes : Douceur et fluidité du poème
- Régulières
- Majoritairement féminines 🡪 font résonner les voyelles, suggèrent l’expression des sentiments
- Mais un poème ambigu
- Enjambements
- Vers 1 à 3
- « Nos amours » 🡪 sujet du verbe couler : comparaison eau/amour
- « Nos amours » COI de souvenir 🡪 nostalgie, souvenir
- Ambiguïté + absence de ponctuation
- Refrain ambigu : « les jours sans vont je demeure » (différentes interprétations au niveau de la juxtaposition)
- (Et) 🡪 affirmation de la permanence, le poète comme un pont, qui demeure quoi qu’il en soit 🡪 poète éternel grâce à sa poésie
- (Mais) 🡪 poète victime de la situation, solitude et désemparement face au temps qui passe inéluctablement
- Brouiller les pistes
- Ambiguïté du temps
- Progression du présent d’énonciation vers un présent des vérités générales 🡪 une simple constatation de l’eau qui coule devient une méditation sur le temps qui passe et sur l’amour.
- Présent du subjonctif exprime un souhait.
Conclusion :
Ainsi, dans un poème traditionnel en apparence et moderne, par la liberté d’écriture dont Apollinaire fait preuve, le poète renouvelle les thèmes élégiaques et traditionnels de la rupture amoureuse et du temps qui passe. Il exprime, au travers un poème ambigu aux sonorités musicales et travaillées, une réflexion sur le temps qui passe inéluctablement, nous rapprochant un peu plus de la mort, en mêlant l’éternel et le transitoire. Il fait aussi part, un travers d’un récit à la fois personnel et universel, de sa solitude et de sa nostalgie, liées à la perte de sa bien-aimée.
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