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Absence de sensibilité de La Bruyère

Dissertation : Absence de sensibilité de La Bruyère. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  30 Avril 2024  •  Dissertation  •  1 764 Mots (8 Pages)  •  43 Vues

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Stendhal reconnaissait le piquant de l’écriture de La Bruyère, mais estimait qu’il n’avait « aucune sensibilité ». Il écrivait ainsi : « il y a peu de comique chez La Bruyère, la sécheresse le chasse », ou « La Bruyère nous semble un homme qui s’indignerait, s’il ne se retenait pas. » (Du style, 1812)

Que pensez-vous de cette critique de la Bruyère de cette absence de sensibilité que lui attribue Stendhal ? Cela correspond- il a votre lecture des caractères et au rapport que le moraliste entretien avec le monde qu’il dépeint ? Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur votre con naissances des livres V à X des Caractères ainsi que sur les textes que vous avez étudiés au fil de l’année en lien avec le parcours associé.

En s’inspirant de Théophraste dans "Les Caractères", publié pour la première fois en 1688 à Paris, Jean de La Bruyère est un moraliste classique du XVIIe siècle, reconnu pour ses observations acérées de la société française. Au XIXe siècle, on peut dire que la querelle des Anciens et des Modernes se radicalise avec les romantiques. Stendhal attaque le principe même d'imitation des anciens « Imiter aujourd’hui Sophocle et Euripide, et prétendre que les imitations ne feront pas bâiller le Français au XIXe siècle, c’est du classicisme ». Effectivement, Stendhal oppose l’ancienne école, le classicisme, à une nouvelle conception de la beauté, le romantisme. C’est pourquoi, selon lui, on trouve « peu de sensibilité » et « peu de comique » et de préciser « La Bruyère nous semble un homme qui s’indignerait, s’il ne se retenait pas. ». L’équilibre, la mesure et la vraisemblance recherchés par La bruyère, ne laisse pas place à l’émotion, tout semble en retenu.  On peut alors de demander si cette critique est le reflet fidèle de l'essence des "Caractères" et quelle est la manière dont La Bruyère interagit avec son monde ? la Bruyère n’a-t-il aucune sensibilité ou cette retenue n’est elle par caractéristique de l’écriture du moraliste ?   A la lecture des livres V à X des "Caractères", dans un premier temps, nous explorons la représentation de la société puis nous effectuerons une analyse de la prétendue "sécheresse" de La Bruyère, pour terminer par une réflexion sur la sensibilité sous-jacente dans son œuvre.

 

La représentation de la société dans "Les Caractères" est réalisée par observation critique de la Bruyère. La Bruyère décrit les divers aspects de la société, mettant en lumière les vices et les travers de ses contemporains à travers des portraits incisifs et des maximes percutantes. La Bruyère brosse un portrait minutieux des différentes classes sociales et de la vie à la cour, illustrant ainsi la société de son temps. Dans le livre VI, La Bruyère se penche sur la noblesse et la cour royale. Il décrit les comportements hypocrites et les intrigues qui caractérisent cette classe sociale. Son étude des caractères humains dépasse le cadre de la cour, offrant des observations universelles. Par exemple, dans le livre VI, le moraliste met l’accent sur le rôle de l’argent qui déstabilise l’ordre social et crée des différences de fortune ne reposant pas sur le mérite.  La Bruyère offre un portrait authentique et réaliste de la société de l’époque, reflétant les inégalités et les injustices sociales.

La Bruyère utilise l'ironie et la satire comme moyens de critiquer les normes sociales et les comportements qui nous révèle une profondeur de pensée plutôt qu'une simple sécheresse.

Effectivement, l’ironie et le sarcasme sont des armes critiques utilisées pour exposer les excès et les ridicules des personnages. Ces portraits satiriques sont le contre modèle de l’honnête homme comme Théodecte (V, 12) qui veut être le centre de tout, a des gestes et des tons de vois excessifs et manque de discrétion. La Bruyère critique les excès et les vices de la cour, mais son analyse va au-delà.

Les « Caractères » montrent la finesse d'observation de La Bruyère et sa capacité à dépeindre les complexités humaines. Son observation aiguisée des comportements humains explore les passions et les motivations. “Les Caractères” sont particulièrement révélateurs de la comédie sociale mise en scène par La Bruyère. Par exemple, dans le livre V, La Bruyère examine l’art d’être en société en décrivant comment la parole est utilisée dans les salons de conversation. Il dépeint plusieurs personnages mal éduqués, dont les traits sont antagonistes aux valeurs d’honnêteté et de politesse. Ou encore dans le Livre IX, La Bruyère analyse le comportement des femmes, leurs rôles dans la société et leurs relations avec les hommes. La vérité est utilisée comme arme critique pour encourager la réflexion et le changement

 Cette analyse critique, cette sécheresse peut être interprétée à tort comme un manque de comique, mais elle sert en réalité à dénoncer les vices et les travers de la société        

La Bruyère adopte une écriture caractérisée par sa concision et son efficacité, qui peut être interprété à tort comme de la sécheresse. Son écriture prend souvent la forme de maxime, souvent brève, faisant penser aux maximes de La Rochefoucauld. Cette utilisation permet d’affirmer une vérité générale, indiscutable. Comme dans Livre V, remarque 1 « un caractère bien fade est celui de n’en avoir aucun ».  Bien que l’écriture vise la clarté, le vocabulaire philosophique utilisé vise l’abstraction. Mais Les Caractères relèvent avant tout d’une écriture satirique, en réalisant de nombreuses caricatures, lui permettant d’illustrer la maxime. L’utilisation de juxtaposition de proposition et d’énumération, créent un effet cumulatif qui met en avant la démesure et l’impolitesse des personnages qu’il décrit comme dans le Livre V, remarque 12 avec le portrait de Théodecte « il rit, il crie, il éclate » Pour dénoncer la comédie sociale, La Bruyère adopte une écriture théâtrale, avec l’alternance des maximes et des caractères. Celle-ci se retrouve souvent sous forme de dialogue, comme dans le portrait d’Acis « que dites-vous ? Comment ? je n’y suis pas, vous plairait-il de recommencer ? J’y suis encore moins. Je devine enfin : vous voulez, Acis, me dire qu’il fait froid »

La place du comique dans l'œuvre de La Bruyère sert une fonction critique subtile et engage à une réflexion morale. L’humour et l’ironie sont employés pour dévoiler les vices et exposer les ridicules. La Bruyère utilise l’humour et l’ironie pour créer la surprise et la complicité avec le lecteur. L’ironie de La Bruyère trouve sa puissance dans la précision, il méprise le grotesque, refuse l’outrance et fait reposer la puissance du trait sur la justesse du mot. Il se moque des personnages prétentieux et expose leur ridicule. Par exemple dans le Livre V, 9, Arrias un courtisan égocentrique monopolise la conversation en parlant d’un sujet qu’il ne connaît pas pour se faire remarquer, il finit par être ridiculisé par l’ambassadeur qui est concerné par l’histoire qu’il raconte. Le comique de geste est également présent, mettant en scène des comportements absurdes et extravagants, comme dans le Livre IX, 48, Théogonis fait des gestes dans tous les sens, il est excessif, il embrasse, il salue, il s’incline.

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