Louise labe, tant que mes yeux
Commentaire de texte : Louise labe, tant que mes yeux. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Romain Allegre • 30 Mars 2020 • Commentaire de texte • 991 Mots (4 Pages) • 8 307 Vues
Romain Allègre, 2nde A
Commentaire : “Tant que mes yeux pourront larmes épandre”, Sonnets, Louise Labé, 1555
Plan : Amour lyrique
- Un amour expressif
- Une tristesse mortelle
- Un paradoxe déchirant
Commentaire rédigé
Ce sonnet de Louise Labé, fait preuve d'un grand lyrisme amoureux. Sa mise en forme poétique, deux quatrains et deux tercets, en est un des symboles. Dans les deux premiers quatrains, ce sont des rimes riches féminines qui embrassent des rimes, suffisantes ou riches, masculines pour rappeler que c’est non pas un poète qui écrit, mais bien une poétesse qui adresse ses sentiments amoureux à un homme. On retrouve la présence de la première personne du singulier, à travers le pronom personnel “je” ou les adjectifs possessifs “ma” et “mes”, qui marque l’expression des sentiments, ici pour un homme à qui elle s’adresse directement, en utilisant la deuxième personne du singulier et le pronom personnel “toi”, qui lui attribue également une certaine unicité. Cette unicité est alors accentuée par les mots “rien fors que toi”, et le groupe nominale “tes grâces” qui divinise sa personne et démontre que l’auteur idolâtre cet homme. Le verbe “sentirai” ainsi que l’allitération en [v], la vibrante, suggère l’expression de sentiments et de sensations qui font vibrer l’auteur. D’ailleurs, le lyrisme passe beaucoup par l’utilisation des sens, et convoque ici ceux de l’auteur, du destinataire, mais également ceux du lecteurs, par les mots “yeux”, “voix”, “main”, “entendre”, ce qui rend ce sonnet davantage universel. Que serait le lyrisme sans musique et une douce mélodie ?. Le “luth” est un des symboles, avec la lyre, du lyrisme. Louise Labé souhaite “chanter” son amour et ses sentiments.
Mais malheureusement, les mots et les notes de son amour ne sont autres que ses “larmes”.
C’est une femme amoureuse, mais extrêmement triste. Et la tristesse semble être devenue sa manière d’aimer. Ses “signes d’amantes” sont des “larmes”, des “sanglots et soupirs”. La pauvre ponctuation, composée de quelques points, virgules ou points-virgules seulement, révèle d’une tristesse due à une insuffisance. En effet cette insuffisance peut se traduire par différents procédés. La forme du Sonnet irrégulière, à savoir en décasyllabe au lieu d’une forme en Alexandrin, ne permet pas de césures régulières, ce qui traduit un manque, une instabilité; les formes négatives “ne pouvant plus”, ou “ne voulant rien” expriment une tristesse due à une insuffisance, de même pour l’emploi de “contenter”, ici connoté péjorativement, car ce verbe ne fait que suggérer ce manque. L’emploi très fréquent d’allitérations à sonorité douloureuse, tel le [r], la roulante, vont venir ajouter une dimension de souffrance, accentuée par l’allitération en [s], la sifflante, en encore par l’assonance de la nasale [an] qui vont rallonger la durée de cette souffrance, de manière vicieuse mais subtile. Pour elle, l’amour réside dans la tristesse, et la nostalgie, c’est pour cela qu’elle associe “heur”, connoté méliorativement, à “passé” et “regretter”, des mots à sens péjoratif, pour montrer que le bonheur est derrière elle, et que la tristesse le remplace au quotidien. Progressivement, cette tristesse qui est si douloureuse, en devient mortelle. Ses “yeux”, les yeux étant souvent associés au reflet de l’âme, vont “tarir”, soit s'assécher tels une rivière, c’est un signe de perte de vie. On retrouve un champ lexical de la souffrance mortelle très présent, avec les mots “tarir”, “cassée”, “impuissante”, “morte”, “mourir”, “noircir” ou encore “la mort”, qu’elle évoque explicitement en la mettant en relief grâce à l’article défini “la”. Cela relève d’un paradoxe; l’auteure évoque la mort comme si elle l’envisageait prochainement, elle se projette déjà vers un futur qui, selon elle ne peut être que douloureux, par peur de perdre ce qu’elle possède. Mais ce n’est qu’une facette du paradoxe qui tourne autour de l’auteur.
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