Comment le juge administratif va-t-il procéder pour déterminer sa compétence en matière de service public et déterminer le régime juridique applicable ?
Dissertation : Comment le juge administratif va-t-il procéder pour déterminer sa compétence en matière de service public et déterminer le régime juridique applicable ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Juliette Martinaud • 13 Décembre 2022 • Dissertation • 2 526 Mots (11 Pages) • 309 Vues
Comment le juge administratif va procéder pour déterminer sa compétence en matière de service public et déterminer le régime juridique applicable ?
Il y a eu une distinction entre les juges judiciaires et les juges administratifs. Cette distinction découle de la décision de l'Édit de Saint-Germain de 1641, qui établit le principe « il est interdit au magistrat de connaître des affaires pouvant intéresser l'État, l'administration ou le gouvernement ». Comme il ressort de cette décision, les juges judiciaires n'ont le pouvoir d'appliquer le droit privé qu'aux particuliers, tandis que les juges administratifs ont le pouvoir d'appliquer le droit administratif au public.
Ce principe est renforcé par la loi du 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III (fructidor an III, il s’agit ici du calendrier républicain et la date concernée est le 2 septembre 1795). Le premier critère d’application du droit administratif est donc le critère organique, c’est à dire en fonction de la qualité de la personne, personne publique renvoie à l’administration et personne privée renvoie au citoyen ou encore une personne morale de droit privé comme l’entreprise, on rattache l’application du droit administratif à la qualité de la personne.
Le second critère d’application du droit administratif est le critère de la nature de l’activité. Cela consiste à analyser si l’activité qui est exercée est une activité présentant le caractère d’intérêt général, ou au contraire une activité qui ne présente pas ce caractère. Puisque si cette activité présente ce caractère, nous sommes en présence d’un service public, et le juge administratif à une compétence pour connaître de l’affaire qui concerne cette activité.
Deux critères sont donc clairement ici dégagés, permettant de savoir si juge administratif est compétent pour connaître de l’affaire. Le premier critère est un critère organique qui en fonction de la qualité de la personne permet de savoir si le juge administratif est compétent et le second critère est le critère matériel, l’intérêt général, qui permet de dire si l’activité constitue un service public, et donc le juge administratif se trouve compétent pour juger.
Si le premier critère n’est pas une source particulière de difficulté, le critère du service public présente quant à lui clairement une source d’ambiguïté, puisqu’on assiste à une remise en cause de cette définition. Comme l'a souligné le doyen George Vedel, « Le service public se trouve dilué ». Le gouvernement va accroître son action dans une variété d'activités, en parallèle avec lui ; en plus du cas classique de l'autonomisation du service public, il va de plus en plus , ses activités sont déléguées au privé, brouillant ainsi la notion de service public.
Ainsi, la question qui se posera sera de comprendre comment le juge administratif procédera pour déterminer sa compétence en matière de service public et pour déterminer le régime juridique applicable.
Nous assistons donc à une remise en question du principe de la compétence du juge administratif en matière de service public (I) vers une exception le partage de la compétence du juge administratif avec les juges judiciaires en matière de service public (II)
I) Le principe d'autorité des juges administratifs en matière de service public
L’affirmation du principe que le juge administratif est compétent pour connaître des affaires de l’administration, de l’État ou du gouvernement est une affirmation réductrice qui ne permet pas de saisir l’ampleur des activités de l’administration. L’affirmation de la compétence du juge administratif trouve sa source au travers le service public (A) cependant, on constate une remise en cause de la compétence du juge administratif en matière de service public, dû à un éclatement du service public (B).
A) Reconnaître l'autorité des juges administratifs en matière de service public
À partir du moment où le juge administratif s’est reconnu comme étant autonome et indépendant dans l’application du droit administratif, il a fallu dégager les critères permettant de savoir à quel moment on appliquerait le droit administratif. Le premier critère d’application du droit administratif est la notion du service public.
Cette position consistante, à reconnaître la compétence du juge administratif dès lors qu’il y a service public, est dégagée dans la décision du tribunal des conflits ; Blanco du 8 février 1873. Dans cette décision le sieur Blanco cherchait à engager la responsabilité de l’État, en intentant une action contre le préfet de Gironde représentant de l’État. Le sieur Blanco demandait à ce que l’État soit déclaré civilement responsable, du dommage subit par sa fille, causé par le fait d’ouvrier travaillant pur l’administration de l’État. Le tribunal des conflits reconnaît la compétence du juge administratif en ce qui concerne l’engagement de responsabilité de l’État, pour le fait de personnes employées au sein d’un service public. Ainsi, l'arrêt reconnaît la compétence exclusive du juge administratif sur la fonction publique.
Cependant, il convient de noter que la décision du tribunal des conflits était muette sur le service public. En fait, il ne définit pas un service public et ne fournit pas non plus de norme pour l'identifier. Tout simplement, la décision rappelle simplement que la responsabilité de l'État ne peut être assumée dans le domaine du contentieux civil et devant les tribunaux.
Il en ressort que le tribunal des conflits fait ici présumer l’existence d’un service public unique, sans aucune autre distinction. Le service public va être raffermi par plusieurs arrêts tout d’abord l’arrêt du 6 février 1903. Dans cet arrêt et plus précisément les conclusions du commissaire Romieux, on affermit l’application du droit administratif, qui permet de savoir si le juge administratif est compétent. Selon le commissaire du gouvernement le droit administratif, s’applique que dans la mesure où l’administration utilise des procédés exorbitants du droit commun. Cette position qui consiste à reconnaître la compétence du juge administratif dès lors où l’administration agit en utilisant des procédés de droit exorbitant du droit commun est confirmée, au travers l’arrêt du 4 mars 1910. Dans cet arrêt la ville de Montpelier avait passé un marché avec monsieur Thérond, qui devait accomplir un service public. Le Conseil d’État se déclara compétent, en considérant que ce service public avait pour but d’assurer l’hygiène et la sécurité (ordre public) en ramassant les chiens errants. Ainsi dans ce marché ce qui constituait le caractère exorbitant du droit commun n’était pas tant la mission de service public, qui assurait un intérêt général. Mais la mission d’un service public, qui avait pour objet d’assurer l’ordre public (hygiène et sécurité), qui traditionnellement est maintenu par l’administration elle-même.
Les différents arrêts du Conseil d’État, semblait donc retenir un service public, dès lors, où dans l’activité il y avait un caractère exorbitant de droit commun, ne laissant donc planer aucun doute quant à la compétence du juge administratif. Ces premiers arrêts en matière de service public donnent une impression d’unité dans le service public qui va être remise en cause dès le début du 20e siècle
B) Le doute de la qualification du juge administratif en matière de service public
Cette identification, a priori simple, du service public, qui consiste à analyser si l’administration utilise des prérogatives exorbitantes du droit commun (prérogative de puissance publique), va être remise en cause, contribuant par la même occasion à rendre difficile l’attribution ou non de la compétence du juge administratif en matière de service public.
Le tribunal des conflits qui avait initié le chemin de la compétence du juge administratif, dès lors qu’il y avait service public, va contribuer à remettre en cause cette compétence de principe. La décision du tribunal des conflits du 22 janvier 1921 constitue le début d’un point de rupture du service public. Par cette décision une distinction est faite au sein du service public. Il existe donc deux types de services publics.
D'une part, le service industriel et commercial est une activité exercée en principe par des personnes privées ; d'autre part, le service public administratif est, en principe, une activité d'intérêt général et appartient à l'autorité administrative.
Le commissaire du gouvernement explique cette distinction dans l'identification des services publics, d'abord et avant tout par rapport à une conception restreinte de l'État et des autres missions publiques. En revanche, l'intervention de l'État dans les services publics industriels et commerciaux est une anomalie. D’autre part, il explique cette conception par le principe de séparation des pouvoirs, en effet il serait anormal qu’un service public industriel et commercial, qui relève par principe du droit privé, trouve à se voir appliquer du droit administratif et qu’un juge administratif se retrouve ainsi compétent dans le cadre d’un litige né dans le cadre d’un service public industriel et commercial.
Le principe de la distinction entre service public industriel et commercial, et service public administratif est repris par le Conseil d’État
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