Commentaire de la décision Tribunal des Conflits, 23 octobre 2000, Boussadar
Commentaire d'arrêt : Commentaire de la décision Tribunal des Conflits, 23 octobre 2000, Boussadar. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Baptiste Dufaure • 29 Mai 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 790 Mots (12 Pages) • 1 904 Vues
Commentaire de la décision Tribunal des Conflits, 23 octobre 2000, Boussadar
Il s’agit d’un arrêt rendu le 23 octobre 2000 par le Tribunal des Conflits.
M. Habderrahim X… ressortissant marocain s’est vu refuser sa demande de visa par le Consul général de France le 23 mars 2000, M.X… souhaitait obtenir ce visa pur pouvoir être présent à l’audience du 19 avril 2000 de la Cour d’appel de Paris
Le 14 avril 2000, le préfet de police a présenté un déclinatoire pour que la juridiction judiciaire se déclare incompétente pour connaitre de la légalité du refus de visa, mais ce déclinatoire a été rejeté par l’ordonnance de référé du 28 avril 200 rendue par le Premier Vice-Président du tribunal de grande instance de Paris, et par cette ordonnance de référé, le Premier Vice-Président du TGI de Paris en a profité pour ordonner au ministre des affaires étrangères de remettre un visa à M.X pour pouvoir être présent à l’audience du 19 avril 2000. Cependant, cette ordonnance a été déclarée nulle et non avenue conformément aux articles 7 et 8 de l’ordonnance du 1er juin 1828 qui précise que la juridiction qui rejette le déclinatoire de compétence doit surseoir à statuer sur le fond pendant le délai qui est laissé au préfet soit quinze jours.
Le 2 mai 2000, le préfet de police élève le conflit par un arrêt, c’est ainsi que le TGI de Paris a sursis à toute procédure par un jugement du 24 mai 2000.
La voie de fait est-elle constituée quand une autorité détenant le pouvoir administratif prend une décision qui est susceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative, ce qui voudrait dire qu’elle va subsister face au référé liberté ?
Par sa décision du 23 octobre 2000, le Tribunal des conflits a préféré avant l’entrée en vigueur soit au 1e janvier 2001 de la loi du 30 juin 2000 instaurant le référé liberté précisé dans cet arrêt que la voie de fait subsiste, mais qu’elle est soumise à des conditions, et que si ces conditions ne sont pas remplies, il n’y aura pas voie de fait, et donc le juge administratif restera compétent, c’est ainsi que par cet arrêt du 23 octobre 2000, il a estimé qu’il n’y avait pas voie de fait en l’espèce car « la mesure litigieuse a été prise par l’autorité consulaire agissant dans l’exercice d’un pouvoir conféré par l’administration » ainsi la condition qui veut que pour soit constitué la voie de fait il faut que la décision soit insusceptible d’être rattaché à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative, ce qui n’est pas le cas, donc il n’y a pas de voie de fait.
Il convient dans un premier temps d’étudier la notion de voie de fait, les définitions dont elle fait l’objet, ce qui la caractérise (I), pour pouvoir déterminer en quoi elle a été mise en danger et comment elle s’est maintenue (II).
I La théorie de la voie de fait
La voie de fait, théorie jurisprudentielle qui n’est pas la seule à faire exception au principe de séparation des autorités judiciaires et administratives (A), qui est constituée avec des conditions (B).
- La voie de fait, une autre exception justificative de la compétence du juge judiciaire
- Le principe de séparation des autorités administratives et judicaires
Pour en revenir aux bases, il y a les lois des 16 et 24 août 1790, plus précisément l’article 13 des lois des 16 et 24 août 1790 qui précise : « Les fonctions judiciaires, sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives, les juges ne pourront à peine de forfaiture troubler de quelque manière que ça soit les opérations des corps administratifs ni citer devant eux les administrateurs ». De part cet article, les autorités judiciaires et administratives sont séparés, ainsi le juge judiciaire ne pourra se voir attribuer la compétence du juge administratif, mais ça, c’est le principe, et qui dit principe dit exception.
- Les exceptions au principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires
- Les fondements textuels de l’autorité judicaire : gardienne de la liberté individuelle
Avant que n'existe une vraie juridiction administrative, des textes ont confiés au juge judiciaire la compétence pour juger dans certains domaines importants de la vie des individus. Par exemple tout ce qui concerne l'état civil des personnes, l'idée fondatrice était que le juge judiciaire protège les individus contre la puissance publique, et leur assure une sécurité juridique face à la puissance publique.
La jurisprudence va faire émerger un principe, celui de l'autorité judiciaire gardienne de la liberté individuelle et de la propriété privée. Au XXème siècle ce principe va inspirer des grands textes :
- D'abord l'article 66 de la constitution de 1958, qui affirme le principe. Le conseil constitutionnel a veillé à ce que le législateur respecte cet article 66. Une décision du Conseil constitutionnel du 29 décembre 1984, décision perquisition fiscale, la décision porte sur la loi de finance, notamment il y avait des dispositions qui permettaient à l'administration fiscale de perquisitionner des individus au cas où il y aurait suspicion de fraude. Le conseil constitutionnel va invalider cette disposition pour violation de l'article 66.
- Le deuxième texte est l'article 136 du code de procédure pénale « dans tous les cas d'atteintes à la liberté individuelle, le conflit ne peut être élevé par l'autorité administrative et les tribunaux de l'ordre judiciaire sont toujours exclusivement compétent ». Ce texte de droit pénal énonce une compétence générale dans ce domaine pour le juge judiciaire.
Une décision du tribunal des conflits 12 mai 1997, préfet de police contre Ben Salem et Taznaret dit que le juge administratif peut être compétent même en matière de liberté. L'administration ici le préfet va contester la compétence du juge judiciaire. Il va réfuter l'application de l'article 136, le tribunal des conflits va conclure à la compétence du juge administratif en interprétant l'article 136 du code de procédure pénale de manière très restrictive. Le Tribunal des conflits affirme que l'article 136 du code de procédure pénale constitue une dérogation au principe de séparation des autorités, mais ce texte ne saurait remettre en cause la compétence du juge administratif à l'égard des actes administratifs. Dès lors qu'un acte administratif est en cause même si il porte atteinte à une liberté individuelle, ce n'est pas suffisant pour le transmettre au juge judiciaire. Le Tribunal des Conflits laisse entendre que le juge judiciaire ne peut pas faire obstacle a l'application d'une décision de l'administration car c'est la mise en œuvre du prérogative de puissance publique.
Avec l'article 136 du code de procédure pénale, on comprend que la compétence du juge judiciaire existe toujours mais elle commence à se recentrer sur des hypothèses très limitées. Début de la réduction.
Ben Salem et Taznaret : tribunal des conflits qui adopte une interprétation restrictive de l’article 136 de code procédure pénale. Le tribunal des conflits affirme que l’article 136 du code de procédure pénale constitue une dérogation au principe de séparations des autorités. Ce texte ne saurait remettre en cause la compétence du juge administratif à l’égard des actes administratifs. Dès lors qu’un acte administratif est en cause même s’il porte atteinte à la liberté individuelle ce n’est pas suffisant pour transférer la compétence au juge judiciaire. Le tribunal des conflits laisse entendre que le juge judiciaire ne peut pas faire obstacle à l’application d’une décision de l’administration parce que c’est une décision de l’administration d’une mise en œuvre d’une prérogative de puissance publique.
Article 136 du code de procédure pénale ne justifie pas le transfert au juge judiciaire. Avec l’article 136 du code de procédure pénale, et donc avec la jurisprudence du tribunal des conflits : on comprend que la compétence du juge judiciaire existe toujours, mais commence à s’effriter, à se réduire, se recentrer sur des hypothèses limités. La décision Taznaret c’est qu’un début de la réduction de ces compétences-là.
- Les fondements jurisprudentiels de l’autorité judicaire : gardienne de la liberté individuelle
En dehors de l’application d’un texte que ce soit article 136 du code de procédure pénale, le juge tant le Conseil d’Etat que la Cour de cassation a consacré deux hypothèses dans lesquelles le juge judiciaire est compétent pour juger de l’administration, ces deux hypothèses correspondent à deux théories :
- La théorie de la voie de fait
- La théorie de l’emprise irrégulière
Celle qui nous intéresse est la théorie de la voie de fait, car c’est ce dont il est question dans cet arrêt du tribunal des conflits du 23 octobre 2000.
Le tribunal des conflits fait référence dans son deuxième considérant par la formule : « Il n’y a voie de fait […] par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires » à l’exception que représente la voie de fait. Mais cette voie de fait, comme tout exception doit remplir certaines conditions.
- Les conditions de constitution de la voie de fait
A travers ce deuxième considérant, le Tribunal des conflits est vraiment pédagogue, il précise la notion de voie de fait. Pour y arriver il a précisé que la voie de fait est une exception, mais que cette exception doit remplir des conditions pour être constituée.
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