L'interprétation de la règle de droit.
Cours : L'interprétation de la règle de droit.. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar alizer • 24 Novembre 2016 • Cours • 3 529 Mots (15 Pages) • 1 880 Vues
Titre 2. L’interprétation de la règle de droit
Dans certains cas un mot comprend plusieurs sens : il s'agit de la polysémie, par opposition à la monosémie.
Un terme, une expression, à sens multiples peuvent être utilisés dans un texte sans que son auteur ait véritablement donné d'indication sur le sens à retenir.
On a utilisé un terme, une locution qui a plusieurs sens et le lecteur ne sait quel sens choisir.
Devant cette équivoque, créée intentionnellement ou par maladresse, par l'auteur du texte, il convient de rechercher le sens qu'il convient de donner au mot ou à l'expression dont le sens n'est pas déterminé.
C'est alors à une opération d'interprétation qu'il convient de se livrer. Opération qui consiste à discerner le véritable sens d'un texte. C'est le choix entre plusieurs sens auquel doit se livrer le juge et accessoirement d’autres interprètes.
On appelle herméneutique, l'art de comprendre et d'interpréter.
C'est l'application de la règle de droit essentiellement, le passage du général au particulier, qui suppose le plus souvent de recourir à l'interprétation (l’interprétation permettra ensuite la qualification).
C’est à ceux qui appliquent le droit (les juges) mais aussi aux praticiens que revient la tâche d’interprétation. Ils sont aidés par ceux qui réfléchissent sur le droit = la doctrine. Il s’agit des acteurs de l’interprétation.
Pour remplir leur mission et résoudre les questions de droit qui leur sont soumises, les acteurs de l’interprétation ont besoin d'une méthode.
Nous verrons d’abord les méthodes d’interprétation (ch. 1), puis les acteurs de l’interprétation (ch. 2).
Chapitre 1. Les méthodes d’interprétation
Le problème est qu'il existe plusieurs méthodes mais qu'il n'y a pas de véritable accord sur la méthode qu'il convient d'adopter. Il existe en revanche des règles pratiques qui bénéficient d'un certain consensus.
La pluralité de méthode (section 1) et
Des règles pratiques d’interprétation (section 2).
Section 1. Une pluralité de méthodes
A la méthode classique de l'exégèse, s'opposent plusieurs méthodes modernes, qualifiées de scientifiques.
§ 1. La méthode exégétique
C'est l'importance des codifications (napoléoniennes) au début du XIX° siècle, qui a donné à la loi un rôle, une valeur particulière et nouvelle par rapport à l'Ancien Régime.
On assiste au XIX° siècle à un culte du texte de loi.
Il aurait alors été possible de concevoir l'interprétation comme une interprétation littérale du texte.
Il s'agissait en réalité de rester le plus près possible de ce texte et ce qui comptait c'était ce que le législateur avait réellement voulu. La loi est une manifestation de volonté et dès lors l'interprète doit, par de là le texte, rechercher l'intention du législateur.
Au delà de l'analyse grammaticale, il convenait donc de rechercher cette intention, cette volonté dans les travaux préparatoires (exposé des motifs, rapports, débats parlementaires).
Depuis une loi du 15 avril 2009, les projets de loi sont précédés de l’exposé de leurs motifs qui a pour objet de présenter les principales caractéristiques du projet et mettre en valeur l’intérêt de son adoption.
§ 2. Les méthodes modernes
Par ces méthodes dites modernes, on critique la méthode classique, parce que la recherche de l'intention du législateur est incertaine, improbable.
R. Saleilles « Au-delà du Code civil, mais par le Code civil ».
Sont dès lors proposées diverses méthodes :
∙ la méthode téléologique (par la finalité des textes) vise une interprétation de la loi en fonction du but social poursuivi lors de son élaboration.
∙ la méthode historique, ou évolutive, permet à l'interprète d'adapter le texte aux nécessités sociales de son époque. L'interprète doit en réalité rechercher ce que serait la pensée des auteurs de la loi s'ils avaient à légiférer aujourd'hui. Un même texte pourra donc recevoir des interprétations différentes selon les époques.
∙ la méthode structuraliste implique un retour de l'interprète au texte, mais au texte considéré comme un ensemble, non pas la recherche de l'intention.
Le sens se trouve dans la structure rigide du texte : ex. la fréquence de l'utilisation d'un terme, la liaison entre les termes, bref tout ce qui constitue la structure d'un texte.
∙ la méthode de la libre recherche scientifique (François Gény) propose quand la loi a révélé ses limites (parce qu'un texte ne peut être « dilaté » par interprétation à l'infini) de combler un vide que la loi a laissé.
Il faut aller au delà de la loi et construire véritablement le droit à partir de la réalité historique, sociale ou rationnelle.
L'interprète doit alors élaborer une solution comme s'il avait à faire œuvre de législateur, en s'aidant de toutes les données diverses qui peuvent faire naître la règle de droit.
Section 2. Les règles pratiques d'interprétation
Ce sont des « recettes », des procédés et des maximes d'interprétation qui ont été découverts et utilisés par les interprètes du XIX° siècle. L'idée qui les relie est celle d'une loi qui émane d’une « volonté raisonnable ».
Ces « recettes » continuent à être utilisées.
§ 1. Les procédés d'interprétation
A. l'argument a contrario
Ne peut jouer que si les éléments sont en parfaite opposition. Quand le texte dit quelque chose, il est censé nier le contraire. De même quand un objet est inclus dans une disposition de la loi, son contraire doit en être exclu.
B. l'argument a fortiori
Permet d'étendre une loi à un cas non prévu parce que les motifs qui ont guidé cette loi se retrouvent avec plus de force encore. Les raisons de l'application de la loi sont encore plus fortes.
C. l'analogie
Est une extension de la loi à des matières ou à des cas qui n'étaient pas prévus. Parce que la loi donne une solution particulière pour une situation, on déduit que cette loi est applicable aux situations semblables (divorce/mariage putatif). Le problème est bien sûr dans ce cas de savoir ce que l'on peut entendre par situations analogues.
§ 2. Les maximes d'interprétation :
A. « les exceptions sont d'interprétation stricte » (exceptio est strictissimae interpretationis) : toute solution exceptionnelle doit être appliquée de façon à ne pas en étendre la portée au-delà de la définition textuelle dans laquelle, elle se trouve enfermée (Roland et Boyer). Il s'agit d'exceptions formelles, que l'on retrouve dans les termes de "cependant, néanmoins, sauf" ou d'exceptions virtuelles dérivant de la nature de la disposition (incapacité, privilège, déchéance). Interdiction de créer une catégorie d'exceptions en dehors d'une disposition légale précise.
B. « il est défendu de distinguer là où la loi ne distingue pas » (ubi lex non distinguit, nec nos distinguere debemus) : cette maxime condamne toute interprétation restrictive d'un texte conçu en termes généraux. La loi a disposé sans restrictions, ni conditions, dès lors l'interprète ne saurait en réduire la substance en introduisant des exigences qui ne s'y trouvent pas, ni en éluder l'application au motif que le cas est exceptionnel et qu'il serait donc inopportun d'en faire usage en l'espèce.
Si le texte n'est pas appliqué dans toute son étendue, la volonté du législateur serait violée.
C. « la loi cesse là où cessent ses motifs » (cessante ratione legis, cessat ejus dispositio) : la ratio legis s'identifie à la raison d'être de la loi. Elle incarne la pensée du législateur lorsqu'il a édicté la norme. La loi dès lors ne doit s'appliquer qu'aux situations qu'elle a prévues dans sa lettre et dans son esprit.
Elle pourra toutefois être étendue par analogie à des cas qui n'entrent pas dans sa définition, à condition que sa ratio puisse s'y appliquer sans être infléchie. Si au contraire, la ratio legis ne peut être transposée dans l'espèce bien que cette dernière semble être comprise dans la lettre du texte, la loi ne s'appliquera pas.
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