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Commentaire linéaire Madame Bovary (partie 1, chapitre 7)

Commentaire de texte : Commentaire linéaire Madame Bovary (partie 1, chapitre 7). Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  16 Septembre 2023  •  Commentaire de texte  •  3 530 Mots (15 Pages)  •  522 Vues

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INTRODUCTION :

Dans son premier essai intitulé Le Bovarysme, le philosophe Jules de Gaultier introduit le concept du même nom et en propose une définition : le bovarysme c’est : “le pouvoir départi à l’homme de se concevoir autre qu’il n’est”. Son sens se développe aussi pour signifier l’état d’insatisfaction (affectif et social) chez certaines jeunes personnes et se traduisant par une fuite vers l’imaginaire et le romanesque. En somme, le bovarysme retranscrit le comportement d’Emma Bovary dans l'œuvre éponyme de Gustave Flaubert.

Sous-titré “Moeurs de Province”, l’ouvrage se place dans la continuité des romans balzaciens dans un objectif d’évoquer de manière minutieuse les réalités sociales et locales de la société du XIXe siècle. Flaubert commence la rédaction de Madame Bovary en 1851 alors qu’il a trente ans ; ce n’est pas son premier ouvrage mais il hésite à publier ses premiers écrits qu’il juge trop imparfaits. Ses deux amis Maxime du Camp et Louis Bouilhet lui conseillent d’éviter les sujets trop ambitieux et lyriques afin de se concentrer sur des sujets réels notamment des “sujets terre à terre, des incidents dont la vie bourgeoise est pleine”. Afin de recentrer son travail, Flaubert écoute ce conseil et décide donc de s’inspirer d’un fait divers de Normandie qui s’est déroulé sous le règne de Louis-Philippe, lorsque l’épouse d’un officier de santé du nom de Delamarre s’était empoisonnée. Ainsi, pendant les quatres années de rédaction, Flaubert tente de retracer une biographie imaginaire de cet événement en essayant de répondre à une question : comment cette bourgeoise de province avait-elle franchi le pas vers la mort ?

Fille d’un agriculteur assez riche, Emma Rouault se voit élever dans un couvent dans lequel elle passe son temps libre à lire des romans qui vont grandement influencer son imagination. Un jour, Charles Bovary arrive dans la ferme afin de soigner le père d’Emma, alors souffrant d’une fracture de la jambe. Rapidement, le médecin tombe amoureux alors même qu’il est marié. Peu de temps après ces événements la femme de Charles décède, permettant à ce-dernier de se marier avec Emma. Lui aime sa femme profondément tandis qu’elle commence petit-à-petit à regretter son choix, se rendant bien compte que Charles n’est pas le prince des romans de chevalerie.

Notre extrait se situe dans la première partie du roman, au septième chapitre, dans lequel nous suivons Emma qui commence à réellement prendre conscience que la vie conjugale dont elle a toujours rêvé est bien éloignée de sa situation actuelle.

Ainsi nous pourrons nous demander : dans quelle mesure cet extrait met-il fin à l’illusion romanesque d’Emma tout en bâtissant la figure mélancolique du personnage ?

Nous avons pu distinguer trois mouvements dans ce texte : le premier des lignes 1 à 10 qui introduit la progressive désillusion d’Emma. Le deuxième mouvement s’étend des lignes 11 à 24 et présente le décor de la ballade d’Emma, lui-même symbole et représentation de sa situation amoureuse et enfin le dernier mouvement des lignes 25 à 45 nous expose la mélancolie et les regrets d’Emma sur son passé.

I/ désillusion amoureuse d’Emma

l. 1 à 4 : l’extrait débute par l’adverbe “cependant” (l.1) marquant une rupture directe entre deux temps, deux mondes dorénavant opposés. Emma, semble à cet instant se fier aux récits qui ont bercé sa jeunesse pour “se donner de l’amour” (l.1). Il s’agit ici d’une volonté ferme prise par le personnage lors de son mariage comme le témoigne le verbe “voulut” (l.1), seul verbe conjugué à ce temps dans le paragraphe. Les romans imprègnent Emma dans son intégralité, elle se laisse influencer en toute naïveté par “les théories qu’elle croyait bonnes” (l.1). Le verbe croire ainsi que l’attribut du sujet “bonnes” qui vient compléter les “théories” nous montrent la confiance aveugle que l’héroïne possède pour ces récits fictionnels. De plus nous retrouvons par la suite une scène très imagée, mettant en scène Emma : elle se situe dans un “jardin” (l.2) topos littéraire, locus amoenus propice au développement des sentiments amoureux. Le CCT “au clair de lune” (l.2) nous expose quant à lui une atmosphère calme, détendue. Les références musicales et poétiques exprimées par les GN “rimes passionnées” (l.2) et “adagios mélancoliques” (l.3), nous montrent l’intérêt d’Emma pour les scénarios “à l’eau de rose” qu’elle puise dans les romans. Pour elle le véritable amour est celui décrit dans les romans et elle tente de le retranscrire dans sa vie avec Charles. Sa maîtrise semble plutôt chevronnée comme le témoignent les multiples verbes à l’imparfait, symbolisant son effort : “récitait” (l.2), “tout ce qu’elle savait par coeur” (l.2) et “chantait en soupirant” (l.3). Emma se donne du mal pour appliquer ce qu’elle lit comme le démontrent les CCManière “par coeur” et “en soupirant”, illustrant donc son apprentissage et son implication. Cependant l'effervescence d’Emma sur ces premières lignes est de courte durée comme l’indique la conjonction de coordination “mais” (l.3). En effet, l’émotion s’efface progressivement pour laisser place à la monotonie et la banalité du quotidien. Les deux comparatifs “aussi calme qu’auparavant” (l.3-4) et “ni plus amoureux ni plus remué” (l.4) viennent en ce sens, confirmer le caractère éphémère pour ne pas dire inutile des actions d’Emma. Non seulement le scénario romanesque n’exacerbe pas les sentiments de Charles, mais il ne fonctionne pas mieux sur Emma.

l.5 à 10 : L’expression de la ligne 5 “battre le briquet” peut s’interpréter de différentes manières : la première, si l’on s’intéresse à la suite de la phrase, convoque la métaphore de feu et de l’amour. Emma n’a alors pas réussi à “faire jaillir une étincelle” (l.5) càd que malgré ses efforts, elle n’arrive pas à allumer la flamme de l’amour, celle de son cœur. La deuxième interprétation concerne un sens parallèle à l’expression qui cette fois-ci porte sur le désir charnel, qui dans le cas présent n’est pas non plus éveillé. On comprend alors que le personnage éponyme n’éprouve plus une once de sentiments pour son mari. Il semblerait qu’Emma soit seulement capable de créer des scénarios fictifs et impropres à la réalité : cette-dernière est qualifiée par le terme “incapable” (l.6) par le narrateur qui évoque l’incapacité de l’héroïne de se confronter à une réalité existencielle . Le “reste” (l.6) qualifiant la réalité, ainsi que les nombreuses négation : “n’éprouvait pas” (l.6), “tout ce qui ne se manifestait point” et également “incapable [...] de comprendre” (l.6) présentent la déconnexion totale du personnage de sa réalité, elle est victime d’une illusion sentimentale. Ce décalage s’explique par ailleurs avec de nouveau l’utilisation du verbe “croire” (l.6), dont l’incapacité s’annule avec la négation “ne se manifestait point”. En résulte qu’Emma ne sait croire qu’en les “formes convenues” (l.7) qui reprennent tous les signes distinctifs qu’elle a pu observer dans ses livres, prouvant donc qu’Emma ne sait que croire en une réalité marginale. Malgré tout, il semblerait que Madame Bovary ne trouve pas en Charles ses “formes convenues” telles qu’elle les entend alors même que son mari l’aime profondément. Le verbe pronominal “se persuada” (l.7) conjugué au passé simple démontre une réflexion personnelle d’Emma concernant son mari : elle pense qu’il ne ressent plus rien pour elle. La “passion de Charles” (l.7) terme fort qui retranscrit parfaitement les sentiments du médecin vient s’opposer à la vision qu’a Emma de ces sentiments ; vision illustrée par la négation "n’avait plus rien d’exorbitant" (l.8). La preuve est, pour la jeune femme, le caractère devenu habituel, presque comme une routine, des petites attentions de Charles à son encontre. Le substantif “expansions” (l.8) témoigne d’un petit plus, d’un ajout qui au début possédait quelque chose d’unique et d’appréciable mais qui, au fil du temps, est venu s’inscrire dans la monotonie de la vie de couple. Cette “habitude parmi les autres” (l.9) témoigne justement de cette monotonie, renvoyée vers la métaphore du repas “comme un dessert prévu d’avance, après la monotonie du dîner” (l.9-10). La métaphore illustre bien la vie du couple qui, de l’entrée jusqu’au dessert, demeure ennuyeuse et prévisible.

II/ Le promenade et ses décors, métaphore de la situation amoureuse

l.11 à 13 : Le début de ce deuxième mouvement nous présente Charles comme un homme respecté puisque le médecin se voit offrir un chien, directement destiné à sa femme. La “levrette d’Italie” (l.12) est la femelle du lévrier, chien utilisé pour la chasse au lièvre à l’époque. Cependant Emma n’étant pas adepte de cette pratique, son chien lui sert uniquement d’animal de compagnie comme le montre le CCManière “pour se promener” (l.12). De plus, l’adverbe “quelquefois” (l.12) vient compléter le verbe “sortait” (l.12) pour souligner ironiquement les sorties rares et aléatoires d’Emma, qui en sortant de chez elle, tente de sortir de sa routine ennuyeuse. Cette vision des choses est complétée par la locution prépositionnelle “afin de” (l.12) prolongée ligne 13 avec “et de”.

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