Commentaire d'arrêt responsabilité pénale des personnes morales
Rapports de Stage : Commentaire d'arrêt responsabilité pénale des personnes morales. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresire que l’infraction a forcément été commise par ses organes ou représentants.
La responsabilité pénale d'une personne morale peut-elle être engagée lorsque l'infraction a été commise pour son compte, alors même que l'identité de l'auteur des manquements constitutifs du délit d'homicide involontaire n'a pas été identifiée? En d’autres termes, peut-on remettre en cause le caractère indirect de la responsabilité pénale des personnes morales ?
La chambre criminelle de la Cour de cassation a d’une part confirmé l’arrêt rendu par la cour d’appel en rappelant que la société est coupable du chef d’homicide involontaire à la suite d’une accident mortel du travail subi par l’un de ses salariés, en raison de l’inobservation de dispositions relatives à la sécurité des travailleurs. En effet pour elle, le simple fait que l’infraction ait été commise pour le compte de la société par ses organes ou représentants suffit à engager la responsabilité pénale de cette dernière, même si l’auteur direct de la faute n’a pas été repéré. Toutefois, la Cour considère d’autre part, que l’arrêt de la cour d’appel de Metz doit être cassé et annulé, mais uniquement concernant l’affichage de sa décision pendant trois mois.
Il s’agit d’aborder dans une première partie la difficulté pour les juges d’identifier l’organe ou le représentant qui a commis la faute (I) puis dans une seconde partie de mettre en exergue la protection des personnes morales et la portée de l’arrêt d’espèce (II)
I. La difficulté pour les juges d’identifier l’organe ou représentant qui a commis la faute : une « faute diffuse »
La Cour de cassation se heurte à la difficulté d’identifier l’organe ou le représentant qui a commis directement la faute (A), c’est pourquoi cette dernière a décidé de prendre des raccourcis en retenant une présomption de culpabilité à l’encontre des personnes morales en omettant d’identifier les auteurs directs de la faute commise. Ceci nous conduit à remettre en cause le caractère indirect (B).
A. L’éventuelle imprécision de l’article 121-2 du code pénal
L’article 121-2 alinéa 1er du code pénale dispose que : « Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. »
Cet article est invoqué par la société Sollac Lorraine qui souhaite se défendre en soulignant que la cour d’appel l’a condamné pour homicide involontaire, sans rechercher l’organe ou représentant de la personne morale qui a effectivement commis une faute de non respect d’une obligation de prudence ou de sécurité, au sens de l’article 221-6 du code pénal.
L’article 121-2 a fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité tendant à constater son imprécision, ce qui démontre bel et bien son caractère ambivalent. Pourtant il est clairement dit dans l’article que la responsabilité pénale des personnes morales est soumise à une double condition : que les infractions soient commises pour le compte de la société d’une part et par ses organes ou représentants d’autre part. Ici dans l’arrêt du 20 juin 2006, on constate que la Cour de cassation, confirmant la décision des juges du fond, retient la responsabilité pénale des personnes morales, sans que ses organes ou représentants ne soient identifiés et a fortiori inculpés pour les fautes commises. On peut dès lors considérer qu’il y a par le biais de cette jurisprudence une dépénalisation des personnes physiques, puisque ce n’est pas la personne morale en tant qu’entité juridique abstraite qui a pu commettre une telle faute, il y a nécessairement eu un intermédiaire. Le raisonnement est contradictoire. Il semblerait donc que la jurisprudence méconnaisse les termes de l’article et dénature son sens (non-renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité).
Il est à rappeler que la Cour est soumise au principe de l’interprétation stricte de la loi pénale. Le principe de légalité qui constituait une garantie contre l’arbitraire des juges, se révèle moins solide qu’auparavant. L’article 121-2 du code pénal constitue une brèche permettant une extension des prérogatives des juges.
Le législateur aurait donc respecté l’exigence de précision de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, et n’aurait pas porté atteinte aux droits et aux libertés garanties par l’article 61-1 de la Constitution. Néanmoins ce serait la Cour de cassation qui remettrait en cause le caractère indirect de la responsabilité pénale des personnes morales.
B. La remise en cause du caractère indirect de la responsabilité pénale des personnes morales : une présomption de culpabilité
Le législateur aurait donc respecté l’exigence de précision de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, et n’aurait pas porté atteinte aux droits et aux libertés garanties par l’article 61-1 de la Constitution. Néanmoins ce serait la Cour de cassation qui remettrait en cause le caractère indirect de la responsabilité pénale des personnes morales.
On parle de responsabilité par ricochet pour mettre en exergue le fait que la personne morale soit responsable indirectement.
Toutefois dans l’arrêt du 20 juin 2006, la Cour a ouvertement éliminé le critère consistant à identifier l’auteur direct de la faute. De ce fait, comment peut-on parler d’auteur indirect, quand on sait que l’auteur direct est inexistant puisque non identifié ?
C’est pourquoi une partie de la doctrine pense que cette remise en cause du caractère indirect va même jusqu’à se transformer en une responsabilité pénale directe voire quasi directe des personnes morales.
On peut pointer du doigt une certaine forme d’émancipation de la Cour de cassation dans la façon dont elle applique comme elle l’entend la loi pénale, en procédant par analogie. En effet l’analogie étant une ressemblance partielle entre deux choses, on peut constater que dans l’arrêt d’espèce la situation semble permettre l’application de l’article 121-1 du code pénal et pourtant les éléments de fait ne permettent pas d’en faire réellement l’application, au mieux une application partielle est envisageable. Il y a non respect de l’article 7 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, qui commande de ne pas appliquer la loi pénale de manière extensive au détriment de l’accusé, surtout par analogie.
Malgré quelques écarts de conduite de la Cour de cassation à travers de sa décision du 20 juin 2006, cette dernière a néanmoins respecté certains principes. La décision qu’elle a rendue ne constitue pas un cas isolé, elle s’inscrit dans tout un courant jurisprudentiel.
II. L’incontestabilité des fautes commises et la portée de l’arrêt
Il s’agit de démontrer dans un souci de protection de la personne morale que la Cour a bien recherché si cette dernière était réellement responsable indirectement de l’accident (A) et de souligner que la décision d’espèce s’inscrit dans un nouveau courant jurisprudentiel défavorable à l’identification de l’auteur direct de la faute commise (B).
A. L’absence de cause exonératoire de responsabilité de la société
La victime de l’accident, Alain X, qui avait suivi une formation par la société Sollac Lorraine concernant le travail en hauteur et sur les risques engendrés par le franchissement d’un garde-corps, n’a malgré tout pas été dissuadée d’emprunter la plate-forme.
Il appartient donc à la Cour de cassation de rechercher si cette faute commise par la victime permet d’exonérer la responsabilité de la société. La Cour n’a pas omis cette hypothèse dans un souci de protection de la personne morale.
Cependant il n’est pas possible de remettre en cause la responsabilité de la société, car les fautes qui ont été commises sont incontestables dans la mesure où cette dernière n’a pas « accompli les diligences normales lui incombant compte tenu de sa mission, de ses fonctions, de ses compétences ainsi que des moyens mis à sa disposition ».
En effet la société aurait du procéder au démontage et à l’enlèvement de la plate-forme litigieuse, « devenue au fil du temps de plus en plus vétuste et dangereuse ». Il lui incombait également de « procéder à un signalement des lieux suffisamment dissuasif tel que garde-corps
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