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La Théorie Des Situations Didactiques De Brousseau

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IREM ou l’Ecole Michelet dans l’élaboration de la didactique des mathématiques.

Né en 1933 au Maroc, BROUSSEAU a d’abord été normalien dans le Lot et Garonne. Les

Ecoles Normales recrutaient les futurs instituteurs dès la classe de seconde et après quatre

ans les jeunes gens devenaient enseignants dans une classe de l’école primaire et ceci le plus

souvent jusqu’à leur retraite. Dans les années soixante, le début de la massification de

l’enseignement secondaire entraîne un manque de professeurs. BROUSSEAU est ainsi tiré

hors de sa classe pour aller sur les bancs de l’Université où il peut ensuite suivre des études

de mathématiques financées par les IPES. Dans le même temps s’amorce une autre

révolution, celle des mathématiques modernes, qui remet en cause l’ordonnancement

traditionnel du savoir mathématique enseigné. Cette révolution coïncide avec celle plus

confidentielle alors de la pensée pédagogique appuyée sur les travaux de la psychologie

génétique développée par Piaget. Il s’agit simultanément d’enseigner d’autres

Alain KUZNIAK

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mathématiques et ceci autrement. Comme assistant à la faculté de Bordeaux, BROUSSEAU

se trouve aspiré dans le mouvement dont il va être un des acteurs en oeuvrant pour la

création des IREM et aussi d’un centre pour l’observation de l’enseignement des

mathématiques (le COREM) dans l’école Michelet à Talence. C’est dans cette école qu’il a

pu, avec l’aide d’enseignants volontaires, mettre au point, développer et étudier, à partir de

1971, de nombreuses situations d’enseignement des mathématiques.

Il peut ainsi articuler de manière spectaculaire ces deux pierres d’achoppement de toute

recherche sur l’enseignement des mathématiques : la théorie et l’expérience pratique. Par la

suite, il contribuera à l’émergence institutionnelle, dans le cadre de l’Université, des études

de didactique des mathématiques avec la création de DEA puis de Doctorats de didactique.

Aujourd’hui, alors que les IREM regardent avec nostalgie leur passé, l’expérience de

BROUSSEAU rappelle la nécessité de la convergence de plusieurs types de volonté pour

parvenir à progresser dans la recherche scientifique : une volonté personnelle bien sûr mais

appuyée sur celle d’une collectivité elle-même relayée par la volonté des gouvernants.

1. Vers la didactique des mathématiques

1.1. La mise en place d’une « didactique nouvelle »

Un des apports majeur de BROUSSEAU est certainement d’avoir contribué à dégager un

champ spécifique de recherches autour de la didactique des mathématiques. Ce champ se

crée en rupture avec la didactique classique dont BROUSSEAU fait remonter les sources à

COMENIUS, penseur tchèque un tantinet mystique du XVIIe siècle et inventeur de l’idée de

grande didactique (didactica magna). Pour COMENIUS la didactique est « l’art d’enseigner »

tout à tout le monde :

Mais j’ose promettre, moi, une grande didactique, c’est-à-dire un art universel qui permet

d’enseigner tout à tous avec un résultat infaillible ; d’enseigner vite, sans lassitude ni ennui chez les

élèves et chez les maîtres, mais au contraire dans le plus vif plaisir.

Une méthode unique suffit pour toutes les matières :

Il n’existe qu’une seule méthode pour enseigner toutes les sciences : c’est la méthode naturelle,

valable aussi bien dans les arts que dans les langues. Les variations qui pourraient exister sont si

insignifiantes qu’elles ne sauraient exiger de méthode spécialisée.

D’autre part, COMENIUS ne tire pas sa méthode de l’observation de ce qui est mais d’une

réflexion a priori.

Enfin, je démontre tout cela a priori, c’est-à-dire en le tirant de la nature immuable des choses ;

comme d’une source vive coulent sans cesse des ruisseaux qui s’unissent finalement en un seul

fleuve, j’établis une technique universelle qui permet de fonder des écoles universelles.

Cette approche va influencer la vision traditionnelle qui considère l’enseignement d’une

discipline comme éclaté en deux composantes indépendantes : le contenu et la didactique.

Cette dernière apparaît comme naturelle, immuable et en quelque sorte intemporelle.

En réaction à cette conception générale et purement spéculative de la didactique classique,

BROUSSEAU insiste sur les spécificités liées au contenu mathématique et sur la nécessité

d’études expérimentales et scientifiques. En effet, selon lui

« on sait aujourd’hui que ni l’humanité entière, ni les êtres humains individuellement, n’acquièrent

toutes les connaissances dans les mêmes circonstances, ni suivant les mêmes processus: la géométrie,

LA THÉORIE DES SITUATIONS DIDACTIQUES DE BROUSSEAU

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l’algèbre ou les probabilités n’ont pas la même genèse ni la même organisation ».

Ainsi pour lui, la conception ou l’étude d’un projet d’enseignement dépend de la

connaissance qui est l’objet de l’enseignement, et donc de la discipline. Et elle exige en

retour des aménagements originaux et appropriés de cette connaissance car pour

BROUSSEAU l’enseignement produit chez les élèves des formes de connaissances qui varient

suivant les conditions didactiques et qui diffèrent des savoirs de référence.

D’autre part, à partir du XXe siècle, l’apprentissage et l’enseignement sont devenus un

champ d’études expérimentales. La nouvelle didactique que défend BROUSSEAU va

s’attacher à la conception et à l’étude de faits didactiques mais en s’appliquant à distinguer,

dans ses productions, les déclarations à caractère scientifique des opinions ou des

dispositifs d’ingénierie. La didactique souhaitée par BROUSSEAU doit développer des

méthodes et des concepts originaux autour de son champ de préoccupation. Elle n’est pas

réductible aux domaines classiques comme les mathématiques, la psychologie ou la

sociologie.

1.2. La notion de situation didactique

BROUSSEAU met au coeur de son approche de la didactique la notion de situation

didactique. Le terme situation désigne l’ensemble des circonstances dans lesquelles une

personne se trouve, et des relations qui l’unissent à son milieu. Une situation didactique est

une situation où se manifeste directement ou indirectement une volonté d’enseigner.

Pour comprendre la conception privilégiée par BROUSSEAU dans l’étude des situations, il

faut associer à la notion de situation didactique celle de situation non didactique. Cette

dernière est la situation rencontrée par le mathématicien ou l’usager des mathématiques

lorsqu’il doit résoudre un problème dont la finalité première n’est pas l’apprentissage d’une

quelconque notion mathématique. En s’inspirant de l’usage des connaissances

mathématiques en mathématiques ou en dehors des mathématiques, BROUSSEAU introduit

la notion

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