La mise en œuvre de la responsabilité politique du Gouvernement sous la Ve République
Dissertation : La mise en œuvre de la responsabilité politique du Gouvernement sous la Ve République. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et MémoiresPar Guillaume ARMENGAUD • 22 Avril 2023 • Dissertation • 1 799 Mots (8 Pages) • 271 Vues
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La mise en œuvre de la responsabilité politique du Gouvernement sous la Ve République
Pour la 100ème fois sous la Ve République, la Première ministre Elisabeth Borne à
engager la responsabilité de son gouvernement sur la base de l’article 49 alinéa 3 de la
Constitution, afin de faire adopter la controversée réforme des retraites. Disposant d’une très
faible majorité à l’Assemblée nationale, certains constitutionnalistes parlent de crise du fait
majoritaire, et s’interrogent sur l’efficacité de la responsabilité politique du gouvernement dans
ces moments de crise.
Il convient, dès lors, de définir certaines notions. Le rôle du Premier ministre tout
d’abord est défini dans la Constitution, il « dirige l'action du Gouvernement » (art.21 C.) et est
nommé par le Président. Par conséquent, c’est à lui que revient la décision d’engager la
responsabilité politique de son gouvernement.
Cette dernière est intimement liée à la notion de confiance donnée par le Parlement : le
Gouvernement est obligé de démissionner lorsqu’il n’a plus la confiance du Parlement. Cette
responsabilité est collective (tout le Gouvernement doit démissionner) car il existe un principe
de solidarité ministérielle. En ce sens, elle se différencie de la responsabilité politique des élus
qui ne se traduit que par une sanction dans les urnes, qui est individuelle et qui n’est pas
contraignante juridiquement. Aussi, la responsabilité politique du gouvernement est aussi à
différencier de la responsabilité pénale des ministres, qui est elle aussi une responsabilité
individuelle. La mise en œuvre de la responsabilité politique du gouvernement a 2 penchants :
elle peut être d’origine parlementaire, on parle alors de mise en cause, ou bien d’origine
gouvernementale, on parle alors de mise en jeu. Cette mise en œuvre se fait devant le Parlement,
tel que le dispose l’article 20 de la Constitution : Le Gouvernement « est responsable devant le
Parlement ».
Le Parlement se compose de 2 chambres, le Sénat élu au suffrage universel indirect et
l’Assemblée nationale, élue au suffrage universel direct. En réalité, il ressort des articles 49 et
50 que c’est exclusivement auprès de l’Assemblée nationale que la responsabilité du
Gouvernement est mise en œuvre. Cette différence consistant dans l’engagement de la
responsabilité du Gouvernement seulement devant l’Assemblée nationale se comprend
facilement, puisque dans un régime parlementaire, il est accepté que le Gouvernement est
traditionnellement issu de la majorité de l’assemblée élue directement par le peuple et c’est
donc devant cette dernière qu’il est responsable.
Ce principe de responsabilité politique du Gouvernement a fortement évolué depuis les
IIIe et IVe Républiques, qui connaissaient alors une forte instabilité gouvernementale puisque
le Parlement disposait de fortes prérogatives lui permettant de faire et défaire les gouvernements
très voire trop rapidement. À titre d’exemple, entre 1947 et 1958, 24 Gouvernements se sont
succédé. Voulant limiter cette instabilité gouvernementale, les constituants de la Ve
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République, et notamment De Gaulle et Debré, ont voulu modifier cette responsabilité politique
du Gouvernement, notamment en la rationnalisant, mais aussi en favorisant l’émergence d’une
majorité parlementaire favorable au Gouvernement.
Dès lors, il convient de s’intéresser à cette dynamique de rationalisation ainsi qu’à
l’effectivité, de nos jours, de la responsabilité politique du Gouvernement. Nombre de
constitutionnalistes s’accordent à dire que le pouvoir législatif, composé de l’Assemblée
nationale et du Sénat, devient un pouvoir en retrait par rapport aux autres. Il convient d’analyser
cette responsabilité politique du point de vue de la relation entre pouvoir exécutif et pouvoir
législatif sous la V° République. En effet, telle une épée de Damoclès, la responsabilité
politique du Gouvernement est latente, de sa naissance jusqu’à sa mort, et peut être actionnée à
tout moment par le pouvoir législatif. Prévue à l’origine pour permettre un certain équilibre des
institutions, il convient de s’intéresser à l’effectivité de cette mise en œuvre de la responsabilité
politique du Gouvernement, après des années de rationalisation et de pratique. Une pratique qui
peut être très différent de la théorie vu le nombre de situations possibles : fait majoritaire,
cohabitation, majorité absolue à l’AN ou majorité relative…
Sous la Ve République, la mise en œuvre de la responsabilité politique du
Gouvernement permet-elle de garantir un équilibre institutionnel ?
Deux penchants, liés à l’initiateur de la mise en œuvre de la responsabilité politique du
Gouvernement, seront analysés. Dans un premier temps, nous verrons que la mise en jeu de la
responsabilité par le Gouvernement est inadaptée (I), et d’autre part, que la mise en cause par
l’Assemblée nationale est limitée (II).
I. Une mise en jeu inadaptée
Sous la Ve République, deux possibilités de mise en jeu permettent au Premier ministre
soit de légitimer son gouvernement par la question de confiance (A), soit de forcer la main de
l’Assemblée nationale lors du vote d’une loi (B).
A/ Une mise en jeu facultative
Le Gouvernement est nommé par le Président au titre de l’article 8 de la Constitution.
Mais cette simple nomination (et non élection) ne suffit pas à légitimer le Gouvernement qui
vient de naitre. Il est ainsi d’usage de poser une question de confiance à l’Assemblée nationale
au début de chaque nouveau cycle gouvernemental. L’article 49 alinéa 1 de la Constitution
prévoit que le Premier ministre a la faculté d’« engager devant l'Assemblée nationale la
responsabilité du Gouvernement sur son programme ou éventuellement sur une déclaration de
politique générale ». Cette question, si elle obtient une réponse favorable permet au
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gouvernement d’être légitimé, par la mise aux voix de la confiance que lui accorde les députés
(élus au SUD). Notons par ailleurs qu’il est également prévu une procédure similaire devant le
Sénat, à l’article 49 alinéa 4 de la Constitution. Cependant, ce dernier ne prévoit pas de mise en
jeu de la responsabilité politique du Gouvernement.
Néanmoins, cette mise aux voix de la confiance est cantonnée au bon vouloir du Premier
Ministre. Il n’y a rien de contraignant ni dans la lettre de l’article, ni dans son esprit, ce n’est
qu’un usage républicain. En juillet 2023, par exemple, suite à sa nomination, la Première
ministre Elisabeth Borne n’a pas suivi cette tradition. Disposant d’une majorité relative au
Parlement, elle n’a pas voulu prendre le risque de mettre aux voix la confiance, donc son
gouvernement se contentera de la seule confiance présumée, prévue
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